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Une impression pour certains, une crainte pour l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS): la consommation d'alcool est-elle en train d'augmenter en flèche à cause du confinement ? Les Belges noient-ils leur angoisse dans la bière ou leur solitude dans le vin ?
La rédaction de RTL info n'a pas été assaillie de message en ce genre depuis le début du confinement. "Mon sentiment: je suis devenue presque alcoolique. J’en ai marre. Je vais péter un câble", est l'un des rares témoignages qui nous est parvenu, via Muriel, à la fin du mois de mars.
Mais peut-être que vous aussi, vous avez constaté que vous preniez plus souvent l'apéro, parfois à travers des vidéoconférences hasardeuses avec des amis. Le beau temps, l'angoisse et l'isolement sont quelques facteurs qui pourraient expliquer une hausse de la consommation d'alcool parmi la population confinée, soit quelques milliards de personnes à l'échelle mondiale.
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Les craintes de l'OMS
C'est ce que craint l'OMS, raison pour laquelle elle a émis un avertissement, surtout pour notre continent. "Non seulement l'alcool n'est pas un remède au coronavirus, mais il peut exacerber la vulnérabilité sanitaire, les comportements à risque, les problèmes de santé mentale et la violence", a dit en substance l'Organisation mondiale de la santé début avril.
Sa section européenne appelle les gouvernements à mettre en place des mesures pour limiter la consommation d'alcool. L'Europe est en effet la région qui consomme le plus de boissons alcoolisées. Elle est aussi celle où la prévalence des troubles liés à la consommation d'alcool est la plus élevée dans la population et où la proportion des décès causés par l'alcool est la plus haute.
La vente de partybox (cubis) est en augmentation, et avec une croissance à deux chiffres !
Que disent les chiffres ?
Nous avons demandé aux principaux acteurs de la grande distribution s'ils avaient constaté des augmentations ces dernières semaines. Les réponses sont parfois surprenantes et surtout, contrastées.
Première surprise du côté de Colruyt, poids lourds de la grande distribution en Belgique, et dont les magasins ont été assaillis dès le début de la crise, voire un peu avant. "Pour tout ce qui concerne les vins calmes et pétillants, les bières, les boissons fortes, la tendance générale est à la baisse depuis le début du confinement", nous explique Nathalie Roisin, responsable presse.
Des chiffres qu'il faut relativiser, estime-t-elle, "puisque le confinement implique l'annulation de toutes les fêtes familiales (communions, repas de Pâques...), dans les cercles d'amis (premiers barbecues) et les organisations (sportives, etc...)". Effectivement, pour les grandes quantités, les gens vont souvent au Colruyt.
Tendance à la baisse, mais il y a des exceptions: les Belges ont acheté beaucoup plus… de cubis de vin ! "La vente de partybox (cubis) est en augmentation, et avec une croissance à deux chiffres !". D'après Colruyt, c'est une question d'économie ("le vin en cubis est moins cher que 3 bouteilles") et de déplacements qu'on évite ("on consomme tout à la maison et on stocke car on se rend moins souvent au magasin, donc on y achète en plus grande quantité").
Colruyt constate également que "les bières spéciales connaissent un petit engouement ; elles sont habituellement consommées dans les cafés et restaurants, donc confinement oblige, les clients s'offrent ce petit plaisir à la maison".
Conclusion: "quand on prend le tout, les ventes d'alcool sont donc... stables chez Colruyt".
Chez Delhaize, ça augmente
Si la tendance est à la stabilité ou à la baisse du côté de Colruyt, c'est l'inverse dans les Delhaize. "On voit une augmentation légère", explique Roel Dekelver, responsable de la communication. Selon lui, "c'est lié au fait que l’horeca est fermé", tout simplement.
Au niveau des catégories de produits, les constats du Delhaize sont identiques à ceux du Colruyt: "plus de demande pour les bag-in-box (un autre nom pour les cubis…), avec une croissance de 20%; les bulles sont sous pression car les gens ne sont pas en mode festif ; mais globalement, il y a une augmentation des ventes pour les vins".
Quant aux bières, là aussi, ça grimpe: "+10% pour les pils et +20% pour les bières spéciales".
Les différents types de boissons alcoolisées sont en fait en bas de la liste
Carrefour évoque une augmentation générale du "panier", et légère pour l'alcool
Du côté du groupe d'origine française Carrefour, on reconnait une légère augmentation, mais on relativise: le Belge achète plus de manière générale, pas seulement pour l'alcool…
"Depuis le début de la crise du coronavirus, nous constatons une augmentation du panier moyen par rapport à la même période l'année dernière. Cette augmentation des ventes se constate aussi pour les boissons alcoolisées, mais de façon beaucoup moins forte", selon Ariane Goosens, du service de communication.
Donc l'alcool augmente un peu, mais nettement moins que tous les autres produits qu'on achète d'habitude. "Quand on dresse une liste de l'évolution des ventes par catégorie de produits, les différents types de boissons alcoolisées sont en fait en bas de la liste" et sans surprise, "les vins effervescents connaissent une baisse des ventes".
Conclusions
Non, les Belges ne sont pas tous devenus alcooliques depuis le début du confinement. Chez Colruyt, on parle de stabilité au niveau des ventes d'alcool, "avec une tendance à la baisse" due à l'absence d'évènements (les gens qui ont besoin de grande quantité privilégient traditionnellement cette enseigne).
Carrefour relativise: les gens remplissent davantage leur chariot (de papier toilette, farine et riz, entre autres), et l'augmentation des ventes d'alcool est au bas de la liste.
Seul Delhaize donne des chiffres plus précis: "augmentation légère sur le vin", avec notamment +20% sur les cubis ; +10% pour les simples bières et +20% pour les bières spéciales.
Ces trois acteurs de la grande distribution s'accordent à dire que les Belges n'ont plus envie de faire les fêtes: les vins effervescents (mousseux, Champagne, Cave, etc) sont en forte baisse !
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