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"La tombe de mon frère a été dégradée à la veille de la commémoration des 20 ans de son décès. Mes parents et moi n'en pouvons plus du vandalisme des cimetières de la région de Charleroi". Via le bouton orange Alertez-nous, Sabrina partage son désarroi.
Confrontées à l'indicible, Sabrina et sa mère témoigne. Mario a perdu la vie en octobre 2001. Depuis cette tragique disparition, la famille se rend au cimetière quotidiennement. Se recueillir et offrir une sépulture décente et fleurie, tel est le but de cette famille. "Il ne nous reste que ça", souffle la mère.
Pourtant, il y a quelques jours, c'est la consternation. Alors que le père de Sabrina effectue une visite ordinaire, il découvre une tombe sens dessus dessous. Des vases cassés, des fleurs renversées, des figurines en porcelaine en morceaux... Le père de famille peine à comprendre.
"Mon mari m'a téléphoné et m'a dit 'Vite, vite, on a tout cassé' ", se souvient Italia. "Tout était cassé. Ça a vraiment été l'horreur quand on a découvert l'état de la tombe", ajoute Sabrina.
Des malfrats ont visiblement arpenté les allées du cimetière dans le seul but de piller et casser. "Des questions surviennent. 'Pourquoi ? Comment ? Quel plaisir ont-ils à faire ce genre de choses?' C'est le seul endroit où l'on peut se recueillir pour rendre hommage. Et au final, on arrive et tout est détruit", déplore Sabrina. Avant d'ajouter: "On a vécu un deuxième deuil, un deuxième enterrement. On ne s'y attendait pas, il était aimé de tous. Il ne voulait que du bien aux gens".
Pour éviter de tels agissements, Sabrina et ses proches aimeraient que les autorités communales renforcent la sécurité. "On avait demandé pour remonter les murs ou mettre des caméras. Mais il n'y a jamais eu de suite à cela", regrette la jeune femme.
Anaïs et sa tante ont, elles aussi, été confrontées à cette barbarie. "Aujourd’hui, en allant me recueillir sur la pierre tombale de mon papa et de mes grands parents, j’aperçois des plaques commémoratives cassées, jetées à terre, et des objets volés. Mon cœur se brise une nouvelle fois devant cet acte odieux, minable", nous écrit la jeune femme via le bouton orange Alertez-nous.
Cette fois, les dégradations ont été commises au cimetière de Bray, dans la commune de Binche. Quelques jours après les faits, l'heure est toujours à la sidération. "Ma fille est venue au cimetière. Elle me téléphone en larmes et me dit 'On a tout saccagé'. Toutes les plaques étaient couchées, des anges en verre avaient été cassés. Je ne vois pas quel plaisir on peut avoir à saccager une tombe. Il n'y a plus de respect. Ça va trop loin. Il faut faire quelque chose", s'exclame Isabelle.
La famille nous assure que ces agissements sont malheureusement fréquents. "Mon papa est décédé d'un accident de moto. On lui avait mis le casque qu'il adorait sur sa tombe. Une semaine après, il n'était plus là", souffle-t-elle. Pour mettre fin à ce vandalisme, Anaïs et sa mère exigent le renforcement de la sécurité au cimetière de Bray. "On demande une seule caméra. Une seule. Ce n'est pas grand chose, il y en a des centaines dans Binche", lance Isabelle.
Selon elle, il ne s'agit pas d'un acte isolé. Via le bouton orange Alertez-nous, Alda nous raconte une situation semblable: "Je vais sur la tombe de mes grands-parents et je retrouve un vase en marbre cassé. Pourtant, le marbre, il faut y aller pour le casser! Les fleurs étaient dispersées dans tous les sens (...)". Comme Anaïs et sa famille, Alda demande l'instauration de nouvelles mesures. "J'aimerais qu'ils mettent un fossoyeur pour faire arrêter le vandalisme et surtout fermer le cimetière quand il n'est pas gardé".
Pour comprendre et nous éclairer sur la situation actuelle, nous contactons Mimie Klenner, échevine des Cimetières pour la ville de Binche. Cette dernière est bien consciente que des effractions commises au sein de ce cimetière de Bray. "De temps en temps, on vole. Ça a toujours existé. Il n'y a pas seulement que Binche et ses environs", souffle-t-elle. Mais selon elle, difficile d'empêcher cela. Sécuriser les cimetières? "C'est délicat!", estime-t-elle.
Implanter une caméra, réhausser les murs du site, mettre un agent de gardiennage...Nous présentons à Mme Klenner les différentes propositions avancées par la 5e Échevine. Mais selon elle, aucune de ces recommandations n'est prévue. "Les murs sont bas mais qu'est-ce qu'on peut faire?! On ne va pas demander à l'armée ni à la police. Et des caméras? Pour le moment, on n'en parle pas", réplique-t-elle. Avant d'ajouter: "C'est un sujet délicat. Pour une maison, on peut la sécuriser. Mais un cimetière... Comment faire? C'est étendu...".
À Bruxelles, la problématique s'est posée il y a quelques années. Après des faits de vandalisme dans les cimetières de Laeken et de Bruxelles, des mesures ont été prises pour tenter de limiter les agissements des malfrats. Durant les heures d'ouverture, les gardiens sont déployés dans les 4 cimetières afin de contrôler les allées et venues de visiteurs. "Ces dernières années, nous avons renforcé les enceintes des sites", nous explique Ahmed El Ktibi, échevin de l'Etat civil, de la Population et de la Solidarité internationale.
Les caméras, un moyen de dissuasion
Au total, 6 caméras ont été installées dans les cimetières bruxellois. "Nous allons continuer à équiper les cimetières de caméras, mais progressivement parce que ça coûte cher", ajoute l'Echevin. Selon lui, ce moyen d'action permet de dissuader les malfrats. "Quand on voit des caméras, on n'ose pas. Je pense que les gens qui s'adonnent à ce genre de délits font attention. De plus, quand on a l'information, on sait rattraper ceux qui commettent ces délits. Enfin, pour les gens qui viennent au cimetière, cela leur permet de sentir que leurs défunts sont vraiment en sécurité", éclaire Ahmed El Ktibi.
Que disent les chiffres?
Selon les statistiques de la police fédérale, le nombre de dégradations et de vols commis dans les cimetières belges sont en diminution depuis plusieurs années. Entre 2000 et 2020, on enregistre une diminution de près de 64% sur le territoire national. À noter que ces statistiques de criminalité se réfèrent à des plaintes déposées. Si l'on s'intéresse aux délits enregistrés sur la province du Hainaut (concernée dans les deux cas cités ci-dessous), on constate également une baisse au niveau des statistiques enregistrés, comme le montre le graphique ci-dessous.