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C'est une réponse intelligente et pleine d'émotion qu'a apporté Ines Ibbou, une jeune joueuse algérienne de 21 ans. Cette dernière a publié sur internet une vidéo émouvante, laquelle fait suite à la décision de Dominic Thiem (ATP 3) de ne pas participer au fond de solidarité pour les joueurs moins bien classes. "Toute l'année, j'en vois beaucoup qui ne donnent pas tout au tennis", avait dénoncé l'Autrichien pour justifier ce refus.
Une décision que ne comprend pas Ines Ibbou, qui a décidé de dévoiler ses conditions de travail dans une vidéo postée sur YouTube. Elle y adresse un message directement au joueur, finaliste du dernier Open d'Australie. "Cher Dominic, je me suis demandé ce qu'aurait été ma carrière, ma vie, si j'avais été à ta place (...) Savais-tu qu'en Algérie, les tournois juniors ITF sont très rares et qu'il n'y a pas le moindre tournoi pro ?", interroge d'abord la jeune femme.
Elle est ensuite revenue sur les fameuses conditions financières des jeunes joueuses. Ancienne gloire chez les juniors, Ines Ibbou se retrouve aujourd'hui forcée de composer avec une situation exécrable. "J'étais l'une des meilleures joueuses du monde à 14 ans. J'ai remporté mes premiers points WTA en gagnant un 10 000 dollars au même âge. Beaucoup de journalistes m'ont appelée le "miracle" du tennis algérien", explique Ibbou. "Mais on a du me fournir le minimum vital: de la nourriture et un endroit où dormir. Ma situation était désespérée. Mais je me suis remise sur les rails et j'ai réussi mon passage vers les pros. Malheureusement, je me suis blessée au pire moment, quand l'ITF a changé ses règles. Je ne suis pas sûre que cela t'ait vraiment affecté...", explique l'Algérienne.
Avant de confronter directement le joueur à ses propos. "Aujourd'hui, j'ai 21 ans et je suis autour de la 600e place mondiale. J'espère toujours réaliser le rêve pour lequel j'ai sacrifié mon enfance, ma scolarité, mon adolescence, ma vie de famille, mes amis, mon argent, les anniversaires, les vacances, toute ma vie ! Je suis une femme solitaire qui voyage généralement avec deux escales, à la recherche du billet le moins cher. Je sacrifie mon temps, mes entraînements et mon repos pour postuler à un simple visa, sans garantie de l'avoir. Je loge loin des tournois pour réduire les coûts. Alternes-tu entre terre battue et dur d'une semaine à l'autre comme moi ? Finis-tu les tournois avec des trous dans tes chaussures comme moi ?", s'interroge la jeune joueuse.
Elle conclue, enfin, sur une note plus personnelle. "Dominic, laisse-moi te demander : qu'est-ce que ça fait d'offrir un cadeau à tes parents ? Je ne me souviens même pas du dernier anniversaire que j'ai célébré avec mes proches... tous ces sacrifices font partie du jeu mais c'est le court qui devrait décider de ma carrière, pas mes ressources financières. Cher Dominic, contrairement à toi, beaucoup partagent ma réalité. Ce n'est pas grâce à ton argent qu'on a survécu jusqu'à présent et personne ne t'a rien demandé. À part un peu de respect pour nos sacrifices. Des joueurs comme toi me font m'accrocher à mon rêve. S'il te plaît, ne gâche pas ça."