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Des soldats nord-coréens auraient été envoyés en Russie, selon l'OTAN: dans quel but?

Pour le ministre sud-coréen de la Défense Kim Yong-hyun, ces soldats seront utilisés comme "des mercenaires et de la chair à canon" par la Russie: "Kim Jong Un a tout simplement vendu ses soldats".

Les Etats-Unis et l'Otan ont fait part pour la première fois de preuves de la présence de "milliers" de soldats nord-coréens sur le territoire de la Russie, qui selon Séoul veut en faire de la "chair à canon" pour son invasion de l'Ukraine.

Voici ce que l'on sait et les implications de ces informations qui font craindre aux Occidentaux une escalade majeure dans le conflit entre la Russie et l'Ukraine.

Que disent les alliés de Kiev?

Les Etats-Unis, l'Otan et la Corée du Sud affirment que des milliers de militaires nord-coréens ont déployés en Russie pour y suivre un entraînement. Pyongyang a réfuté des "rumeurs", tandis que la Russie se contente de réponses évasives.

Selon les renseignements sud-coréens, des premières troupes d'élites sont parties début octobre à Vladivostok et 3.000 Nord-Coréens s'entraînent actuellement dans plusieurs bases militaires de l'Extrême orient russe, portant des uniformes russes. Des milliers d'autres doivent suivre, selon la même source.

Chaque soldat sera payé environ 2.000 dollars (autour de 1.800 euros) par mois, plus que le salaire moyen annuel en Corée du Nord, et la Russie recrute actuellement des interprètes pour former ces militaires au maniement de drones et d'équipements high-teh, selon les services de renseignement sud-coréens.

Que vont faire ces soldats?

Les forces spéciales nord-coréennes sont entraînées à "être déployées en profondeur en territoire ennemi", explique à l'AFP Lim Eul-chul, professeur à l'Institut pour les études sur l'Extrême orient de Séoul.

"Leur objectif est habituellement d'infiltrer l'arrière (du front, ndlr), de frapper des installations clés et de mener des opérations perturbatrices", ajoute-t-il. Le chef du renseignement militaire ukrainien, Kyrylo Boudanov, a évoqué l'arrivée prochaine de premiers soldats nord-coréens dans la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine. Kiev y contrôle plusieurs centaines de kilomètres carrés depuis son offensive surprise déclenchée début août. 

La région de Koursk "est essentiellement constituée de plaines et Kim Jong Un (...) pourrait avoir envoyé (ces soldats) pour servir de chair à canon en première ligne", estime le professeur Lim. Selon lui, leur rôle "consistera probablement davantage à perturber et à isoler les forces ukrainiennes à l'arrière et à apporter du soutien aux soldats russes".

La région de Koursk étant un territoire russe, le dirigeant nord-coréen peut "défendre son déploiement en disant qu'il aide la Russie à repousser une agression ukrainienne", relève de son côté Vladimir Tikhonov, spécialiste des questions coréennes à l'université d'Oslo. Les députés russes ont d'ailleurs voté jeudi la ratification d'un traité entre Moscou et Pyongyang prévoyant notamment "une aide militaire immédiate" en cas d'agression armée de pays tiers. 

Pourquoi la Russie a-t-elle besoin de ces troupes?

"La Russie souffre d'un manque aigu de personnel sur le front", relève M. Tikhonov. Des Nord-coréens peuvent ainsi prendre en charge des fonctions à l'arrière du front "permettant à des soldats russes auparavant occupés par la logistique d'être envoyés vers le front", avance-t-il.

Pour Moscou, ce déploiement pourrait aussi constituer un test, après plus de deux ans et demi de guerre, afin de "jauger la réaction de l'Otan ou de la communauté internationale" à l'implication de nouveaux acteurs, estime Lee Dong-gyu, chercheur à l'institut Asan, basé à Séoul.

Quelle sera la réaction de la Corée du Sud?

Alors que les relations entre Pyongyang et Séoul sont au plus bas depuis des décennies, les autorités sud-coréennes ont réagi avec force et prévenu qu'elles ne resteraient pas "les bras croisés". La Corée du Sud, exportateur majeur d'armements, suit traditionnellement une politique consistant à ne pas fournir d'armes vers des zones de conflit actifs.

"Nous pourrions revoir cette question avec plus de souplesse en fonction des actions des forces nord-coréennes", a déclaré le président Yoon Suk Yeol. "Vu la transparence avec laquelle le renseignement (sud-coréen) a rendu publiques ses informations sur le déploiement nord-coréen, il semble que le gouvernement ait décidé de s'engager à soutenir militairement Kiev", estime Choi Gi-il, un ancien responsable de la sécurité nationale.

Selon Han Kwon-hee, de l'Association coréenne d'études sur l'industrie de défense, il pourrait s'agir d'abord surtout d'armes défensives, comme des missiles sol-air dont Séoul dispose abondamment.

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