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Après une série de décisions lourdes de conséquences, la Cour suprême américaine entame lundi une session marquée par les armes à feu et les traitements pour mineurs transgenres, à moins d'un mois d'une élection présidentielle qui s'annonce mouvementée.
Malgré l'adoption en 2023 pour la première fois par les neuf juges nommés à vie d'un code de conduite, de toute façon perçu comme bien insuffisant, cette institution cruciale de la démocratie américaine ne parvient pas à enrayer son déclin dans l'opinion publique.
La Cour à majorité conservatrice reste environnée de soupçons de partialité, voire de corruption en raison des largesses accordées par des milliardaires aux deux juges les plus à droite.
En l'absence de "tête d'affiche" dans les dossiers prévus jusqu'à présent, "la vraie question de la nouvelle session porte sur la Cour elle-même", écrivent dans une tribune au New York Times lundi l'ancienne juge fédérale Nancy Gertner et le professeur de droit Steve Vladeck.
"Autrement dit, l'érosion croissante de la crédibilité de la Cour et ce que les juges vont faire pour y répondre, s'ils font quoi que ce soit", poursuivent-ils.
Seuls 43% des Américains approuvent son action, selon un sondage Gallup publié en juillet, un niveau proche de son plus bas historique de 40%.
La dernière session s'est achevée sur un arrêt inédit le 1er juillet par six voix contre trois -- les neuf juges se divisant selon des lignes purement idéologiques -- qui reconnaît une large immunité pénale au président des Etats-Unis.
Par cette décision, sans annuler les poursuites fédérales contre Donald Trump pour tentatives illicites d'inverser les résultats de l'élection de 2020, la Cour a de facto garanti qu'il ne serait pas jugé avant le vote du 5 novembre.
- Statu quo sur l'avortement -
Cette session promet d'être "bien plus calme que ces deux dernières années", observe David Cole, directeur juridique de l'influente organisation de défense des droits civiques ACLU.
"Mais cela pourrait changer si l'élection présidentielle est serrée et disputée", ajoute-t-il, alors que le camp républicain anticipe une future contestation en cas de victoire de la vice-présidente et candidate démocrate Kamala Harris.
Bien que penchant sensiblement à droite, cette cour "choisit ses batailles", souligne David Cole, en référence à ses récentes décisions pour rogner les ailes des agences fédérales, la "bureaucratie" honnie par les milieux conservateurs.
A contrario, sur les sujets explosifs du droit à l'avortement ou du port d'arme, la Cour a rendu cette année des arrêts plus consensuels que ses spectaculaires revirements de jurisprudence de 2022.
Elle a ainsi préservé en juin l'accès à la pilule abortive, et autorisé de nouveau l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans l'Etat d'Idaho en cas d'urgence médicale, sans se prononcer sur le fond.
La Cour a en revanche rejeté lundi un recours contre une loi similaire très restrictive sur l'avortement au Texas (sud), qui reste donc en vigueur.
S'agissant des armes, elle étudiera dès mardi les "ghost guns", ou armes fantômes, car sans numéro de série, vendues en pièces détachées ou à fabriquer chez soi au moyen d'imprimantes 3D.
- Liberté d'expression -
Dans les prochains mois, la Cour devra statuer pour la première fois sur les traitements pour les mineurs transgenres, question qui fracture la société américaine.
La famille d'une mineure du Tennessee, soutenue par l'administration démocrate, dénonce le caractère "discriminatoire" d'une loi de cet Etat conservateur du Sud, similaire à celles adoptées par une vingtaine d'autres.
Cette loi interdit aux mineurs ne se reconnaissant pas dans leur genre de naissance l'accès aux bloqueurs de puberté, aux traitements hormonaux et aux interventions chirurgicales pour changer de sexe.
Le Tennessee justifie ce texte par les "séquelles potentiellement irréversibles" des interventions hormonales ou chirurgicales.
A l'agenda de la Cour figure également une loi du Texas obligeant les personnes consultant des sites pornographiques à fournir leurs données personnelles afin de prouver qu'elles sont majeures.
Traditionnellement, au nom du Premier amendement de la Constitution, garantissant la liberté d'expression, "la Cour a essentiellement affirmé qu'on ne pouvait pas limiter ce que les adultes peuvent voir uniquement pour protéger les enfants", explique l'avocate Lisa Blatt.
Dès mercredi, les neuf juges se replongeront dans l'une des questions les plus poignantes pour la société américaine, la peine capitale, avec le cas de Richard Glossip, qui a passé plus de 25 ans dans le couloir de la mort et dont même le procureur de l'Etat d'Oklahoma ne souhaite plus l'exécution.