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Russie: le journaliste américain Gershkovich condamné à 16 ans de prison

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Alexander NEMENOV

Un tribunal russe a condamné vendredi le journaliste américain Evan Gershkovich à 16 ans de prison, marquant la fin d'un procès expéditif à huis clos pour "espionnage", une accusation jamais étayée par la Russie.

Sa condamnation est une condition préalable à un possible échange de prisonniers avec Washington, Moscou n'échangeant des détenus que s'ils sont condamnés. Les Etats-Unis travaillent "d'arrache-pied" pour qu'il soit libéré, a affirmé le président Joe Biden.

Auparavant, le juge du tribunal régional Sverdlosvki d'Ekaterinbourg, Andreï Mineïev, avait annoncé qu'Evan Gershkovich Evan avait été "reconnu coupable et condamné à 16 ans d'emprisonnement", selon une journaliste de l'AFP sur place.

Le reporter du Wall Street Journal, âgé de 32 ans, devra purger sa peine dans une colonie pénitentiaire à "régime sévère", ce qui signifie des conditions de détention très strictes, comparées au "régime normal".

Evan Gershkovich est le premier journaliste occidental à être condamné en Russie pour espionnage.

Dans le box des accusés, il est apparu devant la presse avant l'énoncé du verdict, les bras croisés, le crâne rasé -une coupe imposée aux prisonniers-, une barbe naissante sur son visage fatigué.

Dans un communiqué, le Wall Street Journal a fustigé une condamnation "scandaleuse", tandis que l'ONG Reporters Sans Frontières a dénoncé "un autre exemple flagrant de prise d'otage inacceptable".

Evan Gershkovich s'est dit innocent et a exercé son droit à une "dernière prise de parole" avant le verdict, avait annoncé plus tôt à la presse une porte-parole du tribunal, Ekaterina Maslennikova. Le parquet avait requis 18 ans de prison.

Il rejoindra bientôt une colonie pénitentiaire, si ni lui, ni le parquet, ne font appel sous deux semaines. Ce transfert peut mettre plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

- Discussions en vue d'un échange -

Reporter reconnu pour son professionnalisme, Evan Gershkovich avait été arrêté fin mars 2023, alors qu'il était en reportage à Ekaterinbourg (Oural).

L'accusation d'"espionnage" n'a jamais été étayée par la Russie. Le journaliste, sa famille, ses proches ainsi que la Maison Blanche dénoncent une affaire montée de toutes pièces.

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Alexander NEMENOV

Le Kremlin a une fois encore refusé vendredi de spécifier ses accusations: "Les accusations d'espionnage sont une chose très sensible, nous ne pouvons pas faire d'autres commentaires, le procès est en cours", a éludé le porte-parole du président russe Vladimir Poutine, Dmitri Peskov.

Le procès de M. Gershkovich, après 16 mois de détention, aura été expéditif depuis le 26 juin. Toute la procédure a été placée sous le sceau du secret et rien n'a filtré du huis clos imposé par les autorités.

Pour Washington, son arrestation a visé avant tout à monnayer un possible échange de prisonniers, en pleines tensions entre la Russie et les Etats-Unis liée au conflit armé en Ukraine.

Moscou a admis négocier sa libération et Vladimir Poutine a évoqué lui-même le cas de Vadim Krassikov, en prison en Allemagne, pour un assassinat commandité attribué aux services spéciaux russes.

L'emprisonnement du journaliste américain en mars 2023 a suscité une importante vague de solidarité parmi les médias internationaux et l'indignation des chancelleries occidentales.

Le Premier ministre britannique Keir Starmer a jugé vendredi "méprisable" la condamnation du reporter, tandis que la cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, a estimé qu'elle "fais(ait) partie de la propagande de guerre de (Vladimir) Poutine".

La présidente du Parlement européen Roberta Metsola a dénoncé un "simulacre de procès", à "l'antithèse de la justice".

Le bureau des droits de l'homme de l'ONU a lui estimé que la condamnation du journaliste soulevait "de grandes inquiétudes" sur la liberté d'expression.

En exil, l'opposante russe Ioulia Navalnaïa a fustigé sur X un verdict "injuste".

Donald Trump s'en est pris de son côté à Joe Biden, affirmant que contrairement au président démocrate, il réussirait à faire sortir Evan Gershkovich de prison "immédiatement" après sa victoire à la présidentielle de novembre, en échange de rien. Le candidat républicain n'a cependant pas précisé comment il comptait y parvenir.

- Whelan, Kurmasheva, Karelina... -

Enfant d'immigrés ayant fui l'URSS pour les Etats-Unis, Evan Gershkovich s'était installé en Russie en 2017.

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Alexander NEMENOV

Les enquêteurs russes accusent le journaliste, qui avait travaillé pour l'AFP à Moscou en 2020-2021, d'avoir collecté des informations sensibles pour la CIA sur l'un des principaux fabricants russes d'armements, l'entreprise Ouralvagonzavod.

Cette usine produit notamment des chars T-90 utilisés en Ukraine et ceux de nouvelle génération Armata, alors que son activité civile est la production de wagons de marchandises.

La Russie détient plusieurs autres Américains, dont la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva, arrêtée en 2023 pour une infraction à la loi sur les "agents de l'étranger", et l'ex-Marine Paul Whelan, qui purge une peine de 16 ans de prison pour espionnage, une accusation qu'il conteste.

Une ressortissante russo-américaine, Ksenia Karelina, est jugée depuis le 20 juin, à Ekaterinbourg aussi, pour haute trahison, accusée d'avoir donné de l'argent à un groupe de soutien à l'Ukraine.

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