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"Débureaucratiser" la vie des entreprises ou, comme l'a résumé la ministre déléguée aux Entreprises Olivia Grégoire, "enlever les cailloux dans les chaussures de nos entrepreneurs" : le Sénat a commencé lundi soir à examiner le projet de loi de simplification de la vie économique, parfois avec un certain scepticisme.
Les sénateurs prendront au moins trois jours pour examiner le texte en première lecture, avant un vote solennel prévu mardi 11 juin.
Rares sont les dispositions très politiques dans ce texte censé faciliter la vie des entreprises, ce qui laisse envisager une adoption sans grandes difficultés par la chambre haute, malgré l'opposition de la gauche.
Sur cette loi, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a laissé la main aux ministres délégués de Bercy, et particulièrement à Mme Grégoire.
Le projet prend particulièrement en compte la situation des petites entreprises : "Nous ne sommes pas tous égaux face à la norme, selon que vous soyez une petite PME de 10 salariés ou une grosse (entreprise) avec une équipe dédiée", a relevé Mme Grégoire.
Il sera question notamment de rapprocher le droit des professionnels et celui des particuliers en matière de banque et d'assurance.
Les débats s'annoncent techniques sur de nombreux pans de la vie économique: contentieux de la commande publique, code minier, installations industrielles...
- Cosmétique -
La sénatrice Les Républicains Catherine Di Folco, corapporteure sur ce texte, a dénoncé pour sa part "la faiblesse du texte".
Les frustrations sont néanmoins atténuées par la promesse gouvernementale de poursuivre ce vaste chantier régulièrement, avec un projet de loi de simplification annuel.
La gauche, elle, dénonce, comme le socialiste Michaël Weber, un "texte en trompe-l'œil" au détriment selon elle des enjeux environnementaux.
Toutes les sensibilités s'alignent en revanche pour dénoncer la mesure emblématique du plan : la mise en place d'un bulletin de paie raccourci, passant de 55 lignes à seulement une quinzaine.
Cette réforme du bulletin de paie comprend une partie technique que le Sénat a supprimée en commission, le reste devant passer par la concertation avec les partenaires sociaux.
"C'est de la communication ou de la cosmétique. Je n'ai pas croisé une seule personne qui m'a dit que c'était une bonne idée", s'agace le centriste Yves Bleunven, l'autre corapporteur. Bercy tentera de faire rétablir son article en séance publique.
L'instauration de tests PME, un mécanisme visant à évaluer en amont l'impact de toutes les normes sur les entreprises, permettra en revanche de réintroduire un dispositif déjà voté par le Sénat, avec l'approbation du gouvernement.
- Arlésienne -
Autre mesure-choc, la suppression à l'horizon 2030 des 1.800 formulaires Cerfa et le passage au peigne fin des 2.500 autorisations administratives qui alourdissent le quotidien des entreprises.
Une partie de ce travail de fourmi n'a pas à passer par la loi. Pour le reste, le gouvernement demande aux parlementaires de larges habilitations à réformer par ordonnances, ce qui irrite les sénateurs. "On cherche à contourner le Parlement", alerte Rémy Pointereau (LR), président de la Commission spéciale dédiée à cette loi.
"Nous ne souhaitons pas abuser des ordonnances", s'est-il limité à dire en séance, faisant crédit au texte, "s'il ne fait que s'attaquer à la petite cuillère à l'océan normatif" d'avoir "le mérite de sortir la simplification de son statut d'arlésienne", celle qu'on attend et qui ne vient jamais.
Faire passer par la loi toutes ces suppressions "serait un exercice titanesque", a plaidé Mme Grégoire. Elle a promis que le gouvernement, s'il était finalement autorisé à procéder par ordonnances, "rendrait des comptes" au Parlement sur ce chantier.
Le Sénat a débattu lundi soir 36 amendements, portant sur la commande publique et l'article 4 qui oblige l'Etat et les organismes de sécurité sociale à utiliser un profil unique d'acheteur. Il en reste 362 à débattre dans les prochains jours, sur des sujets moins consensuels.