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L'Agence mondiale antidopage (AMA), au coeur d'une affaire liée aux tests positifs de 23 nageurs chinois en 2021 qui ébranle le monde de l'antidopage, a désigné jeudi un procureur indépendant pour examiner sa gestion du dossier, à trois mois des Jeux olympiques de Paris.
Parallèlement, l'agence va lancer "sous peu" un audit de conformité en Chine pour "évaluer l'état actuel de son programme antidopage", a-t-elle ajouté dans son communiqué.
L'AMA fait face à des critiques depuis que des médias ont révélé le week-end dernier que des nageurs chinois avaient été contrôlés positifs à la trimétazidine (TMZ) - qui peut améliorer les performances - avant les Jeux olympiques de Tokyo en 2021, mais n'avaient pas été sanctionnés.
L'AMA a expliqué avoir accepté l'argument des autorités chinoises selon lequel cela avait été causé par une contamination alimentaire.
"L'intégrité et la réputation de l'AMA sont attaquées", a de nouveau dénoncé Witold Banka, son président. "Nous continuons de rejeter les fausses accusations et nous sommes heureux de pouvoir confier ces questions à un procureur expérimenté, respecté et indépendant", a-t-il ajouté.
La décision de nommer Eric Cottier, procureur suisse à la retraite, a été prise à l'unanimité du comité exécutif qui s'est réuni virtuellement spécialement jeudi.
Ce dernier va bénéficier "d'un accès complet et sans entrave à tous les dossiers et documents de l'AMA relatifs à cette affaire" et doit rendre ses conclusions dans un délai de deux mois, explique l'AMA.
Il a pour mission d'évaluer s'il y a eu un quelconque parti pris en faveur de la Chine, "une ingérence indue ou une autre irrégularité" dans le traitement de l'affaire.
Le procureur, qui a été procureur du canton de Vaud (ouest de la Suisse) pendant 17 ans jusqu'à sa retraite en 2022, devra également déterminer si le choix de ne pas faire appel de la décision de la Chinada était raisonnable.
- "Traiter l'affaire avant les JO" -
Depuis samedi, l'affaire interroge sur la transparence et l'équité de l'antidopage mondial, déjà secoué il y a quelques années par la rocambolesque tricherie d'un autre géant sportif: la Russie.
Le rôle de l'AMA, dont le siège se trouve à Montréal, consiste notamment à contrôler la légalité des procédures des agences antidopage. Elle a la possibilité de saisir le Tribunal arbitral du sport (TAS) pour contester une décision d'une agence antidopage, ce qu'elle a par exemple fait dans le cas de la patineuse russe Valieva.
Très remontée, l'Agence antidopage des Etats-Unis (Usada) a notamment réclamé mardi une refonte de l'AMA et une enquête indépendante sur cette affaire.
Elle a appelé "les gouvernements et le mouvement sportif à réformer l'AMA pour assurer qu'il ne soit plus jamais possible d'étouffer des échantillons positifs à la veille de Jeux olympiques".
Pékin a qualifié lundi de "fallacieuses" les allégations de dopage par la voix du porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Wang Wenbin.
Concernant l'inspection prévue prochainement en Chine, l'AMA a annoncé qu'elle allait "inviter un certain nombre d'auditeurs indépendants issus de la vaste communauté antidopage à se joindre à l'équipe d'audit pour cette mission".
Cette visite fait partie de son programme régulier de surveillance de la conformité, selon l'AMA.
"Alors qu'aucun élément de preuve n'a été présenté pour étayer les allégations formulées contre l'AMA, nous souhaitons traiter cette affaire aussi rapidement et aussi exhaustivement que possible afin qu'elle soit correctement gérée avant les prochains Jeux olympiques et paralympiques de Paris", a expliqué Olivier Niggli, le directeur général du gendarme de l'antidopage.
Par le passé, plusieurs scandales de dopage ont éclaboussé la natation chinoise.
Aux Jeux asiatiques de 1994, à Hiroshima (Japon), sept nageurs chinois avaient été contrôlés positifs aux stéroïdes.
En 1998, la nageuse Yuan Yuan avait été bannie après que les douanes australiennes eurent découvert de grandes quantités d'hormone de croissance dans ses bagages lors des Mondiaux à Perth.