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Des gendarmes mobiles s'abritent derrière leurs véhicules et mettent en joue la colline boisée surplombant la route, à Païta. Un homme armé se cache dans les fourrés, le long de cet axe stratégique reliant Nouméa à l'aéroport.
Les forces de l'ordre ont la mission de déblayer et sécuriser cette route qui mène à l'aéroport international de La Tontouta, fermé jusqu'à dimanche au moins, conséquence des émeutes qui ont secoué la Nouvelle-Calédonie pendant une quinzaine de jours, la plus grave crise sur cet archipel français du Pacifique sud depuis les années 1980, avec sept morts.
Et si les flammes de l'opposition à la loi constitutionnelle se sont en grande partie éteintes, des braises restent encore vives ici ou là.
Depuis Nouméa, la route est d'abord fluide, seuls les débris qui jonchent la chaussée rappellent les émeutes.
A Apogoti, en banlieue, un barrage brûle légèrement, avec quelques militants à l'air fatigué qui filtrent encore mollement le passage des automobilistes. Une enceinte portative crachote du reggae, et un caddie posé en équilibre précaire sur une carcasse de voiture est alimenté en essence pour former le brasier du jour.
Mais à Païta nord, la route est bloquée par une intervention des forces de l'ordre. Dans l'air se mêlent une odeur de gaz lacrymogène et le gazouillis tropical des oiseaux, mais aussi le vrombissement d'un drone de surveillance.
"Souriez, vous êtes filmés", s'amuse Steve, 54 ans, qui ne donne pas son nom complet, et qui, désabusé, "attend pour essayer d'aller travailler".
"Gendarmerie nationale, les mains en l'air!", entend-on à 100 mètres, tandis que les automobilistes devisent tranquillement à côté de leurs voitures.
"Sur le petit monticule qui est situé à droite de notre dispositif, depuis ce matin on a un individu avec un fusil à lunette qui circule", qui "était présent quand on est arrivé ce matin et qui s'est caché dans les fourrés", explique à l'AFP Stéphane P., commandant du groupe tactique du Mont-Dore.
- "On joue au chat et à la souris" -
"Un tireur a été vu au bord de la route", abonde un autre militaire, qui a requis l'anonymat, et qui conseille de passer le tronçon en roulant vite, après la levée de l'intervention.
"Pour l'instant on n'a aucune menace verbale proférée à notre encontre, on est vigilant parce qu'on est dans une zone où, au vu de ce qu'il y a sur le terrain, il y a eu beaucoup d'opposition, donc on se prépare à avoir une opposition peut-être dans la journée qui reviendrait sur le compartiment de terrain qu'on est en train de nettoyer", avance Stéphane P.
A Païta nord, ils sont plus de 200 militaires chargés de déblayer la route tout en s'assurant qu'aucun barrage n'y sera réintroduit la nuit. L'objectif est que cet axe, qui permet de relier Nouméa au nord de la Grande Terre, "soit libéré d'ici la fin de la semaine", affirme aussi le porte-parole.
"L'engagement continu des policiers et des gendarmes sur le terrain permet de poursuivre la sécurisation des communes de Païta, Dumbéa et du Mont-Dore", a affirmé le Haut-Commissariat de la République dans un communiqué publié à la mi-journée localement.
A l'aide de "80 véhicules", le dégagement des voies progresse, et "141 carcasses ont pu être retirées ces dernières 24 heures dans le secteur du Pont des Erudits", à Dumbéa, a précisé le représentant de l'Etat.
Un peu plus au nord, la route est un temps bloquée en raison du déblaiement des carcasses. Et au col de La Pirogue, un point de blocage névralgique pour l'accès à l'aéroport, des militants sourient auprès d'une voiture en feu et devant des véhicules qui circulent librement.
"Nos responsables nous disent de maintenir les barrages filtrants, pacifiquement, dans le respect de tous les usagers", dit à l'AFP Hino, de la tribu de Saint-Laurent, qui ne donne que son prénom.
"On a suivi le mot d'ordre: on joue au chat et à la souris. Les forces de l'ordre peuvent enlever (les barrages), mais nous derrière on les remet". Craint-il les forces de l'ordre qui vont arriver? "On les craint, mais ils n'ont pas à être agressifs, nous on n'est pas agressifs, toujours pacifiques".