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Alors que François Bayrou résiste aux motions de censures, il est rattrapé par une ancienne affaire qui refait surface, celle des sévices sexuels du Collège Notre-Dame de Bétharram.
En France, François Bayrou, qui jusqu'à présent résiste à chaque motion de censure déposée contre lui, pourrait bien tomber pour une autre affaire qui n'a rien à voir avec son gouvernement. Lors des séances publiques à l'Assemblée nationale cette semaine, il a plusieurs fois été interpellé sur l'affaire Bétharram, du nom du collège privé catholique, situé près de Pau, ville dont il est le maire.
L'opposition l'accuse d'avoir étouffé une affaire de pédophilie remontant aux années 80-90. Le Premier ministre prétend n'avoir pas eu connaissance de ce scandale, mais c'est beaucoup plus compliqué que ça.
C'est d'autant plus complexe que durant les années 90, l'un des fils de François Bayrou a été scolarisé dans l'établissement et que son épouse y donnait des cours de catéchisme. Or, l'actuel Premier ministre béarnais est un potentat local. Aujourd'hui maire de Pau, il a été président du département des Pyrénées-Atlantiques de 1992 à 2001 et ministre de l'Éducation nationale entre 1993 et 1997. Difficile d'imaginer qu'il n'ait pas eu vent de l'affaire.
Châtiments corporels, gifles, coups de règle
Il a juste concédé dans une interview que la rumeur, il y a 25 ans, laissait entendre qu'il y avait eu des claques à l'internat. Mais, affirmait-il, il n'avait jamais entendu parler de risque sexuel. C'est un peu court, jeune homme, parce que les faits dénoncés s'étalent des années 1950 jusqu'à l'an 2000.
Cette institution, Notre-Dame de Bétharram, a été fondée en 1837. Elle était connue pour sa discipline de fer. Les châtiments corporels, gifles, coups de règle, et même nuits passées dehors en pyjama par des températures hivernales y étaient monnaie courante. Des sanctions admises autrefois dans les pensionnats catholiques. Mais à Bétharram, c'était beaucoup plus grave. Les sévices sexuels auraient commencé en 1957 et se seraient poursuivis pendant plus de 40 ans. Plusieurs prêtres et surveillants sont accusés de viol et d'attouchements. Et si l'on ajoute les poursuites pour violences, en tout, 112 plaintes ont été déposées par d'anciens élèves.
Ainsi, Pierre Silviet-Caricard, directeur de l'institution, a été mis en examen le 28 mai 1998 pour viol et agression sexuelle sur mineurs de moins de 15 ans par personne abusant de son autorité. Après moult péripéties, il se suicide le 5 janvier 2000, une semaine avant de se présenter devant le juge d'instruction et l'épouse de François Bayrou assistera à ses obsèques.
Plainte pour diffamation
Quant à l'actuel Premier ministre, le juge Christian Mirande, chargé de l'affaire, affirme l'avoir rencontré en 1998. Il est venu, dit-il, en tant que parent d'élève, parce qu'il était inquiet pour son fils. Mais voilà, Bayrou réaffirme et répète qu'il ne connaissait pas le fond de l'affaire et menace de porter plainte pour diffamation.
Deux questions essentielles demeurent. A-t-il menti à la représentation nationale en affirmant qu'il n'avait entendu parler que de quelques claques ? Et surtout, a-t-il usé de son influence pour étouffer ou atténuer le scandale ? Pour l'instant, il n'est pas poursuivi par la justice. Mais la récente mise en garde à vue de son prédécesseur, Jean Castex, pour une affaire de détournement de fonds publics, devrait l'inciter à la réflexion et à prendre le chemin du confessionnal.