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La femme de Benoît rejoint une secte "pernicieuse": "Ils utilisent des termes qui parlent à toutes les femmes"

Le danger des sectes n'est souvent pas perçu par leurs membres, mais se fait bien ressentir sur la sphère familiale. C'est le cas dans le couple de Benoît dont la femme a rejoint un cercle de femmes pas si bienveillant qu'il en a l'air.

Depuis deux ans, la femme de Benoît (nom d'emprunt) a rejoint une secte féministe. "Cela s'appelle les tisseuses de rêve, ou aussi mandala. Ne vous fiez pas au nom que cela porte, c'est bien plus pernicieux et manipulateur que l'on ne peut l'imaginer", écrit ce mari en appuyant sur le bouton orange Alertez-nous. 

Ces cercles de femmes, originaires du Canada, tissent des liens de sororité puissants contre le patriarcat et promettent l'abondance financière.

Pourtant, au début, Benoît était plutôt séduit par cette nouvelle activité. Il s’est rapidement rendu compte que c’était une arnaque. "Quand j'ai vu la tournure que ça prenait, que ça devenait tellement intense, que tout tournait autour de ça, je me suis dit qu'il y avait un problème".

C'est très difficile d'aborder le sujet

Pour entrer dans ce cercle, il faut payer 1260 euros. La justification est l’entraide entre femmes. 

"Ils utilisent des termes qui parlent à toutes les femmes : le bien-être, penser à soi-même... Et ils les incitent à faire en sorte de réaliser le rêve de quelqu'un en lui faisant un don. On ne parle jamais d'argent, c'est toujours 'un don'", décrit encore Benoît.

Si notre alerteur a souhaité tirer la sonnette d'alarme, c'est parce que, depuis quelques mois, il constate des changements de comportement chez sa femme. Elle commence à s'isoler et le dialogue devient impossible. "C'est un mur", regrette-t-il. "C'est très difficile d'aborder le sujet sans se faire exclure".

Dès qu'il commence à vouloir aborder le sujet, sa femme se braque : "C'est pour aider les femmes", "tu fais partie du patriarcat", "tu veux tout diriger", sont autant de réponses fermes auxquelles Benoît se heurte.

Mais ce n'est pas qu'au sein du couple que les choses se sont tendues, l'effet se fait ressentir dans les cercles sociaux plus lointains. "Elle a coupé les ponts avec plusieurs personnes en s'imaginant que c'est à cause de ces autres personnes qu'elle n'arrivait pas à évoluer".

Dans le viseur des autorités

Le Centre d'information et d'avis sur les organisations sectaires nuisibles (CIAOSN) étudie le phénomène des organisations sectaires nuisibles en Belgique ainsi que leurs liens internationaux. Sa directrice, Kerstine Vanderput, est bien au courant de l'existence de cette secte. Elle a même déjà reçu plusieurs avis de personnes qui s'en inquiètent. Des dérives ont été constatées. "Elles suggèrent qu'on peut réaliser des rêves avec la solidarité de recrutement autour de soi, mais il s'agit bien d'investir de l'argent".

Ces organisations ciblent des personnes isolées et incomprises. Ces dernières sont rassemblées et mises en confiance pour obtenir leurs faveurs. "C'est vraiment un mécanisme progressif où, au départ, on se sent accepté, aimé et compris. Ensuite, on s'isole de l'extérieur, car les autres nous comprennent moins. On adhère de plus en plus à des croyances qui sont importantes pour nous. Finalement, on a une totale confiance en les organisateurs, donc on accepte tout ce qu'ils nous demandent", décortique la psychiatre Caroline Depuydt.

De très lourdes sanctions

Dans le cas des "Tisseuses de rêves", l'objectif semble avant tout financier. Pour entrer dans le cercle, il faut payer. C’est le principe de la vente pyramidale. Un système frauduleux où le recrutement de nouveaux membres génère des revenus pour les plus anciens. "Ça va entrer des commissions en cascade pour les membres les plus anciens et, naturellement, les membres qui sont les plus hauts dans la pyramide vont prendre les gains les plus importants, mais à un moment, la source va se tarir. Il ne sera plus possible de recruter de nouveaux membres, donc tous les derniers entrants vont perdre de l'argent parce qu'ils ont dû investir dans le système", décrit le porte-parole du SPF Économie, Étienne Mignolet.

En plus d'être un danger pour les familles, les cercles d'amis et les membres eux-mêmes, les participants à des sectes s'exposent à de lourdes sanctions. Tous les participants, pas seulement ceux à la base du système, risquent les peines les plus sévères du code du droit économique : une amende de 100 000 euros et une peine d'emprisonnement de 5 ans.

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