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Violences sur des ados placés: jusqu'à sept ans de prison requis

Les "dysfonctionnements" de l'Aide sociale à l'enfance "ne doivent en rien diluer leur responsabilité pénale": jusqu'à sept ans de prison ont été requis vendredi à Châteauroux à l'encontre des principaux prévenus, jugés pour des violences sur des jeunes placés dans des familles sans agrément.

Les peines les plus lourdes, assorties d'un mandat de dépôt et 20.000 euros d'amende, ont été requises à l'encontre des têtes pensantes présumées du réseau, Julien M. et Bruno C., soupçonnés d'avoir brutalisé les adolescents.

"Nous pouvons placer le projecteur sur l'aide sociale et ses dysfonctionnements", a insisté la substitut du procureur Amélie Trochet. "Mais, le procès, ce sont eux. Ces dysfonctionnements ne doivent en rien diluer leur responsabilité pénale. Ce n'est pas l'ASE qui a, je reprends les mots de la procédure, pissé sur Matthias".

Contre les parents de Julien M., Colette et Antoine, qui auraient eu également des rôles-clé dans cette affaire, ont été demandées des peines d'un an d'emprisonnement et une amende de 50.000 euros, ainsi que la saisie de leurs biens sur la parcelle d'Azerables (Creuse).

Depuis lundi, 18 personnes au total comparaissent devant le tribunal correctionnel de Châteauroux, notamment pour violences, travail dissimulé en bande organisée, accueil de mineurs sans déclaration préalable, administration de substance nuisible ou usage de faux en écriture.

De 2010 à 2017, des dizaines d'enfants ont été confiés illégalement par l'Aide sociale à l'enfance du Nord à une structure d'accueil située dans l'Indre, qui ne disposait pas de l'agrément nécessaire.

Cette structure, "Enfance et Bien-Être", aurait ainsi perçu des sommes qui s'élèveraient à au moins 630.000 euros sur sept ans. Les jeunes ont été accueillis par des familles de l'Indre, de la Creuse et de la Haute-Vienne.

Contre l'ex-épouse de Julien M., trésorière de l'association, une peine de quatre mois de prison avec sursis et 20.000 euros d'amende a été réclamée.

- "Ils ont tous participé" -

A l'encontre des familles ayant accueilli sans agrément des jeunes et qui sont poursuivies notamment pour travail dissimulé, des peines plus légères allant de quatre mois de prison avec sursis à deux ans de prison ferme ont été requises.

"Ils ont tous participé, en bout de la chaîne peut-être, mais ils ont participé", a justifié la magistrate.

Selon l'enquête, l'affaire éclate en 2017 après l'hospitalisation pour "une chute à vélo" d'un des enfants, Matthias. Ce dernier refuse, après une semaine de coma, de retourner chez son bourreau présumé. Un signalement au parquet est alors effectué, qui a mis au jour des faits répétés commis depuis 2010.

Durant toute la semaine, les victimes ont livré des récits accablants. Elles ont été brutalisées, subissant pour la plupart des "coups, strangulations", des humiliations et des insultes.

Beaucoup d'entre elles ont également rapporté des "travaux forcés", "déscolarisées" pour s'atteler aux travaux de rénovation et de cimenterie des têtes de réseau.

Les principaux prévenus, Julien M. et ses parents en tête, ont cherché lors de leurs interrogatoires à minimiser les faits, évoquant des "recadrages" nécessaires, des "tapes", sur des "enfants difficiles" dont "personne ne voulait".

Grand absent du procès selon les parties civiles, l'ASE s'est aussi retrouvée au cœur des débats, "coupable" d'avoir placé ces jeunes chez des gens attirés par "l'appât du gain".

Mais aucun de ses responsables n'a été jugé, en dépit du témoignage criant d'un ex-éducateur, qui avait donné la charge de six jeunes à ce réseau.

"C'était dur, mais ça fait du bien. On a un poids qui s'est enlevé en parlant, de leur avoir fait face, ça fait du bien", avait déclaré jeudi à la barre l'une des adolescentes placées, Angelina, 19 ans.

"Il y aura un avant et un après Châteauroux, vous allez redonner une image d'humanité à ces enfants", a plaidé Me Myriam Guedj Benayoun, conseil de parties civiles.

Le procès se poursuit avec les plaidoiries de la défense et le jugement devrait ensuite être mis en délibéré.

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