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Ce mercredi, les agriculteurs européens manifesteront à Bruxelles contre l'accord Mercosur et pour protester contre le manque d'aide face à la fièvre catarrhale, qui a emporté bon nombre de bétail. Sans soutien de la part des autorités, ces trois agriculteurs n'ont trouvé d'autres solutions que de manifester.
Dans la ferme de Jonathan, une routine tragique s'est installée, celle des avortements. "Ici, c'est un petit veau, prématuré, il avait encore un mois avant le vêlage. On retrouve des petits veaux comme ça une, deux, trois, quatre fois par semaine", avoue-t-il.
Depuis le mois d'août, la crise de la fièvre catarrhale continue de décimer les fermes en Belgique. Pourtant, le fonds sanitaire n'interviendra pas, faute de moyens, alors que les côtisations ont augmenté de 30 % par rapport à l'année passée. "L'année passée, je devais payer 936,23 €, et cette année, je paye plus de 1300 € pour un fonds qui ne sert à rien quand on a une crise sanitaire", déplore Jonathan.
Sans reproduction assurée, certaines vaches ne donnent plus de lait. C'est notamment le cas dans la ferme de Floriane, qui devra se séparer de Chami. "C'est une vache avec qui on a des liens, on a adoré travailler. Aujourd'hui, on n'a pas d'autre possibilité. Ce sont des gros problèmes financiers, mais c'est aussi un crève-cœur, parce qu'on est obligé parfois de se séparer d'animaux, il y a aussi beaucoup d'animaux qui sont morts".
Les vaccins n'arriveront pas avant 2025. Le ministre fédéral de l'agriculture l'a rendu obligatoire et exige des agriculteurs de le payer. Floriane ne cache pas sa colère : "On est un peu fâché sur les institutions et sur le ministre Clarinval, parce que cette situation, elle découle d'une mauvaise gestion. On a beau dire que les agriculteurs ont été prévenus, c'est faux. Quand on a su que la maladie était là, c'était déjà trop tard, car les élevages étaient déjà touchés". Pour l'agricultrice, des excuses seraient une première étape pour avancer : "À nos yeux, le minimum, serait déjà que monsieur Clarinval assume la faute des institutions fédérales et régionales et intervienne dans le paiement des vaccins".
Un prix du lait plancher
En colère, Thomas, lui, ne vend son lait qu'à 0,46 €/l, un prix qui n'a pas augmenté depuis les années 80. Cette nouvelle crise pourrait bien l'achever. "J'ai plus ou moins 25 % en moins de production tous les mois. C'est à tomber à terre. Déjà qu'il nous faut tous nos sous pour payer ce qu'on doit, alors ici, comment on va finir l'année ?", se demande-t-il. "Comment on va finir l'année ?", répète l'agriculteur. "Tout ça à cause de quelques personnes incompétentes, clairement. Je n'ai pas peur de le dire, c'est une catastrophe."
Depuis les dernières manifestations nationales de ce début d'année, la situation ne cesse d'empirer. Des promesses pour les élections, puis l'inaction. "La colère et du dégoût. On a serré un paquet de mains, des politiciens nous ont fait des discours abominables et des promesses. Nous revoilà neuf mois après, et rien, strictement rien du tout. Ils se sont vraiment servis de nous", se désole Thomas.
Ils veulent détruire l'agriculteur européen
Et avec la finalisation imminente du traité de libre-échange Mercosur dans les prochaines semaines, les blocages devraient se durcir et se multiplier. Une très mauvaise nouvelle, selon Thomas : "Si ce traité-là rentre en vigueur, l'agriculture européenne est morte. Il va venir des millions de tonnes de viande du bout du monde, de l'Amérique du Sud", prévient-il. "Il faut qu'on m'explique, car on nous dit que nos vaches produisent du méthane et polluent quand elles pâturent dehors, et en même temps, on importe des bêtes qui vont venir par paquebot du bout de la terre. C'est l'Europe qui veut ça ? À un moment, il faut arrêter, c'est vraiment un "agricide" de l'Europe. Ils veulent détruire l'agriculteur européen."
Plus déterminés que jamais, Floriane, Thomas et Jonathan porteront leurs droits et défendront leur avenir, prêts à passer à l'action dans les prochaines manifestations.