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Abonnement WISTER non désiré via facture Proximus: Mohamed a perdu 60€ et appelle ça "une escroquerie"

Les 'services fournis par des tiers', mais facturés via l'opérateur de téléphonie mobile, constituent un problème pour le médiateur télécoms, qui reçoit des centaines de plaintes chaque année. Mohamed, de Liège, dit être une nouvelle victime parmi d'autres d'un business toujours aussi louche.

Nous vous avons déjà parlé à plusieurs reprises des abonnements suspects apparaissant sur certaines factures d'opérateur téléphonique. Les histoires de Martine, Dorian ou Soumaya datent d'il y a quelques années: on pensait donc que c'était de l'histoire ancienne, que cet étrange business avait pris fin.

Mais il n'en est rien. Mohamed a contacté la rédaction de RTL INFO récemment car il a été victime de ce même procédé. "Wister arnaque les gens en souscrivant un abonnement pour vous, sans demander votre avis. Ça fait des mois que je me fais arnaquer via mon abonnement Proximus", nous a-t-il écrit via le bouton orange Alertez-nous.

Les sites de streaming, des endroits à éviter

Mohamed a 23 ans et habite dans la région de Liège. Le début des problèmes avec Wister, il croit s'en souvenir. Ça remonte à l'été dernier.

"Je suis fan de foot, donc je regarde souvent des sites de streaming de matchs". Des sites généralement illégaux, et qui n'ont donc aucun scrupule à envahir l'utilisateur de publicités un peu louches, de pop-ups encombrants, etc.

"J'ai cliqué sur des messages pour les effacer, je pensais que c'était lié au site sur lequel j'étais. Mais visiblement, c'était un piège. Ils m'ont abonné directement, ils ont trouvé mon numéro de téléphone, je ne sais pas comment".

Peu de temps après, Mohamed reçoit un SMS, "en provenance d'un numéro à 4 chiffres". Ce message est étrange, "car il dit: 'Vous êtes abonnés à ce service', et puis il y a un lien. J'ai appuyé sur le lien, car je me demandais ce que c'était". Sans le savoir, il a confirmé son abonnement, comme le veut la procédure (bien entendu, le SMS aurait du indiquer: "Pour confirmer votre abonnement, veuillez cliquer sur ce lien").

Facturé pendant des mois

Notre jeune témoin liégeois n'a pas du tout compris ce qui se passait. "C'est seulement après trois mois que je m'en suis rendu compte. En fait, j'étais abonné à Wister sans le savoir, et c'était 5€ par semaine ! Je pensais que c'était des suppléments parce que j'avais dépassé mon forfait 4G, mais non…"

Donc "au lieu d'avoir une facture à 25 euros, j'avais des factures à 45 euros". Trouvant ça un peu louche, il les a examinées, et a compris d'où ça venait :

Mohamed se renseigne sur internet, et constate que de nombreuses personnes se plaignent d'une arnaque similaire. Il appelle Proximus, qui répond "qu'ils ne sont pas responsables des services de tiers". Notre témoin trouve ensuite le numéro de Wister, et appelle: "Ils m'ont dit que c'était normal, que je m'étais abonné à leurs services. Et qu'en cliquant sur un lien, j'avais donné mon approbation directement, sans même recevoir un contrat ou quoi que ce soit".

Il s'est désabonné par téléphone, et a fait une croix sur les 60€ perdus (5€ x 12 semaines). Mais il trouve ces méthodes scandaleuses. "Moi, j'appelle ça une escroquerie".

Il n'y a rien de gratuit dans la vie

Quel est le concept de Wister ?

Le site de Wister est assez approximatif: l'entreprise se présente comme 'le spécialiste du divertissement sur mobile avec facturation sur l'opérateur de téléphonie'.

Wister existe "depuis 17 ans", nous a confié Rachel Watkin, responsable de la communication. "On est à Paris, et on a pignon sur rue. Historiquement, on était sur les 'portails' des opérateurs français, et on a commencé sur la partie 'charme'. En Belgique aussi, avec les opérateurs, on est sur des vidéos adultes". Le rôle de Wister n'est pas de réaliser ce type de contenu, mais d'être "un éditeur de services".

Pour faire simple, Wister est un intermédiaire entre des fournisseurs de contenus payants (à côté de la catégorie 'adulte', "il y a aussi des vidéos d'apprentissage, d'information, de cuisine, etc"), et le client final. "On se rapproche des fournisseurs de contenus, et toute notre plus-value, c'est la facturation opérateur, qui permet de vendre ces contenus plus facilement. Et en amont, notre métier est également de faire de la publicité".

La procédure officielle pour s'abonner ? "Le parcours d'achat n'est pas habituel, car on ne doit pas sortir la carte de crédit. Nous, on fait de la publicité. La personne clique sur une bannière, ou un lien, par exemple sur un pop-up". Vous avez bien lu: impossible de s'abonner directement aux contenus payants auprès du fournisseur original ou via le site de Wister ; ça passer par une bannière publicitaire... "Là, il y a une première page d'achat, où on explique ce que la personne va acheter, à quel prix, et avec un renouvellement toutes les semaines. Ensuite, si la personne est d'accord, elle clique sur le bouton d'achat du genre ('Confirmer le paiement'). Elle arrive alors chez l'opérateur, où il y a une deuxième page de confirmation de tout ce que la personne va acheter. Donc au bout de ces trois clics, l'abonnement est pris. Le client a accès à ces contenus, et il a un SMS de confirmation d'achat pour lui rappeler qu'il s'est abonné". Pour Mohamed, seule la dernière étape s'est vérifiée, pas les autres. Il nous l'a certifié: après, c'est sa parole contre la procédure officielle décrite par Wister.

Les abonnements indésirables ? "On a une petite partie de clients qui reviennent vers notre service en disant qu'ils n'avaient pas conscience d'avoir effectué un achat. On ne remet pas en cause cette bonne foi, même si parfois certaines personnes sont mal à l'aise vis-à-vis de leur compagne. Ou alors elles n'avaient pas le téléphone dans les mains car elles l'avaient donné à un enfant, par exemple. Il y a peut-être des gens qui ne se rendent pas compte, car ils ne lisent pas, ils vont vite et encore plus vite car dans notre domaine (le visionnage de contenu adulte), ils sont parfois un peu 'psycho-pressé', et ça peut être de l'achat impulsif".

N'est-ce pas un peu bizarre de payer 5€/semaines pour des vidéos qu'on trouve d'habitude gratuitement et facilement ailleurs ? "Non, les médias aussi font payer leur contenu, ou une partie de leur contenu. Il n'y a rien de gratuit dans la vie. Les vidéos qu'on propose, on ne les retrouve pas ailleurs. Et notre travail de recherche, de sélection, d'édition, il a aussi un coût".

"Kardashtube"

L'entreprise française nous a détaillé le parcours d'abonnement de Mohamed, qui d'après elle se serait "abonné" à Kardashtube, une page web très sommaire reprenant des vidéos 'people' liées à la famille Kardashian. L'URL est Cloudvideo.net, un domaine dont le propriétaire est... Wister. Mohamed aurait confirmé plusieurs fois la prise de l'abonnement, qui se fait sans entrer son numéro de téléphone mais en acceptant la facturation Proximus :

Wister montre patte blanche dans cette affaire par rapport à la procédure : Mohamed a probablement appuyé plusieurs fois sur "Confirmer" pour pouvoir accéder à son match de foot en streaming illégal, sans faire attention à ce qu'il faisait, et pensant fermer des pop-ups. Il a également reçu des SMS de confirmation qui aurait du l'alerter, et Wister utilise un outil permettant de prouver que le 'clic' est authentique. 

Mais on ne peut s'empêcher de se poser des questions sur les contenus proposés (qui veut VRAIMENT payer 5€/semaine pour voir des vidéos d'actualité sur les Kardashian ?) et sur le concept initial de Wister, qui repose finalement uniquement sur la facturation par opérateur. On ne peut s'abonner que via des bannières publicitaires alors que Wister héberge une partie des vidéos qu'il 'vend': si ces abonnements étaient vraiment intéressants, pourquoi limiter leur souscription à des bannières et de la facturation opérateur ?

Une facturation de 'service tiers' qui pose d'ailleurs problème depuis longtemps, vous allez le voir, et qui doit attirer votre attention: oui, on peut s'abonner et se faire débiter (via la facture de l'opérateur) sans donner de coordonnées bancaires, sans utiliser PayPal, et même sans entrer son numéro de téléphone (ce qui est d'ailleurs stupide, car ce serait le meilleur des garde-fous). Lisez donc toujours attentivement avant de cliquer sur n'importe quel bouton 'Confirmer'. 

17 ans de plaintes !

La facturation par les opérateurs de télécommunications de 'services fournis par des tiers' (comme Wister) a été en 2019, "pour la 17e année consécutive, à l’origine d’un nombre considérable de plaintes en médiation. En 2019, 730 plaintes ont été introduites auprès du service de médiation", selon le dernier rapport disponible du médiateur télécom. Et c'est sans compter tous ceux, comme Mohamed, qui ne prennent pas la peine de contacter le médiateur.

Dans la plupart des cas, "le démarchage est tellement agressif que", comme pour Mohamed, "un simple clic sur une bannière publicitaire en ligne suffit à activer un abonnement payant".

La réglementation a évolué en 2019, notamment, dans le but "de développer un marché sûr, fiable et transparent pour l’utilisateur de services mobiles. La publicité mensongère a, en théorie, été restreinte ; les services payants devraient, sur papier, pouvoir être activés uniquement sur demande expresse de l’utilisateur, qui, en outre, devrait se voir offrir une 'expérience d’achat complète'. À cet égard, la vente (imposée) de services via une bannière ou une fenêtre contextuelle n’est plus tolérée".

Dans la pratique, cependant, le cas de Mohamed prouve que ça ne suffit pas. Le médiateur fédéral le reconnait, il y a encore des abus, des problèmes et donc des centaines de plaintes.

Proximus pointé du doigt par le médiateur télécom

Le médiateur pointe expressément Proximus du doigt. "En 2019, le service de médiation a constaté que ce sont surtout les clients Proximus qui ont été impliqués dans un litige avec leur opérateur (…) Il semble que les autres opérateurs de télécommunications, comme Telenet Group et Orange, ont revu leur collaboration avec les exploitants dont les services payants étaient à l’origine d’un nombre trop élevé de plaintes, ce qui induit une évolution positive en termes de médiation".

Suite aux plaintes et aux interventions du médiateur télécom, "l'opérateur enquête et constate que l’exploitant (Wister, par exemple), soit ne collabore pas à l’enquête, soit que le cadre réglementaire n’a pas été respecté, suite à quoi le plaignant est remboursé".

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