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Ses crimes ont suscité un profond traumatisme en Belgique et bien au-delà. Ecroué depuis plus d'un quart de siècle, Marc Dutroux a été reconnu coupable de la séquestration et du viol de six fillettes et adolescentes.
L'affaire "a mis sur la scène publique, dans la tête de tout citoyen, la réalité de la pédophilie", selon les termes du psychiatre français Roland Coutanceau.
A la fin de l'été 1996, la Belgique avait été sidérée par la cruauté des crimes de Marc Dutroux, au fur et à mesure de leur découverte après son arrestation le 13 août.
Ce jour-là, lui, son épouse Michelle Martin et un complice Michel Lelièvre sont interpellés dans la région de Charleroi (sud) dans le cadre de l'enquête sur la disparition d'une adolescente de 14 ans quelques jours plus tôt à une centaine de kilomètres de là.
A l'époque, cet ancien électricien au chômage est déjà connu pour des faits de viols et d'enlèvements. Sa camionnette blanche a été repérée, et une série de perquisitions a été ordonnée dans ses différentes propriétés.
Le 15 août, Marc Dutroux mène les enquêteurs à une cache aménagée dans la cave de sa maison de Marcinelle (sud), d'où sont libérées l'adolescente de 14 ans recherchée et une autre, âgée de 12 ans.
Des recoupements sont établis avec des dossiers similaires, en l'occurrence quatre disparitions remontant à l'été 1995 sur lesquelles les enquêteurs piétinent.
- "Pervers narcissique" -
Sous la pression des médias et de l'opinion, les investigations s'accélèrent, jusqu'à ce que les pires craintes des parents des quatre disparues se révèlent exactes.
En moins de trois semaines, dans deux autres propriétés de celui que la presse surnomme "le monstre de Charleroi", sont exhumés les corps de Julie et Mélissa --deux fillettes de 8 ans enlevées près de Liège (est)--, puis les restes de deux adolescentes flamandes, An et Eefje, 17 et 19 ans, disparues un an auparavant à Ostende (nord).
En juin 2004, à l'issue d'un procès retentissant, Marc Dutroux est condamné à la réclusion à perpétuité pour avoir enlevé, séquestré et violé ces six fillettes et adolescentes, et pour avoir tué quatre d'entre elles. Les expertises démontrent que deux des quatre, Julie et Mélissa, sont mortes de faim.
A l'audience, ce marginal vivant de petits trafics a été décrit par les psychiatres comme un "vrai psychopathe", "pervers narcissique" et "manipulateur".
Un diagnostic répété presque mot pour mot en 2020, en conclusion d'une nouvelle expertise psychiatrique menée à la demande de l'avocat Bruno Dayez.
Ce pénaliste, qui avait repris en 2017 la défense de Dutroux, militait pour sa libération conditionnelle en 2021 au bout de 25 ans de détention à l'isolement. Une perspective qu'il doit définitivement abandonner un an avant cette échéance.
- 300.000 personnes dans les rues de Bruxelles -
Né de parents instituteurs en novembre 1956, dans la commune bruxelloise d'Ixelles, Marc Dutroux connaît une enfance et une scolarité chaotiques.
Ses parents se séparent quand il est encore adolescent, et sa mère avec qui il vit lui demande de ramener de l'argent à la maison sans qu'il ait pu achever ses études techniques, d'après ses dires.
En 1986, il est arrêté pour une série de viols qui lui valent trois ans plus tard une condamnation à 13 ans et demi de prison. Il est libéré en 1992.
Ce profil de récidiviste nourrit la controverse quand éclate le scandale en 1996. Les autorités sont accusées d'un défaut de surveillance, sur fond de rivalités entre policiers et gendarmes et de mauvaise circulation des informations.
Signe de l'émotion suscitée dans toute la population, plus de 300.000 personnes défilent dans les rues de Bruxelles le 20 octobre 1996 en soutien aux familles des victimes. L'affaire Dutroux a fait naître le principe de la "Marche blanche".
Un quart de siècle plus tard, quand s'est posée la question de détruire la maison de Marcinelle pour effacer un de pires stigmates de l'affaire, la municipalité de Charleroi a décidé d'ériger à la place un "jardin-mémorial" dédié aux victimes de la pédophilie.