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Le 77e Festival de Cannes s'est ouvert lors d'une cérémonie 100% féminine avec une invitée prestigieuse, Meryl Streep, et la volonté affichée de faire une place au mouvement #MeToo qui n'a pas fini de balayer le monde du cinéma.
Camille Cottin aux manettes, Meryl Streep à l'honneur et Juliette Binoche lui remettant une Palme d'or... Tel était le casting de cette cérémonie.
"Si les contributions des femmes dans l'histoire restent encore trop invisibles, les tiennes ne le sont pas", a déclaré Juliette Binoche à l'actrice. "Tu as changé notre façon de voir les femmes dans le monde du cinéma. Tu nous as donné une nouvelle image de nous-mêmes !", a lancé l'actrice française qui a signé mardi une tribune d'une centaine de personnalités pour une "loi intégrale" contre les violences sexuelles.
Sur la même Croisette où l'ancien producteur Harvey Weinstein, dont la chute a marqué il y a sept ans le début de #MeToo, est accusé d'avoir commis certaines de ses agressions, Camille Cottin, la maîtresse de cérémonie, a entériné le changement d'époque.
"Les rendez-vous professionnels nocturnes dans des chambres d'hôtel des messieurs tout puissants ne font plus partie des us et coutumes du vortex cannois", a-t-elle lancé, sous les applaudissements.
Il faut dire que le mouvement de libération de la parole, dans le 7e art et ailleurs, ne faiblit pas. Il a même failli submerger le Festival avec des rumeurs d'accusations de personnalités, relayées sur les réseaux sociaux et reprises par certains médias, ayant obligé le festival à démentir.
Cette cérémonie a succédé à la traditionnelle montée des marches, gravies par les membres du jury dont Omar Sy, Eva Green et Lily Gladstone, mais aussi la star Jane Fonda, icône de l'Amérique contestataire des années 1970, ou le chien Messi, star de la Palme d'or de l'an dernier, "Anatomie d'une chute".
La compétition démarrera mercredi avec "Diamant Brut", un premier film d'une Française Agathe Riedinger. C'est la première des 22 cinéastes, et des seulement quatre réalisatrices, en lice pour succéder à "Anatomie d'une chute" de Justine Triet.
Parmi eux, Francis Ford Coppola, Paolo Sorrentino ou Jacques Audiard, mais aussi le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof. Ce dernier vient de fuir clandestinement l'Iran pour un lieu tenu secret en Europe et a imploré mardi le cinéma mondial d'apporter un "soutien fort" aux réalisateurs menacés.
Palme d'or d'honneur pour Meryl Streep
La légende d'Hollywood Meryl Streep a reçu des mains d'une Juliette Binoche très émue une Palme d'or d'honneur qui immortalise sa "place indélébile dans l'histoire du cinéma".
"The Queen Meryl", 74 ans, a déjà récolté presque toutes les distinctions, dont un record de 21 nominations aux Oscars et 3 statuettes dorées, mais n'était pas venue à Cannes depuis 35 ans.
"Je suis juste si heureuse que vous ne vous soyez pas lassés de ma pomme", a lâché l'actrice, émue derrière ses lunettes et habillée d'une robe drapée ivoire.
Cette Palme vient récompenser la carrière entamée en 1977 de l'actrice dans "Julia", suivi de "Kramer contre Kramer" - son premier Oscar (1979). Aussi à l'aise dans le mélo - "La maîtresse du lieutenant français" (1981) - elle est inoubliable en rescapée de la Shoah dans "Le Choix de Sophie" (2e Oscar) et en Karen Blixen dans "Out of Africa" (1985). C'est d'ailleurs sur la musique du film de Sydney Pollack qu'elle a fait son entrée sur scène.
À la quarantaine, l'actrice voyant ses rôles diminuer, opère un virage vers la comédie, jusqu'au triomphe en 2006 du "Diable s'habille en Prada".
Deux autres Palmes d'honneur seront remises lors de cette 77e édition, l'une au studio Ghibli le 20 mai et l'autre au réalisateur George Lucas, père de la saga "Star Wars" lors de la cérémonie de clôture.