Accueil Actu Monde International

La surpopulation carcérale bat un nouveau record en France au 1er mai

La surpopulation carcérale a atteint un nouveau record en France au 1er mai, avec 77.647 détenus, une situation poussant 3.405 d'entre eux à dormir sur un matelas au sol, selon des chiffres publiés vendredi par le ministère de la Justice.

C'est le huitième mois consécutif de hausse de la population carcérale, en progression de 6,1% en un an.

Cette situation contraint ainsi 3.405 détenus à dormir sur un matelas posé au sol, contre 2.241 il y a un an, un chiffre en hausse de plus de 50%.

Au 1er mai, les prisons françaises comptaient 61.966 places opérationnelles.

La densité carcérale globale s'établit ainsi à 125,3%, mais dans les maisons d'arrêt - où sont incarcérés les détenus en attente de jugement et donc présumés innocents, et ceux condamnés à de courtes peines - elle atteint 150,3%.

Elle atteint ou dépasse même les 200% dans 14 établissements ou quartiers.

Parmi les personnes incarcérées, 19.978 sont des prévenus, incarcérés dans l'attente de leur jugement.

Au total, 95.205 personnes étaient placées sous écrou au 1er mai. Parmi elles, on compte 17.558 personnes non détenues faisant l'objet d'un placement sous bracelet électronique ou d'un placement à l'extérieur.

- Taux sous-estimés? -

Dans un communiqué publié jeudi, l'Observatoire international des prisons (OIP) a appelé le gouvernement "à publier les vrais chiffres de la surpopulation carcérale", lui reprochant de publier des données "sans distinction, en termes de nombre de places, entre celles dédiées aux hommes, aux femmes, aux mineurs et, dans certains cas, à la semi-liberté".

"En persistant à occulter les taux spécifiques des quartiers dédiés aux hommes détenus, le ministère de la Justice publie consciemment des taux d'occupation largement sous-estimés", estime l'OIP, qui donne l'exemple de Perpignan où "le taux d’occupation bondit de 201 à 259% dès lors que sont exclues les données relatives aux femmes, aux enfants et à la semi-liberté".

La surpopulation carcérale devient un sujet de plus en plus brûlant pour l'exécutif: ce problème a été mis en avant lors du mouvement de blocage des prisons lancé après l'attaque mortelle d'un fourgon pénitentiaire dans l'Eure mi-mai.

Dans un accord signé par la Chancellerie et les syndicats de surveillants pénitentiaires, qui a permis de mettre fin au mouvement de blocage, il est prévu de mener "une large concertation pluridisciplinaire" sur le sujet.

La forme et le calendrier de cette concertation doivent figurer à l'ordre du jour d'une rencontre entre l'intersyndicale et le ministère de la Justice le 10 juin.

Des mesures ont déjà été prises pour tenter de remédier à ce problème, telles que l'interdiction des peines de prison de moins d'un mois, l'aménagement des peines ou encore le développement du travail d'intérêt général. Mais celles-ci s'avèrent insuffisantes.

L'exécutif table aussi sur la construction de 18.000 places de prison d’ici 2027 pour porter la capacité à 78.000 opérationnelles. Outre le fait que cet objectif a pris un sérieux retard et semble déjà obsolète au vu de la situation, de nombreux acteurs et observateurs estiment que cela ne résorbera pas le problème.

- "Surenchère sécuritaire" -

Mi-mars, le Conseil de l'Europe avait exprimé sa "profonde préoccupation" et invité les autorités françaises à "examiner sérieusement et rapidement l'idée d'introduire un mécanisme national contraignant de régulation carcérale", une idée défendue depuis longtemps par de nombreuses institutions, associations et syndicats.

La semaine dernière, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) a publié un avis dans lequel elle juge infondé le refus de l'exécutif d'introduire dans la loi ce mécanisme, qui interdirait à tout établissement pénitentiaire de dépasser un taux d'occupation de 100%.

Pour la CNCDH, les arguments du gouvernement, selon lequel "un tel mécanisme aggraverait le risque de récidive, porterait atteinte à l'indépendance des juges ou encore entrainerait une rupture du principe d’égalité entre les personnes détenues", ne sont "ni fondés juridiquement ni justifiés par la réalité de terrain", et "relèvent avant tout d’un choix politique, celui de s'inscrire dans le contexte actuel d’une surenchère sécuritaire".

À lire aussi

Sélectionné pour vous