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La fédération internationale de cricket a fait le pari de construire un stade temporaire à New York pour accueillir la petite Coupe du monde, un événement inattendu qui donne l'espoir d'un tournant aux organisateurs et joueurs locaux.
"On va avoir des gens du monde entier, des rois, des princes, des hauts dignitaires", s'enthousiasme Michael D'Ambrosio, directeur adjoint des espaces verts du comté de Nassau. "Beaucoup sont jaloux et envieux".
A une dizaine de kilomètres de New York s'élève une forêt de tubes métalliques, surmontés de 34.000 sièges, un stade temporaire qui va accueillir, début juin, 8 matches de la Coupe du monde de cricket, en format T20, un mode de jeu resserré.
La structure est intégralement financée par la fédération internationale, l'ICC, qui s'est rabattue sur cet immense parc de Long Island après l'échec d'un projet dans le nord-ouest du Bronx.
Au pays du baseball, les responsables du comté de Nassau n'ont pas hésité bien longtemps à donner leur feu vert à cette aventure inédite.
"C'est le deuxième événement sportif le plus important au monde" en termes d'audience, rappelle Michael D'Ambrosio.
L'ICC a, elle, investi dans l'avenir du sport aux Etats-Unis et en particulier dans la région de New York, qui compte plusieurs centaines de milliers de personnes originaires du Commonwealth (notamment Inde, Bangladesh et Pakistan).
Le match tête d'affiche de la compétition, qui opposera Inde et Pakistan dans ce stade éphémère, affiche déjà complet et aucun billet ne se négocie à moins de mille dollars.
- "La Mecque du cricket" -
Mais une fois la structure démontée, en juillet, le cricket local retrouvera sa condition initiale, celle d'un sport qui, bien que comptant environ 10.000 joueurs réguliers, ne dispose d'aucune enceinte dédiée dans la région de New York.
"Le cricket se développe, mais les infrastructures sont un combat", constate Ajith Shetty, président de deux ligues, dont la Commonwealth Cricket League (CCL), la plus renommée de la métropole.
Paradoxe, New York aligne bien une équipe en Major League Cricket, la ligue professionnelle lancée l'an dernier, et joue dans un stade dédié... mais au Texas et en Caroline du Nord, comme toutes les franchises de MLC pour contrôler les coûts.
"Nous étudions des opportunités qui créeraient un lieu permanent proche de nos fans", explique à l'AFP un porte-parole de MI New York, champion en titre de MLC.
En attendant, il faut se débrouiller, et la CCL promène un matelas de plus de 200 kg de parc en parc qui fait office de "pitch", le rectangle situé au centre du terrain.
"Aucun autre sport ne doit se démener autant que le cricket à New York", affirme Ajith Shetty. "Ils nous font souffrir, comme s'ils voulaient nous dissuader".
"New York était la Mecque du cricket", aux Etats-Unis, dit l'entrepreneur d'origine indienne, "mais ces cinq ou six dernières années, cela s'est détérioré, parce que d'autres Etats ont émergé, (...) en particulier le Texas".
Soutenues par des entrepreneurs locaux, certaines équipes de CCL payent des joueurs jusqu'à plusieurs milliers de dollars par an, mais pas de quoi se consacrer à leur sport à temps plein.
Waqas Ashik, qui évolue avec le Long Island United CC, voit le verre à moitié plein.
"Quand on a démarré, en 2008, on n'avait qu'une équipe et on avait parfois du mal à avoir assez de joueurs", se souvient-il avant de passer à la batte. "Aujourd'hui, on en a trois, avec des remplaçants. On a explosé".
Selon Ajith Shetty, l'ICC souhaite investir dans la pratique des jeunes aux Etats-Unis, notamment en perspective de la participation du cricket aux Jeux olympiques de 2028 à Los Angeles.
"Je suis en contact avec des écoles", dit-il. "Certaines sont partantes."
Outre la quête d'un stade, "le défi, maintenant, c'est d'intégrer des jeunes", abonde Waqas, car "les enfants d'immigrés ne se mettent pas forcément au cricket comme nous", arrivés d'ailleurs, du Pakistan, dans son cas. "Il n'y a que comme ça qu'on pourra continuer à grandir".