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"Ils ne se rendent plus compte du danger": près de 14.000 Belges souffrent d'Alzheimer, comment ces patients sont-ils encadrés?

Une vie rythmée par des souvenirs emmagasinés précieusement dans notre mémoire et subitement, l’impression qu’ils s’effacent, que le passé s’en va : c’est avec ces mots que les patients atteints d'Alzheimer nous ont décrit leur maladie. Quelles solutions sont proposées pour encadrer les patients ? 

Rita et Marcel se remémorent 50 ans de vie commune. Du Vietnam, aux États-Unis en passant par l’Île de la Réunion. Marcel vit avec la maladie d'Alzheimer puis plus de 10 ans. Des troubles de la mémoire, des difficultés à se concentrer sur une tâche… Les symptômes sont apparus progressivement. "Il s'exprime difficilement. Il ne comprend plus tous les mots. Et il ne sait plus compter", témoigne Rita.  

À 80 ans, Marcel est assisté par son épouse dans la moindre action du quotidien, tant pour manger et boire que pour s'habiller. Une attention 24h sur 24h qui représente une charge mentale conséquente pour les aidants proches

Une fois par mois, les proches de malades se retrouvent dans cet Alzheimer café où ils échangent des conseils et partagent leurs difficultés du quotidien. "C'est quelque chose de très difficile à vivre quand la personne qu'il y a en face de vous, qui a été à un moment donné un référent, qui vous élevée, ne vous reconnaît plus", raconte Micheline, aidante proche d’une patiente atteinte de la maladie d’Alzheimer.

En Belgique, près de 140.000 personnes sont atteintes de la maladie. 75% des patients vivent chez eux, mais ils peuvent également faire appel à des soignants à domicile. Selon la ligue Alzheimer, il y a aujourd’hui des inégalités importantes entre les différentes régions du pays. "En zone rurale, il y a moins de services, les distances sont plus grandes à parcourir. C'est parfois le financement de ces aides professionnelles qui devient tangent parce que c'est plus coûteux", explique Sabine Henry, présidente de La ligue Alzheimer.

Elles ne se rendent plus compte du danger 

À un stade avancé de la maladie, un accident peut se produire à tout moment, affirme Lara Huyghe, neuropsychologue aux Cliniques universitaires Saint-Luc : "Avec l'avancée de la maladie, les personnes peuvent présenter des troubles de décision et dans leur capacité de jugement. Elles ne se rendent plus compte du danger. Il peut aussi y avoir des troubles de la reconnaissance des objets ou des comportements un peu impulsifs". 

"On est toujours complet"

Souvent perçues par les proches comme une solution de dernier recours, les maisons de repos sont aujourd'hui essentielles. Rita a anticipé : "J'ai pris mes dispositions. Je l'ai déjà inscrit au home, au cas où". 

Pour nous en rendre compte, nous nous sommes rendus dans une maison de vie à Manage, dans le Hainaut. Brieuc accompagne une centaine de résidents atteints de troubles cognitifs. Le constat est clair : il n’y a plus aucune chambre disponible. "On est toujours complet. Les places sont limités, et il en manque dans les maisons de Belgique, ça c'est clair", confirme Brieuc Collard, coordinateur à l'ASBL Les Jardins de Scailmont. 

Un taux d’occupation qui a de quoi nous inquiétait, car la population ne cesse de croître, tout comme l'espérance de vie des habitants. Selon la revue scientifique The lancet, d’ici 2050, le nombre de patients atteints de démence en Europe occidentale devrait atteindre 14 millions, soit une hausse de 74% par rapport à 2019.

Comment les autorités comptent-elles répondre à ce défi de taille ? C’est la question que nous avons posée au Ministre wallon de la santé. "Nous allons encourager la création d’unités spécialisées et de villages Alzheimer (…), mais aussi renforcer la formation des professionnels. Parallèlement, nous soutiendrons le maintien à domicile, (…) en développant des solutions innovantes, comme la télésurveillance, les habitats adaptés et les services connectés", a dit Yves Coppieters, ministre wallon de la santé. 

Et la problématique ne concerne pas uniquement les personnes âgées. À 50 ans, Raphaël est atteint d’une maladie apparentée à Alzheimer :"Tout ce qui est mémoire à court terme ne fonctionne plus et depuis quelque temps, j'ai des soucis au niveau de la parole". 

Avec ces symptômes, impossible de continuer à travailler. Le couple a été contraint de déménager pour des raisons financières : "On a du revendre notre belle maison". Raphaël a également tendance à s’isoler socialement, car suivre une discussion est une véritable épreuve.

Quel que soit leur âge, les patients et leurs proches ont dû réapprendre à vivre, à prendre le temps, à s’adapter. À ce jour, aucun traitement ne permet de guérir la maladie d’Alzheimer.

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