Partager:
La quatrième phase des élections générales en Inde, qui se poursuivent jusqu'au 1er juin, se déroule lundi notamment au Cachemire sous administration indienne où les électeurs devraient rejeter la gestion autoritaire du Premier ministre Narendra Modi dans ce territoire à majorité musulmane.
Près d'un milliard d'Indiens ont été appelés à prendre part au scrutin pour choisir un nouveau gouvernement, constituant le plus grand exercice démocratique au monde.
M. Modi reste très populaire dans une grande partie de l'Inde et son parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) devrait largement remporter le scrutin dont les résultats sont attendus le 4 juin.
Mais sa décision subite en 2019 de révoquer le statut de semi-autonomie du Cachemire pour le placer sous l'autorité directe de New Delhi, imposant des mesures de sécurité drastiques, a suscité un profond ressentiment parmi nombre de Cachemiris qui voteront pour la première fois depuis.
"Ce que nous disons maintenant aux électeurs, c'est qu'ils doivent faire entendre leur voix", a déclaré à l'AFP Omar Abdullah, ex-ministre en chef du territoire dont le parti de la Conférence nationale fait campagne pour la restauration du statut de semi-autonomie.
- "Pas acceptable" -
"Le point de vue que nous voulons que la population exprime, c'est que ce qui s'est passé (...) n'est pas acceptable pour eux", a-t-il ajouté.
Des groupes séparatistes mènent une insurrection dans le Cachemire sous contrôle indien depuis 1989, exigeant soit l'indépendance, soit une fusion avec le Pakistan.
Mais depuis la révocation de 2019 par le gouvernement de M. Modi, cette insurrection a été en grande partie écrasée, même si des jeunes gens continuent de la rejoindre.
La violence ayant ainsi diminué, le BJP se targue constamment du soutien des Cachemiris pour les réformes de son administration.
Pendant la campagne électorale, M. Modi et ses ministres se sont félicités de la fin du statut spécial du Cachemire, affirmant avoir ainsi permis "la paix et le développement". Décision que le reste de l'Inde semble approuver.
Cependant, des affrontements entre les forces de sécurité et les groupes rebelles s'y sont multipliés depuis le 19 avril, date du début des élections générales qui se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.
Et, pour la première fois depuis 1996, le BJP n'y présente aucun candidat pour les trois sièges de la vallée du Cachemire, tout en appelant les électeurs à soutenir de petits partis nouvellement créés, épousant sa ligne politique dans la région.
- "Pour le changement" de gouvernement -
Les électeurs devraient voter en faveur d’un des deux partis du Cachemire qui exigent l’annulation des réformes du gouvernement de M. Modi dans le territoire.
"J'ai voté pour le changement du gouvernement actuel. Il le faut pour que nos enfants aient un bel avenir", a déclaré à l'AFP Habibullah Parray, un fonctionnaire. "Partout au Cachemire aujourd'hui, les responsables viennent d'ailleurs. Et tout le monde veut que cela change".
A l'extérieur de Srinagar, la plus grande ville de la région, des soldats de l'armée ont patrouillé à bord de convois de véhicules pare-balles.
Certains bureaux de vote de la circonscription étaient placés sous la surveillance dune vingtaine de paramilitaires.
Lundi en milieu d'après-midi, près de 30% des inscrits de la circonscription avaient voté, et les isoloirs étaient encore accessibles pour plusieurs heures.
Ce scrutin est, pour eux, une sorte de "référendum pour exprimer leur désaccord", a estimé auprès de l'AFP Sidiq Wahid, analyste politique et historien.
"Le BJP ne présente aucun candidat pour une raison très simple: il perdrait, c'est tout", a-t-il poursuivi.
La population du territoire a l'occasion d'exprimer par le vote ses frustrations relatives notamment à la forte présence militaire indienne, avec plus d'un demi-million de soldats.
Le Cachemire est divisé entre l'Inde et le Pakistan qui, depuis leur indépendance en 1947, revendiquent la souveraineté sur la totalité de ce territoire himalayen. Il a été la cause de deux des trois guerres qui les ont opposés depuis.
New Delhi accuse Islamabad de soutenir les séparatistes, ce que le Pakistan réfute.
La partie administrée par l'Inde a connu plus de trois décennies de troubles, qui ont fait des dizaines de milliers de morts parmi les civils, les soldats et les insurgés séparatistes.
La participation aux élections générales est jusqu'ici inférieure à celle de 2019, des analystes imputant ce recul à "un certain désintérêt" des électeurs, d'autres à la vague de chaleur que connait le pays.
Le bureau météorologique indien en a prévu d'autres au cours de mai, une perspective qui a incité la commission électorale à former le mois dernier un groupe de travail chargé d'examiner l'impact de la chaleur et de l'humidité avant chaque prochaine phase du scrutin.