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Des milliers de civils palestiniens ont fui mercredi le nord de la bande de Gaza pilonnée par les bombardements d'Israël, qui affirme resserrer son étau sur la ville de Gaza et sur les combattants du Hamas.
Le Premier ministre israélien a de nouveau exclu mercredi tout cessez-le-feu sans la libération des otages enlevés par le Hamas le 7 octobre, lors de son attaque sur le sol israélien qui a déclenché la guerre.
Une source proche du Hamas à Gaza a indiqué à l'AFP que des négociations menées par le Qatar étaient en cours pour la libération de douze otages, dont six Américains, en échange d'une trêve humanitaire de trois jours dans le territoire soumis aux bombardements et à un siège total depuis plus d'un mois.
Selon un nouveau bilan des autorités israéliennes mercredi, 239 personnes sont retenues à Gaza.
L'armée israélienne a indiqué que 50.000 civils ont fui mercredi par le "couloir d'évacuation" ouvert pendant quelques heures sur la route reliant le nord au sud de Gaza, contre 15.000 dénombrés mardi par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).
"Ils partent parce qu'ils comprennent que le Hamas a perdu le contrôle du nord et que la situation est plus sécurisée dans le sud", a affirmé le porte-parole de l'armée Daniel Hagari, ajoutant que ce couloir serait de nouveau ouvert jeudi.
- "Nous sommes épuisés" -
Quittant leurs foyers les mains vides ou n'emportant que le strict nécessaire, ils ont pris à pied ou en charrette la direction du sud du territoire où s'entassent déjà des centaines de milliers de déplacés. Selon l'ONU, 1,5 million de personnes sur les 2,4 millions d'habitants de Gaza ont été déplacés par la guerre.
"Hier (mardi) nous avons pris la décision de partir parce que les bombardements étaient très intenses", a dit à l'AFP Ehsan Abu Sleem. "Les enfants et les femmes étaient terrifiés et nous ne pouvions plus le supporter."
Israël a juré de "détruire le Hamas" en représailles à l'attaque d'une violence et d'une ampleur sans précédent depuis la création d'Israël en 1948, menée par les commandos du mouvement islamiste, au pouvoir dans le territoire palestinien.
Au moins 1.400 personnes sont mortes en Israël depuis le début de la guerre déclenchée par cette attaque, en majorité des civils tués le 7 octobre, selon les autorités israéliennes.
Les représailles d'Israël dans la bande de Gaza ont fait 10.569 morts, en majorité des civils, dont 4.324 enfants, selon le ministère de la Santé du Hamas.
- Tunnels neutralisés -
L'armée israélienne a assuré mercredi qu'elle était entrée "profondément" à l'intérieur de la ville de Gaza où les combats au sol font rage et dans lesquels 33 militaires sont morts depuis le lancement de l'offensive terrestre le 27 octobre.
Selon Israël, la ville abrite le "centre" du Hamas retranché dans un réseau de tunnels de plusieurs centaines de kilomètres, selon les expert.
L'armée israélienne a diffusé mercredi des images montrant ses troupes au sol en train de localiser puis de faire exploser ces souterrains. Quelque 130 entrées de tunnels ont été découvertes, selon elle.
Selon un journaliste de l'AFP, les bombardements ont repris dans la nuit de mercredi à jeudi aux abords de l'hôpital de Chifa, à Gaza-ville, où selon l'ONU une deuxième cargaison de fournitures médicales est parvenue mercredi soir.
L'AFP a pu s'approcher mercredi de l'épicentre des combats dans le nord de Gaza lors d'une visite organisée par l'armée israélienne et dont les images ont été soumises à la censure militaire. Palmiers brûlés, lampadaires tordus, panneaux de signalisation déformés témoignaient de l'intensité de l'offensive le long de la route côtière en ruine.
- Portion de pain -
De multiples appels ont été lancés en faveur d'un arrêt des combats pour acheminer de l'aide à la population du territoire de 362 km2 privée d'eau, d'électricité, de nourriture et de médicaments par le siège total imposé par Israël depuis le 9 octobre.
Gaza, miné par la pauvreté, était déjà soumis à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007.
Treize ONG, dont Médecins sans frontières (MSF) et Amnesty International, ont appelé mercredi à un "cessez-le-feu immédiat", à la veille d'une conférence internationale humanitaire organisée par la France.
Les chefs de diplomatie des pays du G7, réunis à Tokyo, ont eux plaidé mercredi pour des "pauses et couloirs humanitaires" à Gaza.
La situation humanitaire s'aggrave de jour en jour, selon les ONG, alors que l'aide internationale arrive au compte-gouttes par le passage de Rafah avec l'Egypte.
Dans le nord, "de nombreuses personnes cherchant désespérément de la nourriture se sont introduites dans les trois dernières boulangeries où il restait des stocks de farine de blé", selon l'Ocha. Dans le sud, il faut "quatre à six heures d'attente en moyenne pour recevoir la moitié d'une portion normale de pain", a précisé l'organisation onusienne.
- Pas d'"occupation" -
Par ailleurs, l'évacuation vers l'Egypte des blessés palestiniens et des binationaux a été à nouveau interrompue mercredi, selon un responsable palestinien, malgré la foule de réfugiés se pressant à Rafah pour quitter le territoire.
Alors que des questions se posent déjà sur l'avenir de Gaza, le gouvernement israélien a jugé mercredi "très prématuré" d'évoquer des "scénarios" futurs. La bande de Gaza doit être "démilitarisée" pour empêcher un retour du Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.
Israël devra alors "avoir une responsabilité générale de sécurité pour une période indéfinie", a déclaré Ron Dermer, ministre israélien des Affaires stratégiques. Mais "il ne s’agira pas d’une occupation" du territoire d'où Israël s'est retiré en 2005, a-t-il assuré.
Le porte-parole de la Maison Blanche, John Kirby, a précisé la position américaine, selon laquelle la présence à Gaza de l'armée israélienne "ne doit pas être une solution sur le long terme".
Mais "juste après le conflit il semble très plausible qu’au moins pour une certaine période l’armée israélienne restera à Gaza pour gérer les conséquences immédiates de l’après-guerre et la situation sécuritaire", a-t-il dit lors d'un briefing mercredi soir.
La communauté internationale craint une extension du conflit, notamment à la frontière israélo-libanaise, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah, soutenu par l'Iran. Selon un décompte de l'AFP, les violences ont fait 83 morts côté libanais (61 combattants du Hezbollah, 11 combattants d'autres groupes et 11 civils).
L'aviation israélienne a également visé mercredi soir des positions en Syrie du Hezbollah, tuant trois combattants pro-iraniens, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
Les Etats-Unis ont eux frappé mercredi une "installation de stockage d'armes" en Syrie liée selon eux à l'Iran, en réponse à des attaques contre des personnels américains qui se sont multipliées depuis le début de la guerre à Gaza.
Selon l'OSDH, cette frappe a fait neuf morts liés à des groupes soutenus par l'Iran.