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Quand il était petit, on l'appelait Mimi. Plus tard, ce fut Chouchou. Un beau jour, il a choisi Michou. Vêtu de bleu de pied en cap, Michou, décédé dimanche à l'âge de 88 ans, a été une figure incontournable de Montmartre, grâce à son célèbre cabaret parisien transformiste.
Tous les soirs, pendant soixante ans, il était sur scène pour lancer le show qui a fait sa renommée.
Bien avant la mode des "drag queens", Michou a ouvert la voie en France au transformisme de divertissement en proposant le premier spectacle de l'après-guerre constitué d'hommes se travestissant en femmes pour caricaturer les vedettes de l'époque.
Nous adorons nos victimes et elles le savent bien. Dalida adorait venir
Depuis 1956, son minuscule cabaret, devenu référence internationale en la matière et qui a inspiré "La Cage aux folles" à Jean Poiret, ne désemplit pas.
Outrageusement maquillées, ses "Michettes" amusaient chaque soir, sur la plus petite scène de Paris, les clients en interprétant après le dîner les stars du moment, "mais sans se moquer !", disait Michou à l'AFP.
"On ne les singe pas. Il n'y a jamais de vulgarité. J'y tiens depuis toujours", ajoutait l'homme à la silhouette éternellement bleue, lunettes assorties et permanente blonde reconnaissable entre toutes.
"Il y a beaucoup de respect dans nos caricatures. Nous adorons nos victimes et elles le savent bien. Dalida adorait venir se voir plus délirante que jamais!", se félicitait "l'homosexuel le plus connu de France", selon ses termes.
"Je suis populaire et ça me rend très heureux. J'ai la chance d'être un homosexuel notoire et aimé. Partout, on me reconnaît et on me salue avec beaucoup de gentillesse", soulignait cet exubérant "gars du Nord", adepte de l'auto-dérision, débarqué à Paris à 17 ans en 1948.
Le début de l'histoire
Pour le Mardi-Gras 1956, Michel Catty pour l'état-civil qui gère alors un simple bar au 80 rue des Martyrs, lance un défi à deux amis: se travestir en femmes célèbres pour un soir.
Michou choisit Brigitte Bardot. Le succès est immédiat: dès le lendemain, le trio recommence, bientôt rejoint par d'autres "Michettes", serveurs et barmen avant de troquer chaque soir le tablier pour leurs habits de lumière, perruques et faux-cils.
"A l'époque, il fallait être inconscient et ambitieux!", estime Michou. "Je n'ai finalement pas eu de problèmes et la machine était lancée. Depuis longtemps, je rêvais d'un endroit de fête où l'on s'amuse vraiment. J'avais enfin trouvé la recette!".
Michou, icône la plus populaire des nuits parisiennes, et son cabaret sont devenus des symboles français, aussi prisé que le Moulin-Rouge, le Lido et le Crazy Horse.
Figure du show-biz au style exubérant, Michou, fait chevalier de la Légion d'honneur en 2005, n'a jamais oublié ses origines modestes: il invitait chaque mois dans son cabaret les personnes âgées de Montmartre.
Pour ses 80 ans, ce grand amateur de champagne (sa "fontaine de jouvence", à raison de deux bouteilles par jour) avait organisé un spectacle sur la scène du Trianon à Paris. De nombreuses personnalités, de Jean Paul Gaultier à Nana Mouskouri, avaient répondu présent pour célébrer "le prince bleu de Montmartre", titre de ses mémoires parues fin 2017.
Il voulait que son cabaret s'arrête à sa mort
Il y révélait ses dernières volontés: être enterré dans un cercueil bleu et que le cabaret à son nom s'arrête à sa mort.
"Je veux que cette maison disparaisse avec moi. Cela peut paraître prétentieux, mais le cabaret ne me survivra pas", confiait-il à 87 ans.
De Michou, Jacques Brel, qui a été l'un de ses plus proches amis, a dit un jour à Bernard Dimey, auteur de chansons : "Je l'aime beaucoup, parce que c'est un homme, un vrai et que dans la vie, on n'en rencontre pas tellement".