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Ancien policier issu d'une famille modeste, deuxième maire afro-américain de l'histoire de New York, Eric Adams promettait du renouveau et du "style": moins de trois ans après son élection, son mandat ne tient plus qu'à un fil après son inculpation pour corruption.
Le démocrate de 64 ans a été inculpé par le parquet fédéral de Manhattan dans une vaste affaire de financement illégal de campagne et de corruption liée à la Turquie. Il a été accusé jeudi d'avoir été "arrosé" de pots-de-vin pendant des années et d'avoir "gravement rompu le lien de confiance avec le public", selon le procureur Damian Williams.
Un parfum d'affaires sulfureuses soufflait depuis plusieurs mois autour de l'Hôtel de ville de New York, où plusieurs proches du maire ont démissionné, dont le chef de la police.
Un comble pour Eric Adams, lui-même ancien capitaine du New York Police Department (NYPD), élu en 2021 sur la promesse de restaurer la sécurité, après une hausse des crimes violents pendant la pandémie de Covid, et de remettre la plus grande ville des Etats-Unis sur de bons rails économiques.
A New York, bastion progressiste, son succès à la primaire puis son élection en novembre 2021 avaient marqué une victoire de l'aile plus centriste du Parti démocrate.
Et une nouvelle page d'un destin exceptionnel. Né à Brooklyn, Eric Adams a flirté avec la délinquance dans sa jeunesse et connu les violences policières, avant de faire carrière au NYPD, où il s'est battu contre le racisme.
Lors de son élection, il brandit de manière poignante un portrait de sa mère, décédée depuis peu, qui l'a élevé tout en travaillant comme femme de ménage et cuisinière.
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Mais le nouveau maire se révèle aussi un homme de coups médiatiques qui surfe sur l'air du temps, à l'image de sa promesse de recevoir ses indemnités sous forme de cryptomonnaies ou la mise en fonction, finalement abandonnée, d'un robot policier dans la station de métro de Times Square.
Petite puce brillante à l'oreille, lunettes aviateur, l'élu qui met en avant son régime vegan s'autoproclame maire "stylé" ("swagger"), aussi à l'aise devant ses anciens collègues policiers et les milieux d'affaires que sur les marches du Met Gala ou sous les néons des discothèques.
Mais plusieurs nominations de proches, dont son frère comme conseiller à sa sécurité, font tiquer. Et il s'attire les critiques de son aile gauche en remettant sur pied des unités de patrouilles de police controversées, démantelées parce qu'elles contrôlaient davantage les minorités afro-américaine et hispanique.
A grand renfort de communication, il déclare aussi la guerre aux rats qui envahissent les rues de New York, en nommant un dératiseur en chef puis en organisant un "sommet" sur le sujet, alors qu'il a lui-même été verbalisé plusieurs fois pour des infestations de rongeurs dans sa résidence à Brooklyn.
"C'est un maire qui fait campagne et qui fait de la publicité. C'est vraiment dur de mettre à son crédit un accomplissement politique majeur", juge Brian Arbour, professeur de sciences politiques au John Jay College de New York.
"Il fait tellement de gaffes que ça n'a plus d'importance", ajoute-t-il.
Confronté à un afflux considérable de migrants -- plus de 200.000 en deux ans -- le maire a d'abord assuré qu'ils étaient les bienvenus à New York, avant d'affirmer que la crise migratoire aller "détruire" la ville.
Eric Adams se targue d'avoir fait baisser le nombre de crimes violents dans la mégapole, une tendance à l'oeuvre au niveau national. Mais sous son mandat, les New-Yorkais ont aussi dû faire face à la hausse du coût de la vie et à une crise du logement qui a fait grimper les loyers à des niveaux sans précédent, dans une ville déjà réputée chère.