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Elections au Mexique: deux pays aux urnes, du nord industriel au sud en quête de développement

Blanca Lopez dirige une entreprise qui fabrique des pièces de précision pour Boeing dans le nord du Mexique. Sandra Sanchez attend les clients dans son petit restaurant du sud du pays.

Les deux femmes sont appelées aux urnes dimanche, mais semblent vivre dans deux pays différents sur un même territoire nommé Mexique, d'une étendue de près de deux millions de km2.

Tourné vers le Texas et les Etats-Unis, avec sa capitale industrielle Monterrey, le nord est le moteur industriel et des exportations du Mexique.

Historiquement sous-développé, le sud -péninsule du Yucatan, Chiapas, Oaxaca-, a bénéficié de gros investissements sous le mandat du président de gauche nationaliste sortant Andres Manuel Lopez Obrador pour combler son retard.

A Monterrey, Blanca Lopez, 41 ans, reçoit l'AFP devant des machines qui moulent des composants d'acier pour l'industrie aéronautique.

"Les pièces peuvent servir aux sièges ou même à l'intérieur des turbines ou du moteur de l'avion", raconte la directrice exécutive de Mimsa Maquinados, dont l'usine est installée à Santa Catarina, dans la zone métropolitaine de Monterrey.

L'usine, dont l'histoire a commencé dans le petit atelier du père de Blanca, travaille également pour l'industrie chimique et agro-alimentaire.

"Savoir que nous travaillons bien, et que notre personnel est qualifié, tout cela nous remplit d'orgueil", sourit Blanca.

A deux heures de la frontière avec le Texas, le cluster aérospatial de Monterrey abrite d'autres d'entreprises qui fabriquent des pièces pour General Electric.

Monterrey est la capitale du Nuevo Leon, qui représente 8% du PIB mexicain, pour à peine six millions d'habitants sur 129 millions au total.

- "Relever le pays" -

A quelque 1.400 km au sud-est, Sandra Sánchez attend le client dans son restaurant de Chiltepec, un village pittoresque de l'Etat du Tabasco.

Chiltepec se trouve à 20 minutes de la raffinerie d'Olmeca à Dos Bocas, un des grands travaux du président sortant Andres Manuel Lopez Obrador, originaire du Tabasco.

La jeune femme de 34 ans parle avec tendresse de "la petite tête de coton", en référence aux cheveux blancs du président sortant, 70 ans.

"L'économie a beaucoup changé depuis que le mandat du grand-père a commencé (ndr: en décembre 2018)", poursuit Sandra. "On voit la différence avec les mandats précédents".

Sandra en a profité. Quand la raffinerie était en construction, le restaurant a reçu des centaines d'ouvriers et les recettes ont augmenté. La fin des travaux a entraîné une baisse de la fréquentation.

Outre la raffinerie, le président sortant a lancé deux autres méga-chantiers pour compenser les retards du sud.

D'une distance totale de 1.500 km, le train Maya est supposé répartir dans toute la péninsule du Yucatan les dividendes du tourisme, et pas seulement à Cancun ou sur le site archéologique de Chichen Itza.

Le projet a coûté selon les estimations 30 milliards de dollars, bien plus que le budget initial. Le train a été officiellement inauguré par Lopez Obrador en décembre 2023.

Le président a également lancé un "corridor interocéanique" entre le Pacifique et l'Atlantique, avec des trains de passagers et de marchandises entre les ports de Salina Cruz (Oaxaca) et Coatzacoalcos sur le golfe du Mexique, dans l'état du Veracruz.

Le gouvernement a annoncé un investissement de 2,85 milliards de dollars (2,61 milliards d'euros) pour ce projet qui se pose en complément ou en rival du canal de Panama.

- Une croissance durable? -

Avec ces grands travaux, le sud-est du Mexique "ne sera plus jamais oublié", a déclaré le président, dont le parti Morena devrait gagner la présidentielle dimanche avec sa candidate Claudia Sheinbaum.

L'état du Oaxaca a également bénéficié de la construction d'une autoroute pour relier sa capitale Oaxaca à Puerto Escondido, sur le Pacifique, et ses plages bien connues des touristes étrangers.

Quels seront les effets des investissements à long terme? Le Tabasco a connu la plus forte baisse de création d'emplois en mars (-1.4%), d'après un rapport de la banque espagnole BBVA, leader sur le marché mexicain.

"Nous avons vu que les indices d'emplois ne sont plus aussi dynamiques qu'au plus fort des travaux (de la raffinerie)", affirme Jesús Carrillo, de l'Institut mexicain de la compétitivité (IMCO).

La fin des travaux de la raffinerie se fait aussi sentir du côté de Paraiso, près de Chiltepec. "Les gens vont commencer à se plaindre qu'il n'y a plus de travail", soupire Juan Gabriel Córdova, un pêcheur de 49 ans.

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