Partager:
C'est la journée mondiale contre le cancer, une maladie un peu oubliée en raison de la pandémie de Covid-19 qui dure depuis plus d'un an. Mais il faut rappeler que le cancer tue plus que le coronavirus et que la lutte continue, grâce au Télévie notamment.
Michaël Herfs, chercheur FNRS, était sur le plateau du RTL Info Bienvenue. Il répondait aux questions de notre journaliste Alix Battard.
Le cancer tue plus que le coronavirus. Quels sont les chiffres exacts ?
Le coronavirus en 12 mois, c'est entre 2 millions et 2,5 millions de décès. Pour la même période de temps, on est à 9 millions de décès du cancer. Là, on parle d'un tueur silencieux parce que le cancer n'encombre pas nos hôpitaux, ne nous empêche pas de partir en vacances. Mais malgré tout, il tue encore plus encore.
30.000 décès en Belgique chaque année. Dans certains journaux, la semaine dernière, il a été dit que des chercheurs Télévie ont travaillé à 100% sur le Covid, c'est vrai ?
C'est absolument faux (...) La seule personne qui n'est pas dans mon laboratoire à l'heure où je vous parle, c'est moi parce que je suis en face de vous.
Tous les autres travaillent pour la recherche contre le cancer ?
Absolument. Maintenant, on doit bien dire que pendant le premier confinement, on a fait aussi des test contre le coronavirus, en extra.
Vous les avez un peu aidés, en tout cas au début ?
Service rendu à la communauté.
Par solidarité ?
Exactement. Mais c'était quand on n'avait pas d'expériences nous-mêmes à faire. C'était pas à la place de.
Et là, votre travail a pleinement repris ?
Bien entendu, ça fait 7 ou 8 mois. On est en plein temps. On est comme tout le monde masqués. Quand on peut faire du télétravail pour l'écriture de travail ou l'analyse de résultat, on le fait. Mais quand on est au laboratoire, on est au laboratoire. Je ne permettrais pas aux gens de ne pas travailler.
Est-ce qu'à cause du coronavirus la lutte contre le cancer a pris du retard ?
À l'heure d'aujourd'hui, non. Pourquoi ? Parce que l'on sait que le Télévie dont on bénéficie, ça fait 50 % de la recherche contre le cancer. En fait, quand on engage un chercheur Télévie, on l'engage pendant quatre ans. Ce qui veut dire qu'à l'heure d'aujourd'hui, on bénéficie encore du Télévie 2017, 2018, 2019. Et donc on a pas vu de diminution de recherche ni de personnel. Maintenant, je tiens à le dire, on est ici pour la journée mondiale contre le cancer, notre crainte, parce qu'on se rend bien compte que les activité n'ont pas lieu. Donc on espère ne pas en subir les conséquences.
Beaucoup de comités Télévie qui récoltent, qui font la cagnotte finale, sont à l'arrêt...
Exactement. On espère ne pas en subir les conséquences dans 2, 3, 4 ans. C'est là que je ne peux dire 's'il vous plait, les dons et les legs sont extrêmement importants. Il faut peut-être faire d'autres activités qui ne nécessitent pas le présentiel. Je vous assure qu'on a absolument besoin de vous pour le futur.
Le dépistage a aussi pris du retard en 2020. À cause de la situation sanitaire, beaucoup de cancer n'ont pas été dépistés. C'est un peu une bombe à retardement. Est-ce que ce n'est pas là le premier des défis dans la lutte contre le cancer en 2021 ?
Vous êtes proche de la réalité. Parce que c'est vrai que le cancer touche toutes les tranches de population, mais majoritairement entre 60 et 80 ans. Et donc ces personnes-là sont des personnes évidemment à risque du coronavirus. Elles sont restées chez elles et donc on ne les a pas dépistées. "Bombe" à retardement, c'est un petit peu fort. Un petit problème pour l'avenir, clairement. Parce que ceux qu'on a pas dépisté en 2020, on va les détecter en 2021, 2022. Or vous savez comme moi que plus tôt on détecte un cancer, mieux il se soigne (...)
Est-ce que la recherche contre le coronavirus va pouvoir bénéficier à la recherche contre le cancer ?
Prédire l'avenir est toujours difficile. Malgré tout, je suis quelqu'un de raisonnablement optimiste. Et je pense que oui. On ne sait bien souvent pas que les vaccins ARN, dont on parle énormément aujourd'hui, proviennent de la recherche contre le cancer. Ça fait 10 ans. On ne mettait non pas de l'ARN de coronavirus mais de l'ARN de cancer de manière à booster l'immunité. Et on utilise ça comme immunothérapie, sujet à la mode, dont je suis un chercheur. À l'heure d'aujourd'hui, l'expérience qu'on a acquis grâce au vaccin coronavirus est inestimable. En plus, on fait des tests maintenant par dizaine de milliers dans les laboratoires, ce qui veut dire qu'on a la technologie. On a acquis l'appareillage. Espérons que dans deux ans on ne parle plus du coronavirus et qu'on utilise l'appareillage pour la recherche contre le cancer.