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"On l'aide tant qu'on peut mais on ne roule pas sur l'or non plus." La sœur de Jeanne (nom d'emprunt) et son époux ne savent plus quoi faire pour "enrayer la spirale" dans laquelle est tombée Jeanne. Désireuse de faire un peu de place dans sa maison, la dame de 77 ans a décidé de vendre en ligne des articles de jardin dont elle ne se servait plus. Ainsi, un coupe-bordure mis en vente à 12 euros a fini par en coûter 3.000… à la vendeuse.
Sa sœur raconte: "Une personne l'a appelée en lui disant qu'elle était intéressée, que quelqu’un allait venir chez elle lui remettre l'argent en main propre." Mais pour ce faire, l'interlocuteur demande à Jeanne ses coordonnées bancaires. "Ils sont restés avec elle un long moment au téléphone. Elle a donné ses identifiants bancaires et tout est parti." Premier réflexe, porter plainte mais dans ce genre d'affaires, la plainte aboutit rarement faute d'identification des auteurs. Et dans ce cas-ci, les forces de l'ordre n'ont pas été aidées. "Elle n'a pas osé trop en dire, elle a trop honte de s'être fait avoir."
Des escrocs qui ont trouvé le filon
"Un matin, alors qu'elle était chez nous, elle a reçu un appel de la même personne", raconte la sœur. C'est là que les problèmes recommencent. "L'interlocuteur lui a expliqué que ce n'était qu'une erreur, que ce n'étaient pas des personnes mal intentionnées et que pour réparer cette erreur, il fallait reprendre le digipass." Ni une ni deux, une fois la pension de Jeanne versée, plusieurs virements consécutifs de 130 euros ont été effectués. "Jusqu'à ce qu'il ne lui reste que quelques euros sur le compte."
Ce que beaucoup de gens ignorent, c'est qu'ils ont le droit, dans certains cas, à un remboursement de la part de leur institution financière. Le remboursement est soumis à conditions. Si la première fois, Jeanne n'était pas éligible, elle devrait récupérer l'argent de la seconde escroquerie. Enfin une bonne nouvelle pour la famille. "On nous a dit qu'avec les virements consécutifs, la carte aurait dû être bloquée. Elle devrait récupérer cet argent dont elle a besoin." Pour l'instant, Jeanne s'en sort comme elle peut mais sa famille vit dans la crainte. "On a peur de tout, peur que ça recommence."
Ce n'est pas parce qu'on utilise les réseaux sociaux qu'on est parfaitement numérisé
Une fracture numérique toujours présente
"L'exclusion numérique est encore beaucoup plus présente que ce que l'on pense. Aujourd'hui, en Belgique, 4 personnes sur 10 sont considérées à risque", explique Geoffroy Van Humbeeck, créateur de la Fondation pour l'inclusion digitale. Cette fondation qui a vu le jour pendant la crise sanitaire, en distribuant du matériel dans les maisons de repos, met un point d'honneur sur l'accompagnement des personnes. "Ce n'est pas parce qu'on utilise les réseaux sociaux qu'on est parfaitement numérisé."
Une problématique qui n'est pas sans rappeler celle de Jeanne qui, non consciente des dangers de la vente en ligne, a été piégée. Pour Geoffroy Van Humbeeck, seniors et numérique ont malgré tout un avenir ensemble pour autant que cela soit bien fait. "Il y a beaucoup de choses que le numérique peut apporter aux personnes âgées. J'ai des retours de personnes qui disent que ça leur simplifie la vie."