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Après avoir décrété un embargo progressif sur le charbon russe dans son cinquième train de sanctions, l'UE s'apprête à frapper une nouvelle fois l'économie russe sur son volet énergétique, en ciblant cette fois le pétrole, là aussi de manière progressive, dans l'espoir d'assécher le financement de la "machine de guerre" de Vladimir Poutine.
Stop au pétrole russe d'ici 6 mois à un an
"Soyons clairs: ce ne sera pas facile", a prévenu Mme Von der Leyen, alors que les États membres doivent se prononcer sur des aménagements pour certains d'entre eux, comme la Hongrie ou la Slovaquie, fortement dépendantes du pétrole russe et fragilisées du fait de leur manque d'accès à la mer. "Nous renoncerons progressivement aux livraisons russes de pétrole brut dans les six mois et à celles de produits raffinés d'ici à la fin de l'année. Nous exercerons ainsi une pression maximale sur la Russie, tout en réduisant au minimum les dommages collatéraux pour nous et nos partenaires dans le monde", a exposé Mme Von der Leyen, devant les eurodéputés réunis à Strasbourg.
Gel des avoirs des militaires de haut rang et de 58 personnalités du chef de l'Eglise russe
L'UE inscrit aussi dans sa liste de sanctions individuelles des officiers militaires de haut rang et d'autres personnes qu'elle accuse d'avoir commis des crimes de guerre à Boutcha ou d'être responsables du siège "inhumain" de Marioupol. "Nous adressons ainsi un autre signal fort à tous ceux qui mènent la guerre du Kremlin: nous savons qui vous êtes, et vous devrez rendre compte de vos actes."
La Commission européenne propose également de sanctionner le chef de l'Église orthodoxe russe, le patriarche Kirill, ainsi que le patron du gendarme russe des télécoms Roskomnadzor, Andreï Lipov, selon un document consulté mercredi par l'AFP. L'exécutif européen s'est toutefois refusé de confirmer ou infirmer ce type d'information à ce stade. La nouvelle liste comprendrait 58 personnalités sanctionnées (interdiction d'entrée et gel des avoirs dans l'UE), dont de nombreux militaires russes, mais aussi la femme, la fille et un fils du porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Trois banques russes exclues du système SWIFT
A nouveau visées, les banques russes, avec l'exclusion du système d'échanges interbancaires SWIFT de la Sberbank, la première banque de Russie, qui contrôle près de 70% du secteur, ainsi que deux autres grandes banques, a poursuivi Mme Von der Leyen. Sept banques russes ont déjà été sanctionnées par l'UE jusqu'ici.
Les télévisions d'Etat russes qui servent la propagande bloquées en Europe
L'UE devrait également bloquer l'accès de ses ondes à trois grands radiodiffuseurs d'État russes. "Ces chaînes de télévision amplifient d'une manière agressive les mensonges de Poutine, nous ne devons plus leur laisser le champ libre pour répandre ces mensonges", a affirmé la cheffe de l'exécutif européen, sans toutefois nommer ces médias. Ils ne seront plus autorisés à distribuer leurs contenus dans l'Union européenne d'aucune manière, que ce soit par le câble, par satellite, via l'internet ou par des applications sur smartphone.
Stop aux consultants européens en Russie
Enfin, l'UE devrait interdire la fourniture au Kremlin et à des sociétés russes de services d'experts-comptables, de consultants et de conseillers en communication européens.
Des mesures aussi pour soutenir l'Ukraine ... dont un plan qui pourrait mener à l'adhésion à l'UE
L'Allemande a également interpellé les eurodéputés sur la reconstruction de l'Ukraine. Au-delà des mesures d'assistance macrofinancière et de l'appui direct au budget ukrainien, la Commission a récemment proposé de suspendre pendant un an tous les droits à l'importation sur les exportations ukrainiennes à destination de l'Union. "Je suis sûre que le Parlement européen apportera tout son soutien à cette proposition", a glissé Ursula von der Leyen.
Le PIB de l'Ukraine devrait chuter de 30% à 50% sur cette seule année et le Fonds monétaire international (FMI) estime qu'à partir de mai, l'Ukraine aura besoin de pas moins de 5 milliards d'euros chaque mois pour pouvoir continuer à fonctionner, payer les pensions et les salaires et financer les services de base, selon la Commission. "Nous devons l'aider, mais nous ne pouvons le faire seuls. Je salue l'appui budgétaire massif annoncé par les États-Unis. Et nous, en tant qu'Équipe Europe (la Commission et les États membres, NDLR) ferons également notre part".
Ursula von der Leyen a aussi évoqué les "centaines de milliards d'euros" qui seront nécessaires pour reconstruire les hôpitaux et les écoles, les logements, les routes, les ponts, les voies ferrées, les théâtres et les usines détruits dans l'invasion russe. Ursula Von der Leyen a donc proposé de commencer à travailler dès aujourd'hui à "un plan de relance ambitieux pour nos amis ukrainiens". Ce plan devrait permettre d'attirer dans le pays détruit des investissements massifs, tout en aidant à mener à bien "les réformes nécessaires".
Ce faisant, Mme Von der Leyen envoie une réponse nuancée à la demande ukrainienne d'une adhésion rapide à l'Union européenne, que plusieurs États membres freinent au vu des réformes à mener pour atteindre les standards européens. Ce plan pourrait en effet établir un système d'étapes et de cibles à même de garantir que les fonds européens seront réellement dépensés au profit de la population ukrainienne et dans le respect des règles de l'UE, selon l'Allemande.
Il pourrait aider à lutter contre la corruption, à aligner l'environnement juridique sur les normes européennes et à moderniser radicalement la capacité de production de l'Ukraine. "À terme, ce plan ouvrira la voie à l'avenir de l'Ukraine au sein de l'Union européenne", a conclu la présidente de la Commission.