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Les deux rugbymen français inculpés de viol en Argentine ont été remis en liberté lundi, un peu plus d'un mois après leur arrestation, mais ils devront demeurer en Argentine tant que l'instruction se poursuit, a annoncé le parquet de Mendoza (ouest).
Le parquet a estimé qu'à ce stade les "éléments suffisants n'ont pas été réunis" pour justifier le maintien en détention préventive de Hugo Auradou et Oscar Jegou.
Ils avaient été écroués après leur arrestation le 8 juillet, puis placés en résidence surveillée le 17 à Mendoza.
Le porte-parole du parquet, lisant un communiqué aux journalistes au pôle judiciaire de Mendoza, a indiqué que demeuraient en vigueur "la rétention de leurs passeports, l'interdiction de sortie du pays, et d'entrer en contact avec la plaignante".
Hugo Auradou et Oscar Jegou, 21 ans tous les deux, sont inculpés de viol aggravé car en réunion, dans la nuit du 6 au 7 juillet sur une Argentine de 39 ans, dans une chambre d'hôtel de Mendoza, à 1.000 km de Buenos Aires, où le XV de France venait de disputer un test-match contre l'Argentine.
- "Incohérences" et "zones grises" -
La victime présumée, qui avait rencontré les joueurs en boîte de nuit et avait suivi l'un à hôtel, dit avoir subi viols et violences dans leur chambre. Les inculpés reconnaissent une relation sexuelle, mais affirment qu'elle était consentie, et nient toute violence.
Le parquet dans son communiqué justifie la remise en liberté "non seulement par l'absence de (...) préeminence des preuves à charge" à ce stade de la procédure, mais aussi parce qu'ont été établies "de franches contradictions internes et périphériques par rapport au récit de la plaignante".
"Ne peut être ignorée, poursuit le parquet, l'existence de contradictions notoires, d'incohérences, de zones grises et même d'explications insuffisantes concernant les circonstances factuelles diverses", sur la base des dépositions de la plaignante et des élements recueillis.
L'avocat français de Jegou et Auradou, Me Antoine Vey, a salué auprès de l'AFP la remise en liberté, "décision attendue, qui constitue une étape capitale vers la reconnaissance judiciaire de l'innocence" des deux joueurs, qu'il a dit espérer voir se concrétiser "dans les prochaines semaines" afin qu'"ils puissent reprendre le cours de leur vie" en France.
Me Natacha Romano, avocate de la plaignante, a pour sa part déploré une décision de mise en liberté qui "génère des torts et une angoisse plus importants encore à la victime, à sa famille", avec la crainte que les mis en cause, désormais libres "n'agissent contre sa sécurité psychique et physique".
L'avocat argentin de Jegou et Auradou, Me Rafael Cuneo Libarona, avait déposé jeudi une demande de mise en liberté à l'issue de leurs auditions, les premières sur le fond. Pour lui, la liberté signifiait "le retour en France", pour qu'ils puissent "recommencer a travailler", c'est-à-dire jouer professionnellement au rugby.
Mais pour Me Romano toutefois, le schéma "logique et cohérent" était que les joueurs demeurent en Argentine.
- Messages audios en question -
Pour autant, Me Cuneo Libarona a estimé que l'instruction "pourrait être terminée en deux mois". L'autre avocat de la plaignante, Mauricio Cardello, a pour sa part mis en doute lundi une fin de procédure aussi rapide.
Entre autres actes, la plaignante devrait être soumise prochainement à une expertise pyschologique, qui selon son avocate n'avait pu être réalisée encore faute d'expert disponible.
Lors des auditions, des questions avaient notamment porté sur le point crucial du consentement. Les joueurs "n'ont jamais pu répondre (à la question de savoir) s'ils avaient demandé à la victime si elle était d'accord ou non", avait déploré Me Romano.
Des messages audios ont également figuré dans les auditions, échangés par la plaignante avec une amie dans les heures suivant les faits; "plusieurs (messages) Whatsapp dans lesquels elle parle bien" des joueurs, selon Me Cuneo Liberona. La plaignante a "pu expliquer très calmement" ces messages, avait assuré son avocate.
Le parquet en fait mention dans son communiqué, relevant "le ton drôle" du début de la conversation en question de la plaignante avec son amie. S'agissant des lésions constatées sur la plaignante, il note par ailleurs qu'elle "souffre d'une maladie qui expliquerait à un moment donné la présence d'hématomes".