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Il a un nom, un visage, mais il court toujours: la chasse à l'homme se poursuit jeudi pour arrêter Cherif Chekatt, le suspect numéro 1 de l'attentat du marché de Noël de Strasbourg, qui reste fermé. La police nationale a lancé mercredi soir un appel à témoins pour retrouver l'homme le plus recherché de France, après une attaque qui a fait trois morts et treize blessés dont un en état de mort cérébrale.
L'individu y est décrit comme "dangereux". "N'intervenez pas vous-même", écrit la police qui demande aux éventuels témoins de se manifester auprès de ses services au plus vite.
Entre temps, "quatre proches" de l'auteur présumé de l'attaque, "ont été placés en garde à vue cette nuit", a annoncé mercredi le procureur de Paris, Rémy Heitz, lors d'une conférence de presse au tribunal de grande instance de Strasbourg. "Ces gardes à vue sont toujours en cours", a précisé le chef du parquet antiterroriste. Alors que la police est toujours à la recherche du suspect, "plusieurs perquisitions ont été réalisées cette nuit dans des lieux que celui-ci est susceptible de fréquenter", a ajouté le magistrat. Parmi les quatre proches arrêtés, figurent deux frères du présumé tueur selon le journal Le Figaro.
L'homme aurait crié "Allah Akbar" lorsqu'il a tiré dans le centre-ville à proximité du marché de Noël dans le secteur de la rue des Grandes Arcades et de la rue des Orfèvres. "Le terrorisme a une nouvelle fois frappé le territoire nous rappelant que la menace est bien réelle", a déclaré le procureur lors de sa conférence de presse. "Une enquête a été ouverte des faits d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste, de tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste et d'association de malfaiteurs terroristes en vue de préparer des crimes d'atteinte aux personnes", a ajouté le procureur.
Le bilan de la fusillade est lourd. Deux personnes sont décédées. Une troisième se trouve actuellement en mort cérébrale. Douze personnes sont blessées dont six en état d'"urgence absolue".
Un frère recherché
Les services de sécurité allemands sont également à la recherche de Sami C., le frère de l'auteur présumé de la fusillade à Strasbourg mardi soir, indique mercredi le journal Tagesspiegel. Les deux hommes vivent à Strasbourg, selon le quotidien. Les frères sont considérés comme radicalisés et appartiendraient au milieu islamique de Strasbourg, précise un haut responsable de la sécurité au journal.
LA CHASSE À L'HOMME
Plusieurs centaines de membres des forces de sécurité étaient mobilisées dans la nuit de mardi à mercredi pour tenter de retrouver l'auteur en fuite de la fusillade qui a fait au moins trois morts mardi soir sur le Marché de Noël de Strasbourg, alors que le gouvernement décidait de placer la France en "urgence attentat".
Quelque 350 personnes, dont 100 membres de la police judiciaire, des militaires et deux hélicoptères, sont aux trousses de l'assaillant, a indiqué le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner lors d'une déclaration depuis la préfecture du Bas-Rhin à Strasbourg, où il a été dépêché par le président Emmanuel Macron.
La police allemande contrôlait mercredi plusieurs points de passage à la frontière française. Les travailleurs frontaliers étaient confrontés à un rallongement du temps de parcours jusqu'à 1h30.
LES FAITS DE MARDI SOIR
Le tueur a frappé en trois points de la ville
Mardi soir, "à partir de 19h50", le tireur a ouvert le feu et "semé la terreur" en "trois points" de Strasbourg, a déclaré M. Castaner sans dévoiler son identité. Un Italien figure parmi les blessés graves de cette fusillade. Selon plusieurs médias italiens, il s'agit d'un journaliste de 28 ans qui était à Strasbourg pour couvrir l'assemblée plénière au Parlement européen.
Blessé lors d'échange de coups de feu avec la police, il prend la fuite
"Entre 20h20 et 21h", l'assaillant a par deux fois échangé des coups de feu avec les forces de sécurité avant de s'enfuir, a encore expliqué Christophe Castaner.
Lors de sa conférence de presse de mercredi midi, le procureur de la République Rémy Heitz a précisé que dans sa course, le suspect avait fait face à 4 militaires de l'opération Sentinelle. Il a alors essuyé des tirs de riposte qui l'ont blessé au bras. L'assaillant a ensuite quitté les lieux peu après 20h à bord d'un taxi qui l'a déposé dans un quartier situé à proximité, une dizaine de minutes plus tard. Entendu comme témoin, le chauffeur de taxi a indiqué que le suspect avait demandé de le conduire dans le quartier sans lui donner d'adresse. Le chauffeur de taxi a précisé l'avoir vu avec une arme de poing et présentant des blessures. Le suspect a alors expliqué au chauffeur qu'il avait tiré sur des militaires et tué "10 personnes". Une fois descendu du taxi, le suspect a croisé des fonctionnaires de police. S'en est suivi un nouvel échange de tirs.
"On a entendu plusieurs coups de feu, trois peut-être, et on a vu plusieurs personnes courir. L’une d’elles est tombée, je ne sais pas si c’est parce qu’elle a trébuché ou parce qu’elle a été touchée. Les gens du bar ont crié 'ferme, ferme' et le bar a été fermé", a raconté un témoin joint par l'AFP et confiné dans son appartement.
Le tueur, 29 ans, fiché "S", connu de la justice en France et en Allemagne
M. Castaner a précisé que l'individu était "très défavorablement connu pour des faits de droit commun, pour lesquels il a déjà fait l'objet de condamnations en France et en Allemagne et pour lesquels il a purgé ses peines".
Selon une source proche du dossier, le suspect, un homme de 29 ans fiché "S", devait être interpellé mardi matin par les gendarmes dans une enquête de droit commun.
Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour "assassinats, tentatives d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste et association de malfaiteurs terroriste criminelle".
"Urgence attentat"
Après cette attaque le gouvernement a porté le niveau du plan Vigipirate à "urgence attentat", a annoncé le ministre de l'Intérieur.
Cette mesure comprend "la mise en place de contrôles renforcés aux frontières, et des contrôles renforcés sur l'ensemble des marchés de Noël en France pour éviter le risque de mimétisme", a-t-il poursuivi. "Il y aura aussi en complément une mobilisation plus forte encore du dispositif sentinelle sur l'ensemble du territoire".
Dans la soirée, le chef de l'Etat a exprimé sur Twitter la solidarité de la "nation tout entière" après avoir présidé à Beauvau une réunion de crise interministérielle en présence du Premier ministre Edouard Philippe.
Marché de Noël de Strasbourg sous haute surveillance
Le traditionnel marché de Noël de Strasbourg avait fait l’objet d’un projet d’attentat en décembre 2000. Il est protégé en permanence par un important dispositif de surveillance. Environ 260 policiers nationaux sont notamment mobilisés.
En décembre 2016, le marché de Noël de Berlin avait été visé par un attentat au camion-bélier revendiqué par le groupe État islamique qui avait fait douze morts.
Après l'attaque de mardi soir, la "Grande Ile", le centre historique de Strasbourg, a été entièrement bouclée par les forces des l'ordre.
Selon la préfecture, les mesures de confinement avaient été levées dans la nuit et l'accès au centre-ville était de nouveau possible à partir de 2H00.
Dans les rues quasiment désertes, quelques personnes rentraient chez elles. La rue des Grandes Arcades, où l'attaque s'est en partie passée, était bloquée par des rubalises avec des policiers armés en empêchant l'accès.
La Première ministre britannique Theresa May s'est dite "choquée et attristée par la terrible attaque", tandis que le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert, s'est dit "bouleversé par les terribles informations de Strasbourg". Le vice-premier ministre italien Matteo Salvini, ancien député européen, a assuré de son "engagement total pour que les terroristes soient débusqués, bloqués, éliminés, en Europe et dans le monde, par tous les moyens licites nécessaires".
Deux attaques terroristes cette année en France
Cette fusillade intervient alors que la France vit sous une menace terroriste élevée depuis la vague d'attentats jihadistes sans précédent qui a fait 246 tués depuis 2015.
La France a été frappée deux fois cette année au cours d'attaques qui ont fait cinq morts.
Le dernier a succombé à une attaque au couteau menée par Khamzat Azimov, assaillant de 20 ans abattu par la police, dans le quartier touristique de l'Opéra, à Paris, le 12 mai 2018.
La précédente attaque s'était produite le 23 mars à Carcassonne et à Trèbes (Aude): dans son périple meurtrier, Radouane Lakdim, un délinquant radicalisé de 25 ans, avait volé une voiture à Carcassonne dont il avait abattu le passager et blessé le conducteur par balles. Il avait ensuite tiré sur des policiers devant leur caserne avant d'entrer dans un supermarché à Trèbes où il avait tué un boucher, un client ainsi que le lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame qui s'était offert comme otage à la place d'une femme.
Des gilets jaunes évoquent un complot
L'attaque de Strasbourg intervient en pleine crise des "gilets jaunes" en France. Mardi soir, sur une page Facebook annonçant un "Acte V" des manifestations samedi, certains évoquaient une "manipulation" de l'Etat ou "un soi-disant attentat".