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Parfois surnommé le "Bill Gates" britannique, l'entrepreneur Mike Lynch, qui fait partie des disparus du naufrage d'un super-voilier en Sicile, a vu sa réputation ternie ces dernières années par des accusations de fraude - dont il a été acquitté en juin aux Etats-Unis.
"J'ai hâte de rentrer au Royaume-Uni et de retrouver ce que j'aime le plus: ma famille et l'innovation dans ma spécialité", avait déclaré à l'issue du verdict rendu par un jury de San Francisco (Californie) celui qui a été le conseiller de deux Premiers ministres britanniques.
Originaire de l'Est de l'Angleterre, l'entrepreneur de 59 ans fait partie des six disparus dans le naufrage d'un navire de luxe dans la nuit de dimanche à lundi près de Palerme.
L'épouse de M. Lynch, Angela Bacares, également présente à bord, a quant à elle été secourue.
L'homme d'affaires, à la tête d'une fortune de 500 millions de livres (587 millions d'euros) selon la dernière "Rich List" du Sunday Times, doit son ascension à Autonomy.
Il a fondé cet éditeur de logiciel en 1996 à Cambridge, ville universitaire où il a eu un doctorat, et en a fait un fleuron britannique des technologies, au point qu'il soit racheté en 2011 par le groupe américain HP pour 11 milliards de dollars.
Mais ces dernières années, l'entrepreneur a surtout fait parler de lui pour l'affaire de fraude qui a suivi cette transaction et a porté une ombre sur ce qui apparaissait jusqu'alors comme une rare "success story" de la tech britannique.
HP avait accusé Autonomy d'avoir truqué ses comptes, reprochant notamment à Mike Lynch d'avoir artificiellement gonflé les revenus déclarés, la croissance des revenus et les marges de l'entreprise.
Le groupe américain avait alors passé presque 9 milliards de dollars de dépréciations.
En 2023, M. Lynch a été extradé du Royaume-Uni vers les Etats-Unis pour y être jugé. La justice américaine estimant qu'il présentait un "risque sérieux de fuite", il avait été assigné à résidence à San Francisco sous la surveillance d'un service de sécurité privé à ses frais.
- "Bouc émissaire" -
Il a été acquitté en juin à San Francisco dans le volet pénal du dossier.
Si M. Lynch avait empoché quelque 815 millions de dollars lors de la vente d'Autonomy, il réfutait tous les chefs d'accusation, accusant en retour HP de faire de lui un "bouc émissaire pour ses propres échecs".
"J'ai plusieurs problèmes médicaux qui auraient rendu ma survie difficile" en cas d’incarcération aux Etats-Unis, avait-il raconté fin juin au journal britannique The Times, après être rentré au Royaume-Uni.
Père de deux filles de 18 et 21 ans, cet amateur de chiens - il possède deux teckels et quatre chiens de berger - habite dans le quartier londonien cossu de Chelsea, selon le journal. Il est aussi propriétaire d'une ferme dans le Suffolk (à l'est de l'Angleterre).
Mais le dossier de fraude n'est pas clos: en 2022, la justice britannique avait statué, dans un procès civil, que HP avait été dupé et avait payé trop cher. Les juges doivent encore se prononcer sur les milliards de dollars de dommages réclamés par le groupe américain.
Egalement poursuivi par HP, l'ancien directeur financier d'Autonomy, Sushovan Hussain, avait en outre été reconnu coupable de fraude en 2018 par un jury américain, ce qui lui a valu une peine de cinq ans d'emprisonnement.
L'ombre des démêlés judiciaires de M. Lynch a longtemps pesé sur le cours de Bourse d'une autre entreprise britannique: le groupe de cybersécurité et d'intelligence artificielle Darktrace, dont il est un investisseur de la première heure.
Mais dans un retour de fortune, Darktrace a accepté en avril une offre de rachat du fonds de capital investissement américain Thoma Bravo à 5,3 milliards de dollars, faisant s'envoler son cours de Bourse.
Contactée par l'AFP lundi, une porte-parole de M. Lynch n'a pas souhaité faire de commentaire.