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Le chef par intérim de l'Ordre de Malte, Giacomo Dalla Torre del Tempio di Sanguinetto, a été élu mercredi "Grand Maître" à vie, même si son prédécesseur avait été contraint de démissionner en 2017 à la demande du pape après une grave crise interne.
Agé de 74 ans, ce noble italien était à la tête de l'Ordre depuis avril 2017, quand il avait été élu pour un an avec mission d'adopter une réforme appuyée par le pape, mais qui n'a pas vu le jour pour l'instant.
Crâne dégarni et moustache fournie, Fra' Giacomo, spécialiste de l'histoire de l'art médiéval et professeur de grec ancien, est finalement devenu le 80ème "Grand Maître" en neuf siècles d'existence de l'Ordre.
L'élection s'est tenue dans la Villa Magistrale sur la colline de l'Aventin à Rome, qui appartient à l'Etat du l'Ordre souverain de Malte depuis la fin du XIVeme siècle et jouit d'un statut de droit extraterritorial.
Un total de 57 électeurs avaient été sélectionnés pour participer à ce vote, dont deux femmes, présidentes d'associations nationales, pour la première fois de l'histoire de l'Ordre.
L'Ordre de Malte, fondé à Jérusalem et reconnu par le pape en 1113, est à la fois un insolite Etat sans territoire basé à Rome, un ordre religieux et une puissante organisation caritative.
Il compte aujourd'hui 13.500 chevaliers, dont 56 religieux, à poursuivre l'oeuvre hospitalière et humanitaire avec 100.000 employés ou bénévoles présents dans 120 pays.
Seul un "chevalier profès" -- un religieux faisant voeu de chasteté, pauvreté et obéissance-- peut devenir "Grand maître". Un critère supplémentaire réduit drastiquement le choix: il doit être d'extraction noble. En Italie, il faut par exemple apporter la preuve de 450 ans d'antécédents aristocratiques.
Parmi les 56 "chevaliers profès", seuls 12 présentent un arbre généalogique conforme. Un délégué du pape avait demandé aux chevaliers d'envisager une réforme constitutionnelle, pour éliminer en particulier cette désuète obligation de naissance noble, mais sans effet jusqu'à présent.
Les rancunes au sein de l'ordre ne semblent pas s'être réellement apaisées, les anciens adversaires ayant continué à se lancer des flèches par presse interposée à l'approche de l'élection.
L'Ordre a en outre récemment prié ses membres de ne pas publier de commentaires sur un livre très négatif sur le pape François ("The dictator pope", le pape dictateur), rédigé par un chevalier anglo-espagnol proche du dernier "Grand maître", le Britannique Matthew Festing, démissionnaire à la demande du pape.
La crise était partie du limogeage du numéro trois de l'ordre, un noble allemand, Albrecht von Boeselager, après une histoire de préservatifs distribués dans des dispensaires reculés.
Mais les conflits étaient multiformes: lutte entre religieux très minoritaires et laïcs, lutte entre les branches allemande et britannique, épineuse donation de 30 millions de francs suisses, mais aussi influence d'un cardinal américain conservateur opposant du pape.