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Il y a quelques jours, Florence (prénom d’emprunt car elle veut garder l'anonymat) circule sur une route de Wallonie lorsqu’elle aperçoit un chat au beau milieu de la route. Percuté par une voiture, l’animal est incapable de se mouvoir. Florence sort de son véhicule et découvre un chat agonisant. "J’étais paniquée, je ne pouvais pas le laisser là. Il était entre la vie et la mort", nous raconte-t-elle via notre bouton orange Alertez-nous.
Dix minutes plus tard, Florence et son mari se retrouvent devant un cabinet de vétérinaire dont la devanture est fermée.
"J’ai sonné le numéro qui était indiqué sur la porte. C’était un téléphone fixe. On m’a tout de suite demandé si je connaissais ce chat et si j’allais assumer les frais de l’intervention. Pas d’argent, pas de soins. Mais on n’avait pas le temps pour ça ! Je voulais juste sauver ce chat qui était entre la vie et la mort", s’exclame Florence.
Le chat allait de plus en plus mal, il ne respirait presque plus
Cette dernière nous raconte que face à son refus de payer, le vétérinaire n'est pas intervenu. "Il nous a dit qu’il fallait appeler la SPA, et qu’ils (les travailleurs du refuge, nldr) dépêcheraient une ambulance", affirme-t-elle.
Problème: plusieurs dizaines de kilomètres séparent la SPA de l’animal mourant. "Le chat allait de plus en plus mal. Il ne respirait presque plus, j’ai tapoté sur sa poitrine pour tenter de lui faire un massage cardiaque mais rien à faire… Il a commencé à régurgiter et il est mort avant l’arrivée des secours", déplore-t-elle.
"Je suis frustrée car il aurait pu être sauvé mais personne ne nous a ouvert. Le vétérinaire aurait peut-être pu abréger ses souffrances mais il a refusé… Je pensais qu’être vétérinaire était avant tout une passion pour sauver des animaux. C’est comme vous arriviez à l’hôpital entre la vie et la mort et que l’on vous demandait: 'Qui êtes-vous? Allez-vous savoir payer la note?' ", insiste-t-elle.
Afin de comprendre la situation, nous avons contacté le vétérinaire en question. Celui-ci nous confirme avoir reçu un appel pour un chat errant blessé. "C’était un samedi après midi en dehors des heures d’ouverture de la clinique. Dans cette tranche horaire, nous assurons les urgences sur appel téléphonique et nous nous rendons à la clinique si nécessaire", nous explique-t-il.
Il est parfois extrêmement malaisé d’estimer la gravité réelle de la situation
Il nous assure que lors de l'appel, il était déjà en intervention. "J’aurais difficilement pu arriver beaucoup plus vite, mais en tout état de cause, à aucun moment cette dame ne m’a rappelé pour me signaler qu’elle était inquiète, que le chat était mourant et que l’ambulance n’arrivait pas. Sinon je me serais évidemment débrouillé pour arriver au plus vite pour abréger ses souffrances", se défend-il.
Le praticien nous explique être régulièrement appelé pour des opérations sur des animaux trouvés. Dans ce genre de cas, la procédure est toujours la même. Si la personne qui présente l'animal est d'accord pour prendre en charge les frais occasionnés, le vétérinaire l'examine et prodigue les soins nécessaires. Si elle ne veut pas en assumer les frais, elle est redirigée vers la SPA "qui prend l'animal en charge sans frais pour la personne qui l'a appelée".
Il existe toutefois des exceptions, comme nous l'assure ce vétérinaire. Si l'intervention est jugée particulièrement grave, le praticien prend en charge l'animal "même si cela doit en être à sa charge". Il faut alors juger l'état de l'animal sans pour autant l'avoir ausculté.
"Il est parfois extrêmement malaisé d’estimer la gravité réelle de la situation sur les seuls dires des gens qui ont parfois, et même souvent, tendance à surestimer l’importance des lésions", nous explique le vétérinaire.
Que dit la loi?
En Belgique, la loi du 14 août 1986 encadre l’abandon d’animaux domestiques. Selon l’article 9, "toute personne qui recueille un animal errant, perdu ou abandonné est tenue de le confier, dans les quatre jours, à l’administration communale de l’endroit où elle a trouvé l’animal ou de laquelle elle dépend."
C’est ensuite à l’administration communale que revient le soin de trouver un refuge à l’animal. "L’administration communale peut désigner un refuge pour animaux auquel les animaux peuvent être directement confiés par les personnes qui les ont recueillis", précise la loi.
Chaque bourgmestre délègue cette prise en charge à la zone de police locale. Les policiers sont donc chargés de prendre en charge les animaux errants qui sont rapportés. Ces derniers prennent ensuite en charge l’animal et scannent sa puce pour trouver son propriétaire. S’il ne possède aucune puce, il est transporté vers le refuge le plus proche. Cela concerne les démarches quand on trouve un animal errant qui va bien.
Pas de refus si l'intervention est jugée vitale
Mais que faire lorsque l’on est face à un animal blessé? Parfois, le temps est compté et respecter toutes ces démarches demeure impossible.
Il existe alors plusieurs cas de figure.
- La personne peut porter l’animal à la zone de police locale. Au vu de son état, les agents effectuent un "réquisitoire". En clair, ils demandent l’intervention d’un vétérinaire de garde. Ces frais sont à la charge de la commune, qui établit au préalable les vétérinaires avec qui elle est encline à travailler.
- En cas d’extrême urgence comme l’a vécue Florence, il est tout à fait possible d’apporter l’animal à un vétérinaire situé à proximité. C'est ce que nous précise l'ordre des Médecins Vétérinaires. "Conformément à l'article 20 du Code de déontologie, le vétérinaire doit assurer la continuité des soins aux animaux de même que les interventions en cas de nécessité urgente d'assistance", nous écrit l'organisme.
Avant d'ajouter: "Il peut cependant s'abstenir de toute intervention si ses honoraires ou les honoraires d'un confrère n'ont pas été réglés, SAUF en cas de nécessité urgente d'assistance aux animaux".
Lorsqu'un professionnel refuse une prise en charge alors qu'il y a urgence, des sanctions peuvent être infligées. L'Ordre des Vétérinaires nous explique que celles-ci peuvent être "un avertissement, une réprimande, une suspension du droit d'exercer la médecine vétérinaire pendant un terme qui ne peut excéder deux années et la radiation des tableaux de l'Ordre, entraînant l'interdiction définitive de pratiquer la médecine vétérinaire en Belgique".
Il est possible de porter plainte en adressant un courrier postal à l'Ordre des médecins vétérinaires. La personne évoquée doit être clairement identifiée par son nom et son adresse. La situation qui justifie une plainte doit également être détaillée.