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Des centaines de milliers de Palestiniens continuent de fuir Rafah, ville du sud de la bande de Gaza menacée d'une offensive israélienne d'envergure mais où, selon le Premier ministre israélien, "la catastrophe humanitaire" a été évitée.
Le chef du Hamas Ismaïl Haniyeh a affirmé mercredi que le mouvement islamiste, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007 que Benjamin Netanyahu a promis d'anéantir, était "là pour durer" et qu'il déciderait avec d'autres factions palestiniennes de la gouvernance à Gaza après la guerre avec Israël.
Ismaïl Haniyeh a ajouté que l'issue des pourparlers sur un cessez-le-feu était incertaine car Israël "insiste pour occuper le point de passage de Rafah et amplifier son agression" dans le territoire palestinien.
Il s'exprimait, dans un discours télévisé, après plus de sept mois de guerre, le jour où les Palestiniens commémoraient la "Nakba" ou la "Catastrophe", en référence à leur exode forcé lors de la création d'Israël en 1948.
La population menacée de famine et plusieurs fois déplacée depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien, est de nouveau sur les routes à la recherche d'un nouveau refuge, même si "il n'y a pas d'endroit sûr à Gaza", selon l'ONU.
Benjamin Netanyahu est déterminé à lancer une offensive terrestre d'envergure à Rafah, à la lisière sud du petit territoire palestinien, où sont retranchés selon lui les derniers bataillons du Hamas.
Inquiets pour la population civile, les Etats-Unis, comme une grande partie de la communauté internationale, sont opposés à une telle offensive dans cette ville située à la frontière égyptienne, où s'entassent des centaines de milliers de déplacés.
- "Désaccord" avec Washington -
M. Netanyahu estime, lui, que "la catastrophe humanitaire" à Rafah a été évitée par Israël, affirmant que "près d'un demi-million de personnes avaient évacué la zone des combats" dans cette ville où l'armée israélienne mène des opérations militaires depuis le 7 mai.
"Soixante-seize ans après la Nakba, les Palestiniens continuent d'être déplacés de force. Dans la bande de Gaza, 600.000 personnes ont fui Rafah depuis l'intensification des opérations militaires", a déploré de son côté l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa).
Le président américain Joe Biden avait menacé la semaine dernière de limiter l'aide militaire américaine à son allié sur fond d'inquiétude d'une vaste offensive à Rafah. Mais l'exécutif américain a notifié mardi le Congrès qu'il allait procéder à une livraison d'armes à Israël pour environ un milliard de dollars, a appris l'AFP de sources proches du dossier.
Lors d'une interview à la chaîne américaine CNBC, le Premier ministre israélien a reconnu un "désaccord" avec Washington sur Rafah. "Mais nous devons faire ce que nous avons à faire", a-t-il déclaré.
L'Union européenne a de son côté exhorté Israël à "cesser immédiatement" son opération à Rafah, sous peine de "mettre à rude épreuve" sa relation avec l'UE.
La guerre à Gaza plonge les Palestiniens dans une nouvelle "Nakba", se désole un Gazaoui ayant fui les combats.
"La Nakba que nous vivons (...) est la pire de toutes. Bien plus dure que celle de 1948", déplore Mohammed al-Farra, 42 ans, chassé avec sa famille par les combats et les bombardements israéliens de leur maison de Khan Younès (sud).
Durant la "Nakba", environ 760.000 Arabes de Palestine ont été poussés à l'exil et se sont réfugiés dans les pays voisins ou ce qui allait devenir la Cisjordanie et la bande de Gaza, selon l'ONU.
- Combats "intenses" -
Des journalistes de l'AFP et des témoins ont fait état mercredi de frappes aériennes, de bombardements à l'artillerie et de combats dans la nuit et en matinée à Rafah, Jabalia (nord) et dans le quartier de Zeitoun, dans la ville septentrionale de Gaza.
Le Hamas a fait état d'affrontements avec les forces israéliennes à Jabalia. L'armée israélienne a aussi fait état de combats "intenses" dans cette ville, disant y avoir tué "un grand nombre de terroristes".
Des combats ont lieu aussi dans des "secteurs spécifiques" de l'est de Rafah, où l'armée a indiqué avoir mené une opération contre un centre d'entraînement du Hamas, considéré comme une organisation terroriste par Israël, les Etats-Unis et l'UE.
L'attaque du Hamas menée dans le sud d'Israël le 7 octobre a entraîné la mort de plus de 1.170 personnes, majoritairement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Plus de 250 personnes ont été enlevées durant l'attaque et 128 restent captives à Gaza, dont 36 seraient mortes, selon l'armée.
En riposte, Israël a lancé une vaste offensive qui a ravagé la bande de Gaza. Au huitième mois de la guerre, 35.233 personnes sont mortes dans la bande de Gaza, essentiellement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
A Gaza, l'avenir d'après-guerre reste incertain. Si M. Netanyahu ne veut pas en parler "tant que le Hamas n'est pas détruit", son ministre de la Défense Yoav Gallant, s'est dit opposé à ce qu'Israël exerce un "contrôle" militaire ou civil sur la bande de Gaza une fois la guerre terminée et a appelé à une alternative palestinienne au Hamas.
- Aide bloquée -
Entrée dans le secteur de Rafah avec des chars le 7 mai, l'armée israélienne est toujours déployée du côté palestinien du point de passage avec l'Egypte, crucial pour faire entrer le carburant, indispensable au fonctionnement des infrastructures et à la logistique humanitaire.
Plus rien n'entre depuis par Rafah, l'Egypte et Israël se renvoyant la responsabilité. L'aide humanitaire est également bloquée au principal point de passage avec Israël, Kerem Shalom.
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé "à la réouverture immédiate" du point de passage de Rafah.
Le Royaume-Uni a annoncé mercredi le départ de Chypre d'une première cargaison de près de 100 tonnes d'aide humanitaire par la mer pour Gaza où elle devrait être déchargée sur un port artificiel construit par l'armée américaine et bientôt opérationnel.
D'autres "centaines de tonnes" d'aide humanitaire sont prêtes à être acheminées vers Gaza, une fois le port ouvert, selon Brad Cooper, du Commandement militaire américain pour le Moyen-Orient (Centcom).