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Des exportations vers les Etats-Unis plombées par la taxe américaine sur Airbus, un marché chinois en régression et des ventes britanniques incertaines en raison du Brexit : le vin de Bordeaux traverse une zone de turbulence.
"Le marché (américain) est en train de se ralentir très fortement, de s'arrêter pour certains exportateurs" dans le Bordelais, comme d'autres vignobles français, a déclaré lundi à la presse le président du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB), Bernard Farges.
Il venait de tenir une réunion destinée à sensibiliser les parlementaires girondins à la création d'un fonds de compensation "pour neutraliser ces taxes".
Cette taxe américaine liée au conflit Airbus/Boeing signifie "surtout une diminution des ventes parce qu'un produit qui vaut 10 passe d'un seul coup à 12,5. Donc, C'est moins d'exportation", explique M. Farges.
A cela, s'ajoute "la baisse des ventes en Chine" où les vins de Bordeaux subissent la rude concurrence des vins de l'Australie et du Chili qui "entrent sans taxe sur le marché chinois" depuis que des accords commerciaux ont été conclus avec ces pays ces dernières années.
Pour couronner le tout, "c'est très incertain sur le Royaume-Uni" avec le Brexit, a-t-il développé.
Depuis 2018, les vins de Bordeaux perdent des marchés avec une baisse des ventes de 15%, aggravée par cette "taxe Airbus" de 25% instaurée en octobre dernier.
En novembre, leurs ventes ont chuté de 46% en valeur aux Etats-Unis, deuxième marché à l'exportation, une conséquence de cette taxe qui touche surtout les vins non pétillants de moins de 14% d'alcool.
Cela cible particulièrement les Bordeaux alors qu'au niveau national, les exportations françaises vers les Etats-Unis, représentant un milliard d'euros en 2018, ont connu pour le même mois de novembre une baisse de 15% des volumes vendus vers ce pays, premier marché d'exportation, et de 21% en valeur.
- "Déjà des faillites" -
"Nous avons des contacts et des relations avec les différents ministères : l'Agriculture, un peu absent du sujet, le ministère de l'Economie, Matignon, l'Elysée, mais rien ne se passe. Certes la taxe Gafa (de la France sur les géants du numérique, qui a entrainé des menaces américaines de sanctions sur des produits français) est repoussée, mais surtout ça ne règle rien sur le sujet de la taxe Airbus", a poursuivi M. Farges qui regrette le manque de "réponse rapide et efficace".
"Nous demandons un fonds de compensation franco-français" à hauteur de 300 millions d'euros et non européen, comme a proposé l'exécutif, a poursuivi M. Farges.
Pour Nathalie Delattre, sénatrice (Mouvement radical) et coprésidente de l’Association nationale des élus de la vigne et du vin (Anev), "aujourd'hui, nous sommes complètement abandonnés".
Pour les vignerons et négociants bordelais, les conséquences de la taxe américaine se font déjà sentir. Selon Cédric Coubris, président des Vignerons indépendants en Gironde et vice-président au niveau national, leur perte en France est estimée à 20 millions d'euros fin 2019 pour un chiffre d'affaires de 162 millions, selon une enquête à laquelle 600 adhérents ont répondu.
"Il y a déjà des faillites", assure-t-il, car aux "taxes de Trump s'ajoutent les foires aux vins qui ne marchent plus, les aléas climatiques..."
"La situation est très critique, nos affaires sont à l'arrêt, nos clients nous demandent de ne pas expédier de vin", a renchéri le négociant Georges Haushalter, dont les Etats-Unis sont le premier marché avec 20% du chiffre d'affaires.
"On peut être remplacé facilement sur le marché américain, la reconquête sera longue, coûteuse et difficile (...) Dans six mois, on sera mort", a-t-il poursuivi, estimant que "c'est la filière viticole qui paye l'amende à la place d'Airbus!"