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L'élection de Donald Trump a été ressentie comme un coup de tonnerre en France. Certes, Emmanuel Macron a été parmi les premiers chefs d'État à le féliciter, mais en général, les élites politico-médiatiques françaises pensaient que le scrutin serait très serré et que Kamala Harris avait ses chances. Cela traduit finalement une méconnaissance de l'Amérique profonde, mais aussi peut-être de la France profonde. Est-ce que cette victoire de Donald Trump préfigure celle de Marine Le Pen en 2027 ?
Emmanuel Macron a été l'un des premiers dirigeants européens à féliciter Donald Trump: "Prêt à travailler ensemble, comme nous avons su le faire durant quatre années, avec vos convictions et avec les miennes, avec respect et ambition, pour plus de paix et de prospérité". Il faut bien sûr y voir une courtoisie diplomatique classique, mais aussi peut-être une évolution du regard de la France sur le personnage. De toute façon, il est incontournable, il sera président, il faudra bien travailler avec lui.
Mais il faut s'en méfier aussi. Sur le plan géopolitique, on pense à l'Ukraine et à l'OTAN, mais aussi sur le front économique. Durant sa campagne, le républicain a menacé le constructeur automobile franco-italien Stellantis de le taxer à 100% s'il délocalisait certaines de ses usines américaines au Mexique. Or, Stellantis, propriétaire de Chrysler et de Jeep, gagne beaucoup d'argent aux États-Unis. Dans ce domaine, comme pour le reste, Donald Trump joue la carte de la working class et pas celle des élites. Il tourne ouvertement le dos à la mondialisation et au libre-échange toujours prôné par l'Europe pour se concentrer sur d'autres thèmes: le travail, la sécurité, la régulation des flux migratoires.
Quant aux questions sociétales comme l'égalité homme-femme, le droit à l'avortement, la défense des minorités, la reconnaissance des transgenres, il s'en moque. La lecture des cartes électorales rouge et bleue est évidente. Kamala Harris parlait aux élites new-yorkaises et californiennes et Trump au reste de l'Amérique. Or, la disparition de la classe ouvrière, de l'espace médiatique officiel n'est qu'un leurre. Elle est toujours là. Et si Kamala Harris s'appuyait sur Taylor Swift, Trump était soutenu par les chanteurs de country, mais aussi de rap. Le scrutin l'a montré, ce n'est pas une question de race ou de genre, mais de pouvoir d'achat.
Cette analyse est-elle transposable à la France ? Oui, les cartes électorales françaises sont les mêmes. Le Rassemblement national en tête partout, sauf à Paris et dans les métropoles. Et ce matin, l'information la plus importante, ce n'est pas le sommet européen en Hongrie, mais l'annonce de la suppression de milliers d'emplois chez Michelin et chez Auchan. Avec quand même une différence avec les États-Unis. En Europe, nous avons une importante protection sociale, mais que les élites envisagent de démanteler, notamment en diminuant les indemnités de chômage. Alors oui, une victoire d'une droite trumpiste est possible en France, de Marine Le Pen ou de sa nièce.