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Au Nebraska, grand bazar électoral autour de l'avortement

Le mois prochain, l'avortement fera l'objet de référendums locaux un peu partout aux Etats-Unis: un débat enflammé qui tourne au grand bazar dans le Nebraska, avec deux textes concurrents et des accusations de tromperie entre républicains et démocrates.

Cet Etat du Midwest interdit actuellement l'IVG après 12 semaines. Mais en allant aux urnes, les électeurs devront se prononcer sur deux façons d'amender la constitution locale.

"C'est déroutant" confie à l'AFP Jean Hanson, une comptable d'Omaha.

D'un côté, un référendum soutenu par la droite propose simplement d'entériner le statu quo, en inscrivant les dispositions existantes dans la loi fondamentale de l'Etat.

De l'autre, un texte préféré par la gauche souhaite que la constitution garantisse le droit à l'avortement avant la viabilité du fœtus, soit entre 22 et 24 semaines.

S'ils sont tous les deux approuvés, seul le référendum qui recueille le plus grand nombre de voix en sa faveur entrera en vigueur.

Si Mme Hanson s'est bien renseignée, elle sait que c'est loin d'être le cas de tous.

"Je pense que beaucoup de gens voteront pour les deux, ce qui va à l'encontre du but recherché, ou qu'ils finiront par voter pour la mauvaise", regrette cette sexagénaire.

Chaque référendum d'initiative populaire a largement dépassé le nombre de signatures nécessaires pour faire l'objet d'un vote.

Mais déjà pendant ce processus, des dizaines d'habitants ont assuré aux médias locaux avoir été trompés: certains ont signé la pétition de droite, en pensant soutenir le texte de gauche, et vice versa.

"Il y a eu de la confusion", reconnaît Merv Riepe, un parlementaire local républicain. Or, "il est plus facile de mettre son nom sur une pétition que de le faire retirer."

En parallèle de la présidentielle, les électeurs devront donc lire avec attention les propositions 434 et 439 sur l'avortement, pour s'assurer de ne pas cocher la mauvaise case sur leur bulletin de vote.

- Accusations mutuelles -

Pour l'élu local démocrate John Cavanaugh, le camp conservateur a créé son propre texte après celui de la gauche, "pour brouiller les pistes et rendre plus difficile l'adoption" du texte garantissant l'IVG jusqu'à la viabilité.

A contrario, le républicain Don Bacon accuse ses adversaires démocrates d'être "trompeurs". Pour lui, ces derniers "exagèrent" la sévérité du texte de droite, qui interdit l'avortement après 12 semaines, avec des exceptions en cas de viol et d'inceste.

Un excellent reflet de la bataille présidentielle entre Donald Trump et Kamala Harris, où l'avortement occupe une place centrale.

La démocrate accuse M. Trump d'être l'architecte du recul du droit à l'avortement aux Etats-Unis.

Le milliardaire républicain s'est souvent vanté d'avoir nommé les juges de la Cour suprême qui ont annulé la garantie constitutionnelle à l'IVG en 2022, mais tente aussi de relativiser cette décision, qu'il sait impopulaire auprès des Américains.

Depuis deux ans, au moins 20 États américains ont interdit ou restreint l'accès à l'avortement d'une manière ou d'une autre, dont le Nebraska, où la question est particulièrement épineuse.

L'année dernière, le vote de M. Riepe au Sénat local a empêché l'adoption d'une loi interdisant l'avortement après six semaines. Le parlementaire républicain a alors reçu des lettres d'insultes, et a dû être placé sous protection policière.

Un de ses collègues conservateurs lui a même envoyé un message lui souhaitant de "rôtir dans les tréfonds de l'enfer", se souvient-il.

"Mais nous sommes à nouveau amis maintenant", assure l'élu.

M. Riepe a ensuite rédigé la loi actuelle sur les 12 semaines, choisissant cette durée en s'inspirant de pays européens comme l'Allemagne et l'Italie.

Maintenant qu'elle a été votée, cet ancien administrateur d'hôpital soutient un projet de loi autorisant l'avortement jusqu'à 20 semaines lorsque le fœtus souffre d'une maladie mortelle.

Le parlement du Nebraska a reporté son examen pour une durée indéterminée.

En attendant, ce parlementaire compte "probablement rester à l'écart des deux" référendums du mois prochain. "Les deux côtés déforment un peu la réalité", estime-t-il.

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