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Nigeria : tirs en l'air et gaz lacrymogènes pour disperser les manifestations contre la vie chère

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Benson Ibeabuchi

Coups de feu en l'air, tirs de gaz lacrymogène : la police est intervenue dans plusieurs villes du Nigeria pour disperser des manifestations contre la mauvaise gouvernance et le coût de la vie, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Le pays le plus peuplé d'Afrique traverse une grave crise économique, à la suite de réformes mises en place par le président Bola Ahmed Tinubu, arrivé au pouvoir en mai 2023. L'inflation des denrées alimentaires dépasse les 40% et le prix de l'essence a triplé.

A Kano, la deuxième plus grande ville du pays, dans le nord, des manifestants ont tenté d'allumer des feux devant le bureau du gouverneur de l'Etat. La police a riposté en tirant en l'air et avec des gaz lacrymogènes, selon un correspondant de l'AFP sur place.

La foule a ensuite saccagé et incendié un bâtiment de la Commission des communications du Nigeria, près du bureau du gouverneur.

Selon la police, 13 personnes ont été arrêtées dans des zones de pillages et d’incendies volontaires à Kano, où un couvre-feu a été décrété pour 24H par le gouverneur de l'Etat de Kano Abba Kabir Yusuf.

Les autorités des États de Yobe et de Borno, également dans le nord, ont également imposé un couvre-feu de 24 heures.

A Abuja, les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes et installé des barbelés pour empêcher plusieurs centaines de manifestants d'accéder au parc Eagle Square.

Elles ont également tiré des gaz lacrymogènes pour disperser une foule à Mararaba, dans la banlieue de la capitale, a constaté un journaliste de l'AFP.

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Benson Ibeabuchi

Les participants au mouvement #EndbadGovernanceinNigeria (Mettre fin à la mauvaise gouvernance au Nigeria) demandent à M. Tinubu de revenir sur certaines réformes, comme la suspension de la subvention aux carburants, et de "mettre fin à la souffrance et à la faim" dans le pays.

- Poussés "par la faim" -

"La faim m'a poussé à manifester", a commenté l'un d'eux, Asamau Peace Adams, 24 ans, devant le stade national d'Abuja. "Tout cela est dû à la mauvaise gouvernance", a-t-il ajouté.

Dans la capitale économique, Lagos, près d'un millier de personnes ont défilé pacifiquement, en scandant "Tinubu Ole", qui signifie "Tinubu voleur" en yoruba, une des principales langues du pays.

Les médias locaux ont affirmé que des centaines de manifestants étaient descendus dans les rues de Maiduguri, dans l'État de Bauchi (nord-est), et dans plusieurs autres États du pays.

Les organisateurs de ces manifestations, une coalition informelle de groupes de la société civile, ont affirmé vouloir poursuivre leurs actions malgré des recours juridiques visant à limiter les rassemblements aux parcs publics et aux stades.

Jeudi après-midi, la plupart des manifestants semblaient s'être dispersés, à l'exception de petits groupes.

"Ce n’est pas fini", a déclaré à Abuja Damilare Adenola, 29 ans, militant et leader du groupe Take It Back ("Reprenons-le"). "Si la foule se disperse aujourd’hui, nous reviendrons demain", a-t-il ajouté.

Les représentants du gouvernement avaient appelé la population à laisser le temps aux réformes de porter leurs fruits, en dressant la liste des aides proposées pour atténuer les difficultés économiques, notamment l'augmentation du salaire minimum et la livraison de céréales dans les États du pays.

"Le gouvernement du président Tinubu reconnaît le droit de manifester pacifiquement, mais la circonspection et la vigilance doivent être nos mots d'ordre", a déclaré le secrétaire du gouvernement George Akume, en appelant "à poursuivre sur la voie de la paix, du dialogue et de la collaboration".

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Benson Ibeabuchi

L'armée nigériane avait elle mis en garde contre toute reproduction des violences récentes au Kenya, théâtre de manifestations meurtrières qui ont forcé le gouvernement de William Ruto à retirer un projet fiscal décrié en juin. Au moins 50 personnes ont été tuées, selon l'agence nationale de protection des droits humains.

Le dernier grand mouvement de protestation au Nigeria remonte à octobre 2020. Baptisé #EndSARS, il entendait mettre fin aux abus d'une brigade de police, la SARS, s'étendant ensuite en une vaste contestation politique.

L'unité de police avait été dissoute, mais au moins 10 manifestants avaient été tués, selon Amnesty International. Le gouvernement et l'armée ont nié toute responsabilité.

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