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Le candidat de l'opposition vénézuélienne Edmundo Gonzalez Urrutia, qui revendique la victoire à la présidentielle, a refusé de se rendre à la convocation mercredi de la Cour suprême, dans le cadre d'une procédure lancée par Nicolas Maduro pour faire "valider" sa réélection contestée.
"Si je vais" à la Cour Suprême (...) "je mettrai en danger non seulement ma liberté mais aussi, plus important : la volonté du peuple vénézuélien exprimée le 28 juillet", date du scrutin, écrit M. Gonzalez Urrutia dans un communiqué sur X.
Evoquant sa "vulnérabilité absolue", le candidat de 74 ans, qui avait remplacé au pied levé Maria Corina Machado, la cheffe de l'opposition déclarée inéligible, n'a pas été vu en public depuis plus d'une semaine, alors que Maduro le traite régulièrement de "criminel".
M. Gonzalez Urrutia risque une arrestation notamment depuis que le parquet a ouvert une enquête contre lui et Maria Corina Machado pour "usurpation de fonctions, diffusion de fausses informations, incitation à la désobéissance aux lois, incitation à l'insurrection, association de malfaiteurs".
"Il est important que sa non-comparution et son non-respect de la convocation soient consignés dans le procès-verbal", a déclaré devant une chaise vide la présidente du Tribunal suprême de Justice (TSJ), Caryslia Rodriguez, au siège de la haute juridiction.
La réélection de Maduro a été proclamée par le Conseil national électoral (CNE) qui n'a toutefois pas donné le détail du vote des bureaux.
Le CNE, tout comme le TSJ, est considéré comme étant aux ordres du pouvoir par l'opposition mais aussi par la plupart des observateurs.
La Cour suprême, qui a convoqué tous les candidats, ainsi que d'autres responsables, dans le cadre de sa saisie par M. Maduro, a indiqué qu'elle se donnait "15 jours prolongeables" pour rendre une décision. M. Maduro a rendez-vous vendredi.
D'autres représentants de la coalition de l'opposition ont répondu mercredi à l'appel du TSJ.
- "Tenté de frauder" -
"Aucun parti politique ne sait onze jours après le processus électoral, quel a été le résultat du vote", a déploré Simon Calzadilla, du Mouvement pour le Venezuela (MPV), qui a soutenu M. Gonzalez Urrutia.
Contestant la procédure, il a ajouté: "Nous ne comprenons pas ce que nous faisons ici. Le TSJ ne peut pas usurper les fonctions constitutionnelles du pouvoir électoral" et "certifier des résultats" qui doivent être donnés par le CNE.
Sur le plan international, le président chilien Gabriel Boric a accentué la pression sur son homologue vénézuélien. "Je n'ai aucun doute sur le fait que le régime de Maduro a tenté de frauder", a-t-il déclaré.
"Si ce n'était pas le cas, ils auraient montré les fameux procès-verbaux. Pourquoi ne l'ont-ils pas fait? S'ils avaient gagné, il est clair qu'ils auraient montré les procès-verbaux", a souligné M. Boric.
Le secrétaire d'État américain Antony Blinken "s'est entretenu mercredi avec le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres", a indiqué Matthew Miller, porte-parole des Affaires étrangères, soulignant que les deux hommes ont notamment "exprimé leur inquiétude quant à la sécurité et au bien-être des dirigeants de l'opposition".
Plusieurs pays, dont les Etats-Unis et l'Argentine, ont reconnu M. Gonzalez Urrutia comme le vainqueur du scrutin, tandis que d'autres, comme l'Union européenne, se sont abstenus de le faire tout en réclamant la publication intégrale des procès-verbaux.
Interrogée lors d'une conférence sur internet, Mme Machado n'a pas exclu que la Colombie, le Brésil et le Mexique, qui se sont montrés prudents dans leurs prises de positon, puissent "effectivement établir des termes de négociation clairs, fermes et efficaces".
Elle a souligné que malgré la répression "massive", "ici, personne ne recule et personne n'est démoralisé! Au contraire, nous sommes déterminés (...) à accroître la pression de l'extérieur, l'élan et à amener Maduro à (...) accepter les termes d'une négociation pour une transition".
Le CNE a ratifié la victoire de M. Maduro avec 52% des voix, sans toutefois rendre publics tous les procès-verbaux des bureaux de vote, assurant avoir été victime d'un piratage informatique.
Mercredi, Jennie Lincoln, la cheffe de mission de la Fondation Carter invitée à observer le scrutin a estimé qu'"il n'y a aucune preuve quelle qu'elle soit" d'un piratage du système électoral et "confirmé" les chiffres de l'opposition donnant son candidat vainqueur devant le président sortant Maduro.
Selon l'opposition, qui a publié les procès-verbaux obtenus grâce à ses scrutateurs --dont la validité est rejetée par M. Maduro-- M. Gonzalez Urrutia a remporté le scrutin avec 67% des voix.
Les troubles qui ont suivi la proclamation de la victoire du président sortant ont fait 24 morts, selon un bilan actualisé mardi par des organisations de défense des droits humains. M. Maduro a, lui, annoncé la mort de deux membres de la garde nationale et l'arrestation de plus de 2.200 personnes.