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"Je liste 10 personnes les plus proches de moi en âge de voter et je les appelle pour les convaincre de voter contre l'extrême droite": dans le Vaucluse, un petit groupe de jeunes tente "une bataille culturelle" contre le Rassemblement national.
"Je ne monte jamais le ton, si la personne n'est pas réceptive (...) je lui souhaite une belle journée et je raccroche", poursuit cet "argumentaire phoning", élaboré pour les législatives du 30 juin et 7 juillet par le nouvel Observatoire de l'extrême droite du 84, "l'un des départements les plus pauvres, les plus isolés et les moins diplômés" de France, explique Antonin Dacos, 23 ans.
Dans le Vaucluse, bastion de l'extrême droite depuis plusieurs années, le RN a frôlé le grand chelem aux dernières législatives en remportant quatre circonscriptions sur cinq. Marion Maréchal y a eu son premier ancrage électoral et plusieurs municipalités sont dirigées par l'extrême droite, dont Orange, depuis 1995.
Antonin ne s'en cache pas, il est de gauche, proche du parti Génération.s. Il était jusqu'à la dissolution collaborateur parlementaire du député des Yvelines, Benjamin Lucas. Mais leur démarche n'est pas politique mais "métapolitique" et rassemble une vingtaine de jeunes de différentes sensibilités.
"On veut "dénoncer ce qu'ils (les représentants d'extrême droite) sont, leur incompétence", relève Alexandre Lorello, 25 ans, qui "a été au Parti socialiste" mais se présente aujourd'hui avant tout comme "Vauclusien".
"Le combat doit se faire sur les idées", sur leurs "valeurs fratricides", "l'économie où ils portent des sujets qui n'ont pas de sens", surenchérit cet autre jeune de 23 ans, plutôt macroniste à "fortes convictions écologiques", qui ne souhaite pas décliner son identité pour des raisons professionnelles.
Dire aux électeurs tentés par l'extrême droite qu'ils sont "des racistes, des fascistes, ça ne peut pas marcher. Ça clôt une conversation", estime Alexandre.
"Oui, il y a chez les militants RN de vrais fascistes mais chez les électeurs beaucoup se sentent méprisés par Paris alors qu'eux vivent les déserts médicaux, les gares qui ferment: il y a un lien entre la distance des services publics et le vote RN", insiste Antonin qui espère "rattraper par la main les électeurs paumés".
Ici, il y a déjà le collectif antifasciste du Vaucluse "No Pasaran 84" ou une intersyndicale mobilisée pendant les Européennes pour marteler que "l'extrême droite n'est pas le parti des salariés".
"Il faut sans doute que les opposants au RN se saisissent aussi" de la bataille culturelle que "l'extrême droite assume très clairement", analyse Christèle Lagier, spécialiste en sociologie électorale de l'extrême droite.
- "très dur" -
Alors comment s'y prendre?
Avec ces législatives anticipées, ces jeunes ont mis en ligne un formulaire qui permet d'un simple clic de recevoir une liste d'arguments à faire valoir auprès "de vos amis, parents, grand-parents". Arguments transmis également via une newsletter à 900 abonnés.
En février, lors du lancement de leur Observatoire, ils ont fait un rapport sur l'activité parlementaire des quatre députés RN pointant leurs positions "antiféministes" ou "anti-classes moyennes sur le logement et le travail".
Par exemple, trois de ces quatre députés ont voté contre l'inscription dans la Constitution de l’Interruption volontaire de grossesse (IVG).
Ils relèvent également leur manque de technicité avec peu d'amendements déposés ou retoqués car mal rédigés.
Bénédicte Auzanot, députée RN sortante de la 2e circonscription du Vaucluse, estime que tout ça "c'est creux".
"Ils sont censés parler du Vaucluse et ils se positionnent sur les sujets nationaux", explique-t-elle à l'AFP, qualifiant leur travail de "tract".
Sur le faible nombre d'amendements déposés pendant son mandat, cette ancienne assistante de cabinet médical assure: "J'ai défendu les amendements de mes collègues".
Sur le marché de Cavaillon, 25.000 habitants, elle est repartie en campagne "confiante". Elle distribue méthodiquement avec un grand sourire et sans trop parler son tract la montrant en photo avec Jordan Bardella.
"Pour nous en Provence-Alpes-Côte d'Azur, ce sera très dur", soupire en la voyant passer un sympathisant LFI, Thierry Rousselet, venu lui aussi distribuer des tracts, rouges et sans photo, du Nouveau Front Populaire.
"On n'arrivera pas forcément à infléchir", l'opinion des gens, "mais si déjà modestement on peut les faire réfléchir....", espèrent les jeunes de l'Observatoire.