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Après le choc et l'émotion mondiale provoqués par l'attentat jihadiste contre une église de Nice, la France a appelé ses ressortissants vivant à l'étranger à la prudence et a renforcé la surveillance de son territoire, des lieux de cultes aux établissements scolaires.
"Le message d'urgence attentat (plus haut niveau du plan de sécurité français) a été envoyé hier soir à l'ensemble de nos ressortissants à l'étranger, quels que soient les lieux, puisque la menace est partout", a déclaré vendredi le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian à l'issue d'un Conseil de défense, réuni vendredi autour du président Emmanuel Macron.
Jeudi, Nice a été endeuillée par l'assassinat de trois personnes dans une église, quatre ans après l'attentat islamiste du 14 juillet 2016 qui avait fait 86 morts dans cette ville de la Côte d'Azur (Sud-Est).
Un Tunisien de 21 ans, Brahim Issaoui, a poignardé à mort deux femmes, une sexagénaire et une Brésilienne de 44 ans vivant à Nice depuis plusieurs années, Simone Barreto Silva, mère seule de trois enfants, ainsi que le sacristain de la basilique, Vincent Loquès, 55 ans, père de deux filles.
L'agresseur, lui-même grièvement blessé par la police, a été hospitalisé.
Si ses motivations sont inconnues, son parcours est moins flou. De sources française et italienne, il est arrivé clandestinement en Europe par l'île italienne de Lampedusa le 20 septembre. Puis il a débarqué sur le continent, à Bari (Italie), le 9 octobre, où il aurait reçu un ordre de quitter le territoire sous sept jours.
Sa trace est alors perdue, jusqu'à mercredi, quand il appelle son frère Yassine, à Sfax, en Tunisie. "Il est arrivé en France (mercredi) aux alentours de 20h00. Il a dit qu'il allait en France car pour le travail c'est mieux", a raconté vendredi Yassine Issaoui à l'AFP, incapable de comprendre la dérive de ce frère qu'il avait vu se tourner vers la religion depuis environ deux ans, après avoir lancé un petit débit d'essence informel.
De source proche de l'enquête, on table aussi sur une arrivée du jeune homme à Nice "24 à 48 heures avant l'attaque".
L'assaillant a-t-il agi seul ? De source proche de l'enquête, l'homme de 47 ans arrêté jeudi soir, soupçonné d'avoir été en contact avec le jeune Tunisien, ne serait en fait pas lié à ce dossier. Mais la recherche d'éventuels complices pourrait avancer grâce aux deux téléphones portables retrouvés près de Brahim Issaoui, avec un coran.
- "La menace est partout" -
Si le recueillement était toujours de mise devant la cathédrale, plusieurs responsables politiques ont fait part de leur colère, à commencer par le maire de Nice, Christian Estrosi (droite). Il a notamment appelé à "modifier la Constitution" pour pouvoir "mener la guerre" contre une idéologie qu'il qualifie d'"islamo-fascisme". Le député du département, Eric Ciotti, également de droite, a appelé sur Cnews à la création d'"un Guantanamo à la Française".
"Nous ne sommes pas en guerre contre une religion mais contre une idéologie, l'idéologie islamiste", a de son côté déclaré le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Le Conseil de défense réuni vendredi a confirmé la mise à disposition des préfets dès lundi de 7.000 membres des forces de l'ordre, pour moitié des gendarmes réservistes, pour assurer la sécurité, selon M. Darmanin.
Le renforcement des mesures de sécurité autour des lieux de cultes chrétiens sera "fort" en ce week-end de fête catholique de la Toussaint, le 1er novembre. Les établissements scolaires seront aussi particulièrement protégés, avec la rentrée des classes lundi après les vacances de la Toussaint.
Deux semaines après l'assassinat de l'enseignant Samuel Paty, décapité pour avoir montré à ses élèves des caricatures du prophète Mahomet, dans le cadre d'un cours sur la liberté d'expression, la tension est grande entre la France et une partie du monde musulman.
"La menace est partout", a martelé Jean-Yves le Drian, à l'attention des Français de l'étranger.
Après l'attaque d'un vigile du consulat de France à Jeddah en Arabie saoudite, annoncée jeudi, des heurts ont éclaté vendredi à Beyrouth, à proximité de la résidence de l'ambassade de France.
"On passe vite de la haine virtuelle à la violence réelle, et nous avons décidé de prendre toutes les mesures pour assurer la sécurité de nos intérêts, de nos ressortissants", a insisté M. le Drian.
Après l'attentat de Nice, les messages de soutien à la France sont venus du monde entier, des Etats-Unis au Moyen-Orient, de l'Europe à l'ONU.
A Nice, ville qui compte une forte communauté originaire du Maghreb, les sentiments sont partagés. De la colère voire de la haine, chez ces quelque 200 identitaires qui ont manifesté dès jeudi soir, aux cris de "l'islam dehors". Mais aussi des appels à la tolérance, comme celui de Virginie, aide à domicile de 37 ans: "Ca rappelle 2016 et le 14 juillet, mais il faut rester intelligent".