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La Chine a dévoilé vendredi de nouvelles mesures pour relancer son économie, minée par une consommation des ménages atone et un secteur immobilier en crise, des annonces saluées par le marché même si elles semblent encore insuffisantes.
Tout au long de la semaine, les autorités chinoises ont multiplié les annonces de mesures de soutien à la deuxième économie mondiale, sans précédent depuis la pandémie de Covid.
Vendredi, la Banque centrale a réduit le taux de réserves obligatoires des banques, ce qui devrait permettre d'injecter quelque 127 milliards d'euros de liquidités sur les marchés financiers.
Ce taux (RRR) est un ratio qui détermine la part des dépôts que les banques sont tenues de garder dans leurs coffres. Sa réduction doit leur permettre de prêter davantage aux entreprises pour soutenir l'économie réelle.
L'annonce par la Banque centrale survient au lendemain d'une réunion de dirigeants chinois qui ont admis l'existence de nouveaux "problèmes" dans la deuxième économie mondiale et après d'autres mesures dévoilées ces derniers jours, dont des réductions de taux d'intérêt et des prêts immobiliers moins chers.
Les autorités tablent toujours sur une croissance d'environ 5% cette année, mais les analystes jugent cet objectif optimiste compte tenu des nombreux obstacles auxquels elle est confrontée.
Vendredi, Pékin a aussi annoncé une réduction de 1,7% à 1,5% du taux de repo inversé à sept jours, un taux d'intérêt à court terme payé par la Banque centrale sur les emprunts auprès de prêteurs commerciaux.
- "Crise de confiance" -
La Chine est en proie à une crise inédite de son vaste secteur immobilier, une confiance morose des ménages et des entreprises, ce qui pénalise la consommation, tandis que les tensions géopolitiques avec Washington et l'Union européenne menacent son commerce extérieur.
"Faire des affaires est encore plus dur cette année que c'était pendant la pandémie" de Covid, déclarait jeudi à l'AFP Chang Guiyong, propriétaire d'un petit restaurant à Shanghai, âgé de 58 ans.
"Les gens n'ont plus envie de consommer, même les employés de bureau apportent leur déjeuner au travail", ajoutait-il.
"La faiblesse de la Chine provient d'une crise de confiance, et non d'une crise du crédit", estime Harry Murphy Cruise, économiste à Moody's Analytics.
"Les entreprises et les familles ne veulent pas emprunter, quel que soit le coût de l'emprunt", et "donc, la baisse des coûts d'emprunt ne permettra pas de relancer l'économie, à moins que les autorités n'injectent à nouveau dans l'économie la confiance dont elle a tant besoin", ajoute-t-il, appelant à "des réformes structurelles plus larges".
Mi-septembre, le pays a décidé de relever progressivement l'âge légal de la retraite dès l'an prochain, une première depuis des décennies.
"De nouvelles situations et nouveaux problèmes sont apparus" pour l'économie chinoise, a rapporté jeudi l'agence d'Etat Chine nouvelle à l'issue d'une réunion du Bureau politique du Parti communiste au pouvoir.
Les dirigeants chinois ont appelé à "améliorer l'efficacité" de la politique économique et à davantage de réductions de taux, ainsi qu'à "répondre aux inquiétudes de la population" à propos de la conjoncture et de l'immobilier.
- "Relance au bazooka" -
La série de mesures dévoilées cette semaine par Pékin a été bien accueillie par les investisseurs, les Bourses de Shanghai et Hong Kong affichant une hausse de plus de 10% depuis lundi.
Hong Kong a ainsi connu sa meilleure semaine depuis 2009 et Shanghai de même depuis 2008, selo les données de l'agence Bloomberg.
Même si des réformes plus larges restent nécessaires pour atteindre l'objectif de croissance pour 2024, ces nouvelles annonces semblent montrer une volonté d'en faire plus dans ce domaine, selon les analystes.
"Pékin paraît enfin déterminé à mettre en oeuvre ses mesures de relance au bazooka et de façon rapide", observe Ting Lu, économiste en chef pour la Chine chez Nomura, dans une note.
"La reconnaissance par Pékin de la gravité de la situation économique et de l'échec d'une approche fragmentaire devrait être appréciée par les marchés", ajoute-t-il.
Dans une note, ANZ Research juge les mesures annoncées "suffisantes par rapport à (sa) prévision de croissance du PIB de 4,9% cette année", même si "elles restent trop limitées et trop tardives face aux problèmes actuels du secteur immobilier".
"Les autorités annonceront probablement des mesures supplémentaires de soutien fiscal dans les prochains mois", prédit ANZ.
Signe de la gravité de la situation, la Chine envisage d'injecter dans ses banques d'Etat près de 130 milliards d'euros, ce qui constituerait une première depuis la crise financière de 2008, affirmait jeudi Bloomberg.