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Ministère A.M.E.R. : 30 ans de provocation et d’engagement

Stomy Bugsy et Passi célèbrent les 30 ans de leur groupe légendaire, Ministère A.M.E.R. Avec des titres toujours aussi percutants, ils reviennent sur scène pour transmettre leur message et partager leurs expériences, entre passé et présent.

RTL info : Stomy Bugsy et Passi, vous remontez sur scène avec le collectif "Ministère A.M.E.R." pour les 30 ans de votre album phare. Que signifie l'acronyme A.M.E.R. ?

Passi : C'est Action, Musique et Rap. C'est une association qu'on a montée au tout début du rap et qui est devenue le nom du groupe. 

Stomy Bugsy : C'est devenu agent du ministère, éloquent et radical.  

Comment se passe la reprise des répétitions, et le fait de faire revivre des titres qui ont plus de 30 ans ? 

Passi : Il y a des textes, qui ont été écrits quand on avait 20 ans. Donc, on sent la fougue, l'énervement, le cri social. Et donc oui, c'est un peu marrant quelquefois de chanter des trucs qu'on a écrits à cet âge-là.

Et aujourd'hui, vous avez passé 50 ans, ces textes résonnent-ils toujours en vous ? Est-ce que vous pensez que les choses ont changé ou que votre vision sur la société a un peu évolué ?

Passi : Nos visions et nos âges ont évolué. Ce qu'on vit a évolué. C'est vraiment des choses qu'on a écrites quand on était tout jeunes hommes. Mais en même temps, les problèmes n'ont pas tant évolué. Il y a certains problèmes qui ont empiré. Dans Ministère A.M.E.R., on rêvait d'un meilleur avenir. C'est un cri par rapport à la société. On était dans la provocation, etc., en espérant être écoutés, que les choses changeraient. Et en ce moment, je pense que ça devient de plus en plus difficile pour certaines personnes dans certains quartiers.

Pour vous, les choses ont changé ? 

Stomy Bugsy : Ça dépend des problèmes. On est en France, un pays où tu peux faire des études gratuitement. J'ai vécu pendant cinq ans aux États-Unis et là-bas, l'école, tu dois payer pour tout : tu veux être soigné, il faut que tu payes, tu veux aller faire des études, il faut que tu payes. En France, il y a aussi des possibilités, mais il y a aussi plein de problèmes. Durant les répétitions, en studio, on chantait nos anciens textes et on rigolait beaucoup, parce qu'on vient de Sarcelles qui est un peu comme le village d'Astérix, pour nous, qui est conquis par les Romains. C'est une ville assez spéciale, avec un long héritage de rockers très rebelles. On est le produit de notre environnement.

Sarcelles, c'est encore votre ville de cœur ? Vous y vivez-vous encore ou dès que vous avez pu vous échapper, vous êtes partis ? 

Passi : Quand on a pu s'en échapper, on est partis. Moi, je suis parti parce qu'on espérait mieux. On a eu la chance que la musique nous ouvre certaines portes, donc on est allés plus loin. Je dis souvent à ceux dans des quartiers difficiles, si votre métier vous permet d'aller voir ailleurs, de vivre différemment, il faut le faire. C'est ce qu'on a fait avec Stomy, avec Ministère A.M.E.R. ou même notre label. On n'a pas arrêté de bouger partout dans le monde.

Stomy Bugsy : J'y vais toutes les deux semaines pour donner de la force aux associations, aux jeunes. Mon père aussi est encore là-bas. 

L'énergie que vous mettez sur scène sera-t-elle la même qu'il y a 30 ans ? 

Passi : Je ne joue pas de la même manière qu'il y a 30 ans. Mais il y a une expérience qu'on aime bien avec Stomy, c'est le fait que nous venons du rap. On était des breakers, des danseurs, donc on a toujours un côté spectacle. Chaque fois qu'on est sur scène ensemble, on se pousse, il y a une mise en scène. On a vieilli, mais il y a plus de cinéma, beaucoup plus pour lui que pour moi. On va raconter aux gens l'histoire du début du rap et du hip hop. 

Stomy Bugsy : Ce sera encore mieux sur scène. On va utiliser l'expérience qu'on a acquise avec nos carrières solo. Avant, on chantait devant 10.000-20.000 personnes et là, ça va être des salles un peu plus cosy.

Votre punchline "le savoir est une arme", reste une phrase qu'on retient. 

Passi : Oui, c'était le logo du Ministère A.M.E.R., parce qu'on voulait pousser les gens à s'éduquer, que ce soit à l'école, dans la rue, par tous les moyens possibles. Parce que le savoir est toujours une clé pour beaucoup de choses. Donc oui, c'est un dicton, un logo, une punchline qui sert encore aujourd'hui.

Les rappeurs d'aujourd'hui sont-ils dans la même dynamique que vous l'étiez à l'époque ? Quel est votre rapport avec cette nouvelle génération ?

Passi : C'est une génération qui est plus Internet que la nôtre, qui a plus facilement des informations. C'est une génération. Le rap d'aujourd'hui est devenu un peu plus Instagram. On développe moins des sujets du début à la fin. Il y a plus d'images, plus d'interactions. Ce sont vraiment deux générations différentes. Les rappeurs d'aujourd'hui s'intéressent à Ministère A.M.E.R. justement pour découvrir les prémices de leur culture. Je pense que ce travail culturel, ce travail d'héritage, on ne l'a pas assez fait. Donc, avec ces tournées et toutes les séries ou les documentaires qui commencent à parler de cette époque, cela participe à ce côté héritage.

Qu'est-ce que vous voulez retrouver quand vous allez monter sur scène ?

Stomy Bugsy : Le public et l'amour des gens. Il y a plein de jeunes qui viennent aussi, des parents qui viennent avec leurs enfants, leurs petits-enfants, pour leur montrer le rap d'avant. On a toujours cette fougue et cet amour. Et dans Ministère A.M.E.R, il y a beaucoup de messages qui sont très explosifs, il y a beaucoup de second degré. Donc voilà, j'ai hâte de rencontrer notre public et festoyé avec eux.

Passi : On n'avait pas tourné avec Ministère A.M.E.R., on a fait que des tournées solo. Le dernier truc qu'on a fêté ce sont nos 20 ans il y a dix ans à l'Olympia, c'était assez exceptionnel. Donc là, même une tournée Ministère A.M.E.R., pour nous, c'est la première grosse tournée.

Pour finir, reformer le groupe pour un nouvel album, c'est envisageable ?

Passi : Actuellement, on prépare sur une série de fictions. Je pense que le nouvel album viendra quand on finalisera la série. Il y a une série en préparation. 

 

 

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