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"Des changements structurels majeurs": voici les mesures clés de l'accord de gouvernement

Après 57 heures de conclave à l'École royale militaire, l'Arizona est née. Le gouvernement De Wever est sur les rails. Un accord a été trouvé entre les cinq partis. La version finale du document de plus de 200 pages est toujours en cours de correction, mais de grandes lignes pouvaient dès hier soir se dégager. 

Un accord de gouvernement a été trouvé par les cinq partis de l'Arizona peu avant 22 heures hier soir. Le formateur Bart De Wever s'est ensuite rendu au Palais Royal pour présenter cet accord au Roi.

Pour l'instant, le casting ministériel n'est pas encore connu. Les partenaires de l'Arizona en ont discuté cette nuit, mais ils n'ont pour l'instant rien dévoilé.

Ils se sont quittés vers 5 heures du matin et à la sortie de l'école royale militaire, Georges-Louis Bouchez, a commenté les mesures décidé.  

"Il y a un accord de gouvernement qui sera présenté dans les prochaines heures. Et donc, c'est un accord avec des réformes qui n'ont jamais été faites en Belgique depuis des décennies. Il y a vraiment des changements structurels majeurs, mais je laisserai le futur Premier ministre les présenter", a lancé le président du MR. 

"Pas une promenade de santé", promet De Wever

Les cinq partis de l'Arizona, à savoir le CD&V, Vooruit, la N-VA, les Engagés et le MR, se sont félicités de cet accord sur leurs réseaux sociaux. Déficit budgétaire, taux d'emploi, compétitivité des entreprises, etc. La Belgique fait face à de "grands défis" et la législature qui a commencé ne sera pas une "promenade de santé", avertit le formateur et futur Premier ministre, Bart De Wever, en introduction de l'accord, toujours en cours de relecture finale ce matin.

"Le chemin que nous sommes sur le point d'emprunter ne sera pas une promenade de santé. Les défis auxquels nous sommes confrontés exigent des sacrifices de la part de tous les acteurs de notre société. Ceux qui disent le contraire mentent à la population. Notre gouvernement a décidé de regarder la vérité en face et de prendre les actions nécessaires pour protéger et renforcer la prospérité de tous les citoyens de notre pays", avertit à la fin de son préambule M. De Wever.  

L'accord conclu compte plus de 200 pages. Si les versions qui circulent actuellement ne sont pas les dernières, elles n'en donnent pas moins la teneur de ce qui attend le pays dans les quatre ans et demi à venir.  

Économie

Ce qu'on sait déjà de cet accord, c'est que du point de vue économique, il y aura bien une taxe de 10% sur les plus-values boursières au-dessus de 10.000 euros. Dès 2026, la quantité exonérée d'impôts va augmenter. La taxe bancaire sera également relevée et la lutte contre la fraude fiscale renforcée.   

Vooruit a donné vendredi soir à ses membres quelques détails sur l'accord de coalition. Les socialistes font valoir qu'ils ont "sauvé l'index" . Les projets antérieurs visant à geler l'indexation, notamment, du revenu d'intégration pendant plusieurs années n'ont pas été retenus dans l'accord final.

Pouvoir d'achat

Premier pilier de l'accord : le pouvoir d'achat. Prenons l'exemple de Marc, salarié. Avec les nouvelles règles, son salaire sera toujours indexé et son revenu net augmentera à partir de 2027 grâce à une charge fiscale plus faible.

S'il reçoit des chèques repas, il verra leur valeur augmenter de deux euros et il pourra les utiliser dans plus de commerces. Il payera 10% d'impôts s'il réalise des bénéfices sur des actifs financiers, sauf si c'est un petit investisseur. Dans ce cas, il bénéficie d'une exonération sur les premiers 10.000 euros.

Pensions 

En ce qui concerne les pensions, certains régimes favorables seront progressivement supprimés.

Les personnes qui ont commencé à travailler à 18 ans pourront prendre leur retraite après 42 ans de carrière, soit à 60 ans. En plus d'un bonus de pension pour ceux qui restent au-delà de l'âge légal de la retraite, il y aura par ailleurs un malus de pension pour ceux qui partent plus tôt.  

Prenons l'exemple de Marie, bientôt retraitée. À 67 ans, âge légal, elle touche une pension de 1.500 euros. Si elle a travaillé 42 ans avec 156 jours de travail effectif par an, elle peut prendre une pension anticipée.

Si elle veut partir deux ans plus tôt sans avoir travaillé suffisamment, elle aura une pension moins élevée, soit 1.440 euros par mois, 2% en moins pour chaque année de pré-pension. En revanche, si elle décide de travailler jusqu'à 70 ans, c'est l'effet inverse, elle recevra un bonus financier, sa pension est augmentée de 2% pour chaque année supplémentaire, soit 1.590 euros par mois.

Si elle est fonctionnaire ou indépendante, sa pension sera calculée comme pour un salarié. Et si Marie travaille à la SNCB ou à la police, elle ne pourra plus partir à la retraite à 55 ans, c'est la fin des régimes spéciaux.

Enfin, les salaires et conditions de travail des agents pénitentiaires seront revalorisés.

Chômage

Les allocations de chômage seront limitées dans le temps, mais pas pour les plus de 55 ans. Les personnes qui perdent leur emploi recevront néanmoins dans un premier temps, des allocations légèrement plus élevées. En outre, les personnes seront guidées plus activement vers un nouvel emploi. 

Prenons l'exemple de Jonathan, chômeur. Plus il restera sans travail, plus son allocation de chômage diminuera dans le temps. Et il ne la touchera plus après deux ans. Seule exception à cette règle s'il a plus de 55 ans avec une longue carrière.

Objectif du gouvernement : "accroître l'écart entre le travail et l'inactivité de 500 euros net".

Quid des soins de santé ? 

Dans les années à venir, 3,9 milliards d'euros en plus de l'index seront investis dans le secteur des soins de santé. Le système du tiers payant sera étendu et un nouvel accord social bénéficiera au personnel. Si vous avez mal au dos grâce au régime de tiers payants, par exemple, vous ne devrez plus avancer les frais de votre consultation chez le kinesithérapeute. C'est la sécurité sociale qui prendra en charge votre consultation. Et si vous devez consulter votre kinesithérapeute, vous n'êtes pas obligé de passer directement par votre médecin pour une prescription uniquement pour les troubles légers. Aussi, pour faire face à la pénurie de spécialistes, le futur gouvernement souhaiterait notamment augmenter le nombre de médecins et de dentistes et souhaite rendre attractif le métier des infirmiers.

Comme prévu, les malades de longue durée feront l'objet d'un suivi renforcé afin de les remettre au travail quand c'est possible. Les mutuelles devront "assumer la responsabilité d'un suivi plus strict", a précisé Vooruit. Les employeurs seront également "mis devant leurs responsabilités". La suppression du certificat médical pour une absence d'un jour des employés des grandes entreprises sera maintenue. Un système de crédit familial sera mis en place en matière de congé parental.

La suppression du Sénat

Dans le volet de l'accord de gouvernement consacré à la démocratie, l'élément qui saute aux yeux est la volonté de supprimer le Sénat, de manière "intégrale et immédiate". Les modifications de Constitution nécessaires seront votées dès le début de la législature, promet l'accord dans son chapitre intitulé "renforcement de la démocratie et de l'État de droit".

Il pourra être envisagé d'intégrer du personnel du Sénat "dans divers autres services publics", précise le texte, tandis que la fusion de ses services avec ceux de la Chambre doit se concrétiser sans attendre.  

Si on fait des économies partout, ce sera également le cas à la Chambre, annonce l'Arizona: on coupe dans les dépenses pour l'indemnité de sortie des parlementaires, en réduisant sa durée (52 semaines maximum). On va aussi économiser dans l'indemnisation pour les malades de longue durée, et la rémunération des membres du Bureau et des présidents de commission ne sera plus au forfait, mais en fonction des présences.  

La dotation des partis ne sera pas indexée durant la législature.  

Suppression de la "sonnette d'alarme"

Un élément intrigant figure au même chapitre, avec fort peu de détails: l'Arizona indique vouloir tout simplement "supprimer" le mécanisme dit de la "sonnette d'alarme". "Depuis la création de la Cour constitutionnelle", elle "ne répond plus aux réalités politiques et institutionnelles actuelles", constate brièvement l'accord.  

L'accord prévoit une concertation et coopération "active" entre le gouvernement fédéral et ceux des entités fédérées. Le Comité de concertation, avec le Premier et ses vice-Premiers, ainsi que deux représentants par Communauté et par Région, "se réunira plus régulièrement dans le but de mieux aligner les politiques tout en respectant les compétences de chacun".  

Les Régions devraient avoir davantage leur mot à dire quant à l'action du fédéral: via leur gouvernement, elles pourront "suggérer des modifications" à toute règle qui relève du fédéral. Si le fédéral ne souhaite pas y donner suite, il devra motiver son refus.  

Au niveau des élections, l'Arizona prévoit d'étendre aux élections régionales le droit de vote des Belges résidant à l'étranger. Le vote en case de tête ne devrait plus avoir d'effet dévolutif, seuls les votes de préférence réels étant retenus pour le score personnel de chaque candidat.

Autres mesures importantes

En matière de politique migratoire, des mesures seront prises pour limiter les arrivées et accélérer les procédures de retour. Le regroupement familial sera plus strict. Un service spécial sera mis en place pour aider les enfants plus rapidement. Les familles avec enfants ne pourront pas être détenues dans des centres fermés, un acquis obtenu sous la législature passée.  

En matière de Défense, le recrutement de personnel se poursuivra et un "service militaire volontaire" de 12 mois verra le jour. Des investissements seront réalisés dans des équipements plus modernes tels que la défense antiaérienne, les drones et la cyberdéfense.

Un plan d'action national sera mis en place pour la sécurité dans les gares, en particulier celle de Bruxelles-Midi, ainsi qu'une tolérance zéro pour les drogues. La lutte contre la drogue en général sera renforcée par un service spécialisé dans les enquêtes fiscales et financières afin de suivre les flux d'argent criminel.

Des réformes éthiques sont également mises en œuvre. L'anonymat des donneurs d'ovules et de sperme disparaîtra, de sorte que les enfants qui le souhaitent puissent connaître leurs origines. Un cadre juridique sera aussi mis en place pour les mères porteuses, en interdisant d'en faire une activité lucrative. En ce qui concerne l'euthanasie, la déclaration préalable sera étendue aux personnes atteintes de démence. Le délai d'avortement sera prolongé, bien que les modalités concrètes doivent encore être approuvées ultérieurement par le gouvernement.

Enfin, la politique énergétique doit "concilier climat et pouvoir d'achat". Le gouvernement veillera à supprimer progressivement les subventions aux énergies fossiles et à mettre en place un "tax shift" (glissement fiscal) vers les énergies neutres en carbone. La TVA sur les pompes à chaleur passera à 6%, tandis que celle sur les chaudières à gaz et le charbon passera à 21%. En ce qui concerne le mix énergétique, le gouvernement étudiera si les centrales nucléaires existantes et de nouvelles centrales peuvent jouer un rôle. Des investissements supplémentaires seront également réalisés dans les parcs éoliens en mer.

Enfin, la taxe sur l'aviation sera plus élevée et les liaisons à grande vitesse entre les grandes gares ferroviaires et l'aéroport national seront améliorées.  

Les différentes mesures de cet accord doivent être présentées par les différents partis à leurs membres aujourd'hui et demain lors de congrès internes. Ensuite, on devrait connaître le casting ministériel et Bart De Wever pourrait déjà prêter serment dès lundi.
 

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