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"On vit à Chicago", va jusqu'à nous dire Maryse (nom d'emprunt par peur de représailles), une habitante de Watermael-Boitsfort, commune plutôt aisée en région bruxelloise. Depuis 10 ans, cette mère de famille habite le quartier du 'Dries', composé d'une partie importante de logements sociaux. Elle constate une montée en puissance des incivilités et de la délinquance. Elle nous a joint via le bouton orange Alertez-nous : "Le quartier à l'air paisible, mais on n'ose plus laisser nos enfants sortir. Ça devient dangereux."
Maman d'un garçon de 14 ans, elle craint de le laisser sortir
La Watermaeloise évoque des soucis de délinquance et pointe du doigt des trafics de drogue au pied même de certains immeubles, notamment le sien à la rue de l'Élan. "Les dealers font venir des clients d'autres communes. Il y a des caves remplis de marijuana", accuse-t-elle. "Des réunions se passent devant les immeubles où on a parfois peur de passer."
Maryse est la maman d'un garçon de 14 ans, un "âge critique": "Je lui interdis de traîner dans le quartier". Elle veut lui éviter de mauvaises influences voire des coups : "Il y a une plaine de jeu. Des grands obligent certains jeunes à fumer, ou alors on les frappe pour pas qu'ils ne restent", se plaint-elle.Si Maryse nous contacte c'est parce que sa "propre vie est en danger" ébruite celle qui avoue dormir avec un marteau par peur. "Ras-le-bol!" conclut-elle. Son sentiment d'insécurité repose-t-il sur des faits objectifs ? Nous avons interrogé la police locale.
Plusieurs faits divers à Watermael-Boitsfort
Ces derniers semaines plusieurs incidents sont venus entacher cette commune bruxelloise aux allures paisibles. Exemple, le weekend où Maryse nous a contactés. Dans la nuit du dimanche 23 au lundi 24 novembre, une perquisition a eu lieu dans son quartier provoquant un déploiement de police important. L'explication : "Présence supposée d'armes dans l'un des appartements d'une famille, ce qui a créé un émoi" rapporte Laurent Masset, le porte-parole de la zone de police qui reconnait que cette famille "pose problème".
La présence de pas mal de jeunes peut être vécue comme dérangeante
D'autres événements sont venus perturber le quartier et ses alentours. Quelques jours plus tôt, le 20 novembre, 17 caves appartenant aux commerçants de la place Keym ont été visités. Fin septembre, ce sont deux personnes qui ont été arrêtées pour trafic de stupéfiants non loin de chez Maryse. Deux kilos de cannabis et 4.000 euros avaient été saisis chez les dealers présumés. Enfin, toujours en septembre, un jeune de 20 ans a été mis à disposition du Parquet de Bruxelles. Il est soupçonné de trafic de stupéfiants après que la police a retrouvé 7.300 euros en petites coupures.
La zone de police Marlow ne nie pas que des faits liés à la vente de stupéfiants se produisent dans le quartier de Maryse: "Oui, il arrive qu'il y ait de petits faits de deal". Mais Laurent Masset tempère et parle plutôt d'un conflit générationnel. Le quartier présenterait de grande disparités dans les âges: "La présence de pas mal de jeunes peut être vécue comme dérangeante parce qu'elle s'accompagne parfois d'incivilités, de petits délits, de petits trafics sans qu'on puisse parler d'un grand trafic de drogue là-bas."
Des restrictions qui n'aident pas
Selon la police, les tensions dans le quartiers seraient aussi et surtout à mettre en lien avec les contraintes liées à la situation sanitaire. "Ces tensions sont exacerbées par le confinement. Les mesures ont un impact sur les interactions sociales et les loisirs. Les jeunes n'ont pas beaucoup d'échappatoire et restent à traîner autour des blocs du quartier, ce qui crée des tensions avec ceux qui respectent le confinement et restent chez eux. Il y a un conflit latent par rapport à ça", ajoute la zone de police.
Une situation sous contrôle
Le quartier du Dries possède une maison de quartier qui joue un rôle essentiel dans l'éducation. Acteur de terrain, l'un des coordinateurs de la maison de quartier du Dries abonde dans la théorie du confinement évoqué par la police: "On a des locaux où on fait de l'accueil de jeunes mais ces espaces sont fermés. Les jeunes ne sont plus près de nous pour avoir un réel rôle de prévention. Oui, il a quelques difficultés dans le quartier mais c'est lié fortement au confinement" explique le coordinateur qui minimise la dangerosité des jeunes: " Le premier confinement a fait beaucoup de mal au niveau du soutien à l'habitant en règle générale. Le sentiment d'insécurité est soit lié à la peur de ces petits groupes de jeunes – qui ne sont pas bien méchants fondamentalement – ou alors c'est lié au confinement. Les gens ont peur de sortir, peur du virus."
Quoiqu'il en soit, Laurent Masset, porte-parole de la zone de police se montre rassurant: "La zone de police tient la situation à l'œil et nous sommes présents dans le quartier de façon régulière. Nous sommes présents dans le quartier pour assurer la sécurité de tout le monde, sans être sur le dos des jeunes tout le temps, il faut laisser une certaine liberté et marge de manœuvre", explique Laurent Masset qui dit tenir au courant les autorités communales de la situation.