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Après les fourmis, les cochons, les chats… qui ont été les stars de ses romans, Bernard Werber se penche à présent sur un nouvel animal. Les abeilles ne parlent pas mais elles sont au cœur de son trentième ouvrage. Pourquoi les abeilles, Bernard Werber ?
Parce que c’est une espèce en voix de disparition et je crois que nous sommes liés au destin des abeilles. Si nous ne les protégeons pas, nous sommes nous-mêmes en danger. Elles polonisent 80% des végétaux donc elles nous nourrissent. Nous mettons des insecticides partout et les frelons asiatiques sont en train de les massacrer. Je ne sais pas comment ça se passe en Belgique, mais cette année, en France, ça a été la plus basse production de miel, précisément parce que les ruches sont en train de disparaître.
Vous dites que si les abeilles disparaissent, les hommes vont aussi mourir. Le livre nous projette en 2053, les abeilles ont disparu, il fait 43 degrés sur la terre. En moyenne, la planète compte 15 milliards d’habitants et il y a une famine mondiale qui va tous nous éradiquer. C’est comme cela que vous voyez l’avenir ?
C’est un scénario possible mais l’histoire se passe de nos jours et le héros, voyant ce futur, se dit qu’il faut préserver les abeilles. Il va aller chercher dans le passé – et notamment dans l’époque du Moyen-Âge, en 1100 – le moment où les abeilles ont transmis la solution pour éviter ce scénario-là. En 1100, c’est la prise de Jérusalem par les Croisées et la création des Templiers. Le thème du roman, c’est le lien entre les Templiers et les abeilles.
Les chats, on sait que vous les connaissez très bien. Mais les abeilles, aviez-vous conscience de leur importance avant de vous mettre dans l’écriture profonde de ce roman ?
En écrivant ce roman, j’ai découvert plein de choses que je ne savais pas sur les abeilles. Déjà que le miel qu’on trouve dans le commerce est rarement du vrai miel. C’est souvent du miel importé de Chine qui est en fait du glucose dans lequel il n’y a pas une seule molécule issue de l’insecte. Et c’est en train d’envahir le marché, c’est ce miel pas cher que l’on trouve partout.
Elles font plus que produire miel ?
Les abeilles participent en réalité à tout notre écosystème. Imaginons un monde où il n’y a plus d’abeilles, c’est un monde où il y a un déséquilibre total dans tout l’écosystème terrestre.
Vous dites aussi qu’elles nous passent un message en termes d’organisation ?
De ce que j’ai compris en écrivant la prophétie des abeilles, c’est que leur mode de vie qui est très ancien – les abeilles sont sur terre depuis 120 millions d’années et l’homme depuis 3 millions d’années – est un système hyper efficace, ne serait-ce que l’architecture. Ces rayons que l’on copie notamment pour les skis en nid d’abeilles, c’est parce que c’est la structure la plus solide qui existe. La chimie à l’intérieur de la ruche – que ce soit la propolis, la gelée royale, la cire et évidemment le miel – ce sont des produits que l’homme ne sait pas fabriquer. Elles sont en même temps dans la chimie, dans l’architecture, dans l’organisation sociale… C’est un système qui marche. Et j’ai pris comme hypothèse que nous serons peut-être sauvés en les copiant.
C’est un livre qui vous permet d’afficher vos convictions ? Vous êtes engagés sur le plan climatique ?
Tout le monde est engagé sur le plan climatique. Ce que j’essaye de faire, c’est proposer des solutions originales en dehors de toutes celles que l’on entend partout, et notamment le système de régulation climatique de la ruche. En étudiant bien ce sujet précis, on s’aperçoit que les cités sont à la fois bien aérées et bien refroidies. C’est tout le temps la même température au sein de la ruche. Et mon idée, c’est que les templiers avaient déjà compris que les abeilles et la ruche étaient notre avenir idéal.
Mais vous n’avez pas choisi ce thème par hasard. Y a-t-il des messages que vous avez envie de faire passer comme écrivain engagé ?
Peut-être que l’une des idées, c’est de regarder tout simplement la nature. Je crois que toutes les formes de sagesse commencent par : "on s’arrête et on regarde comment a procédé la nature". Après, les systèmes de conventions et de technologies entre les hommes sont limités parce qu’on tourne en rond. Mais dans la nature, il y a plein de trouvailles et c’est ce que j’essaye de transmettre. C’est dire : "vous n’avez peut-être pas bien regardé. Ce qui se passe autour de nous est merveilleux et nous apporte des réponses à toutes les questions que nous avons".
La suite de son interview est à découvrir dans la vidéo ci-dessus…