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Tout est parti des cadavres de deux sangliers découverts à Étalle, en province du Luxembourg. Ces deux sangliers portaient le virus de la peste porcine africaine. Une maladie virale, qui se transmet extrêmement rapidement entre animaux mais rassurez-vous l'homme ne risque rien.
Notre journaliste, Sébastien De Bock, est parti ce vendredi matin à la rencontre d'une éleveuse de porc piétrain à Jodoigne (dans le Brabant wallon). Elle s'est montrée très inquiète face à cette situation.
"C’est très dangereux pour nous, on est si près", déclare-t-elle. "Je suis inquiète car tout peut être porteur du virus. Est-ce que les oiseaux ne peuvent pas l’être aussi avec ces foutus sangliers?
Si ça arrive ici, ça serait très grave. Je pense qu’on doit prendre des mesures draconiennes. Personne ne doit franchir les barrières."
Un autre éleveur de Jodoigne, qui possède entre 100 et 150 porcs Piétrain, préfère également que personne d’autre que lui entre en contact avec ses cochons.
"La peste africaine est quelque chose de vicieux. On a connu une épidémie comme celle-là dans les années 80 et il faut prendre beaucoup de précautions, surtout en sélection porcine, qui est un travail de plusieurs générations", confie-t-il.
"Je ne pourrais pas prendre plus de mesures"
Concrètement, comment va-t-il protéger ses cochons? "Je ne pourrais pas prendre plus de mesures. Je ne vous ai pas laissé rentrer dans les porcheries. Je ne sais pas ce que je pourrais faire en plus. Il faut faire aussi attention aux chiens. Des personnes vont se promener dans les Ardennes et je me demande s’il ne faudrait pas les empêcher d’aller dans cette zone-là. C’est un vecteur de transmission de maladie", explique-t-il.
Les deux cas de sangliers contaminés ont été retrouvés à plus d’une centaine de kilomètres de Jodoigne, mais pour Henry, le danger est à sa porte. "Absolument, il y a plus d’un an, j’ai dit à mon fils que la peste africaine était présente dans les pays de l’Est. Or, le porc n’a pas besoin de passeport et s’amène chez nous via les forêts. Cela avance, et la maladie est toujours plus près de chez nous", conclut-il.
Le ministre wallon de l'Agriculture, René Collin, rappelle lui aussi, ce vendredi matin, qu'il faut être prudent et vigilant. "La peste porcine africaine ne se transmet qu’entre sangliers mais les vecteurs peuvent être très faciles. Quelqu’un qui va se promener dans les bois, qui ne nettoie pas ses bottes et rentre dans un atelier porcin, c'est évidemment un danger. C’est d'ailleurs sans doute via un voyageur ou un transporteur que le virus est arrivé chez nous, peut-être via un sandwich oublié quelque part. C’est une hypothèse", indique-t-il. "Il faut être extrêmement prudent et l’AFSCA, ce matin, rappelle les mesures de précaution qui sont prises. Aucun danger pour l’homme, on peut continuer à manger du cochon. Tous les contrôles sanitaires sont faits."
Un enjeu de santé animale
L'Afsca, l'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire, et le SPW ont confirmé jeudi que deux cas de peste porcine africaine ont été détectés en Wallonie récemment, sur le territoire de la commune d'Etalle en province du Luxembourg, chez des sangliers retrouvés morts et dont des échantillons avaient été envoyés pour analyse à Sciensano. Les animaux étaient bien porteurs du virus de la PPA, ce qui prouve que la maladie, en recrudescence en Europe de l'Est, a eu tendance à se propager aussi vers l'ouest.
"La lutte contre la maladie ne constitue pas un enjeu de santé publique", car elle n'est pas contagieuse pour l'homme, "mais bien un enjeu de santé animale et économique", soulignent l'Afsca et le SPW. Le virus peut en effet facilement se transmettre d'un animal à l'autre, et notamment aux porcs d'élevage, alors qu'il n'existe actuellement pas de traitement ou de vaccination efficace. S'il se répand, ce virus peut donc décimer des élevages porcins et s'accompagner de pertes économiques importantes. "Ce virus peut se transmettre facilement d'un animal à l'autre soit par contacts étroits entre individus, soit par du matériel contaminé (matériel de transport, bottes, etc.) ou via des restes alimentaires porteurs du virus et abandonnés par l'homme", rappellent les instances compétentes, aux niveaux fédéral et régional. Les dernières contaminations en Europe pourraient d'ailleurs "être la conséquence d'introduction de restes de denrées alimentaires abandonnés par des voyageurs en provenance de zones infectées" plus à l'est.
"Un foyer chez nous aurait de très graves conséquences"
Le Service Public de Wallonie prépare les mesures de nature à éviter au maximum la dispersion des sangliers à partir de la zone infectée ainsi que les dispositions relatives à la chasse. Le Département Nature et des Forêts a quant à lui renforcé les procédures de vigilance et d'observation. Si l'on fait une découverte suspecte, il faut contacter le call-center du SPW au numéro 1718. Le Boerenbond a également mis en garde jeudi contre l'avancée de la peste porcine africaine. "Un foyer chez nous aurait de très graves conséquences pour nos élevages, les exportations étant immédiatement compromises." Un épidémie de peste porcine africaine provoquée par de la viande de porc contaminée en provenance d'Espagne avait touché la Flandre occidentale en 1985. Douze entreprises avaient alors été contaminées, 185 autres bloquées et plus de 30.000 porcs abattus.
La Commission européenne a indiqué jeudi soir suivre la situation de près. "La Commission considère la lutte contre la peste porcine africaine comme une priorité vu que la maladie représente une menace pour l'économie de l'Union européenne, en particulier le secteur porcin", selon un communiqué. L'UE est le second plus grand exportateur de viande de porc après la Chine. La ministre allemande de l'Agriculture, Julia Kloeckner, mise au fait des cas de peste porcine africaine détectés à 60 kilomètres de la frontière allemande, a assuré son gouvernement prenait la situation au sérieux. "Nous sommes bien préparés", a-t-elle affirmé, ajoutant que Berlin est en communication constante avec les autorités belges et la Commission européenne à ce sujet.
L'Allemagne a approuvé plus tôt cette année une série de mesures pour lutter contre la propagation de la maladie, dont la suppression d'une interdiction saisonnière de chasse au sanglier.