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Un supermarché de la ville de Kostiantynivka, dans l'est de l'Ukraine, a été victime d'une frappe russe meurtrière. Le bilan est lourd : 12 morts et 44 blessés.
Ania Aliabieva s'assoupissait dans son magasin d'équipements militaires quand une explosion l'a tirée de sa torpeur et a semé la panique dans ce quartier d'habitation jusqu'alors globalement épargné de cette ville située tout près de la ligne de front.
"Tout le monde s'est mis à courir. La sortie habituelle du bâtiment était complètement bloquée, c'était impossible d'en sortir", dit-elle à l'AFP, les yeux figés, grands ouverts. "On a commencé à grimper par la fenêtre. On a eu le plus grand mal à sortir. On s'est retourné et tout brûlait", témoigne cette femme de 25 ans, les bras couverts de coupures légères du fait de l'explosion.
La frappe, un missile selon les secours, a fait 12 morts et 44 blessés d'après la police dans cette cité industrielle déjà balafrée par plusieurs mois de bombardements russes incessants. "Nos sauveteurs, avec la police et les services publics, sont en train de dégager les décombres pour déterminer exactement le nombre des morts et des blessés", a déclaré le chef de l'administration régionale, Vadym Filachkine, à la télévision.
Kostiantynivka, où vivaient jadis quelque 70.000 personnes, se trouve à environ 13 kilomètres des forces russes, actuellement à l'offensive dans cette zone. "La Russie sera tenue pour responsable de ce terrorisme", a juré le président Volodymyr Zelensky.
Sur place, lançant des jurons à la police, un homme en short et en tee-shirt forçait le cordon de sécurité en direction de sacs mortuaires alignés par les secouristes, apparemment à la recherche d'un proche disparu.
"Soudain une énorme explosion"
Non loin de là, une femme en pleurs, un mouchoir sur la bouche, supplie la police, en quête d'informations sur un enfant de sa famille lui aussi introuvable.
Vivant dans un immeuble de style soviétique avec une cour verdoyante juste à côté du supermarché frappé, Natalia regardait la télévision lorsque l'explosion a soufflé les fenêtres donnant sur son balcon. "'Bang !' est un mot bien faible pour décrire" la détonation, témoigne auprès de l'AFP cette femme de 51 ans en chemise rouge et aux cheveux teintés en noir.
Des journalistes de l'AFP ont vu des dizaines de personnes quitter les lieux en courant, la police mettant en garde contre une possible deuxième frappe. Des filets de fumée noire s'élevaient encore des décombres du grand centre commercial soudain transformé en un imbroglio de morceaux de métal tordu, tandis que des pompiers s'employaient à éteindre les flammes.
Un peu plus loin, le chemisier trempé de sang et saignant à la jambe, une femme pleure au pied d'un immeuble résidentiel aux vitres soufflées. "Je n'ai rien entendu venir, juste soudain une énorme explosion. Je n'ai rien d'autre à dire. Je suis sous le choc", raconte un autre témoin, une femme en robe de chambre et en tongs, sans vouloir décliner son identité.
Évacuation des enfants
Pendant que des sirènes d'alerte aérienne retentissaient, des habitants de la ville paniqués et en larmes déblayaient les débris et passaient des coups de téléphone désespérés à des membres de leur famille disparus. Au loin, le bruit de drones et de tirs d'artillerie.
La Russie considère depuis longtemps la région minière de Donetsk comme un enjeu majeur et y a relancé son offensive après avoir affirmé l'avoir annexée à l'automne 2022.
L'armée russe a récemment revendiqué la prise d'une série de villages dans les environs. Si de nombreuses personnes ont déjà quitté cette zone, les autorités ukrainiennes ont de leur côté ordonné l'évacuation des enfants et de leurs tuteurs, y compris dans les villages situés autour de Pokrovsk, un important nœud ferroviaire, en prévision de nouvelles avancées russes.
Natalia a elle-même quitté Pokrovsk pour Kostiantynivka il y a tout juste une semaine, pour fuir des combats, selon elle, encore plus effrayants là-bas. Les autorités lui avaient donné la possibilité de quitter complètement la région, mais elle estimait n'avoir pas d'autres choix. "La question est de savoir où aller et avec quel argent ?", interroge-t-elle, tandis que de nouveaux tirs d'artillerie résonnent au loin.