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Inceste: la Ciivise veut associer les jeunes à ses travaux

La Ciivise, commission indépendante sur l'inceste, a présenté vendredi de nouvelles pistes de travail, notamment sur les enfants handicapés, et ses projets pour intégrer les jeunes à ses travaux, lors d'un colloque aux allures de relance après une crise de gouvernance.

"Nous assurerons le suivi et la mise en œuvre des 82 recommandations" faites par la commission fin 2023 "pour que chaque mesure se traduise par des actions concrètes" a affirmé la magistrate Maryse Le Men Régnier, membre du collège directeur de la Ciivise, sur fond d'impatience des associations près d'un an après la publication de ces préconisations pour mieux détecter, protéger et accompagner les victimes d'inceste.

"Trois enfants par classe sont victimes d’inceste chaque année en France, et 5 millions et demi de Français ont vécu des violences sexuelles dans leur enfance", selon la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants.

Lors d'une conférence de presse, les membres du trio directeur de la commission, secouée en début d'année par les démissions successives de sa vice-présidente puis de son président, ont exposé la façon dont ils veulent intégrer les mineurs à leurs travaux pour mieux ajuster les dispositifs de lutte contre les violences.

Des "ateliers collectifs" seront menés début 2025 par des membres de la Ciivise dans "cinq territoires partenaires", en partenariat avec l'Education nationale et des municipalités, pour recueillir auprès de cent jeunes, pas nécessairement victimes eux-mêmes, idées et suggestions sur la prévention.

- "Regard de jeunes" -

Un "groupe miroir" de quinze adolescents engagés dans la société est également créé pour avoir un "regard de jeunes" sur les recommandations. Un appel à candidatures est ouvert jusqu'au 25 octobre.

Un projet de recherche sera lancé concernant des adolescents victimes de violences sexuelles, pour analyser comment ils ont été traités par leur entourage et les institutions après avoir révélé les faits.

La Ciivise lance aussi des groupes de travail sur des thèmes non abordés jusque là: l'un porte sur les enfants handicapés "qui sont beaucoup plus touchés et ont moins accès aux dispositifs d'alerte", selon le pédopsychiatre Thierry Baubet, membre du collège directeur.

"Des violences sexuelles" ont lieu dans les "transports sanitaires", a-t-il affirmé, soulignant un manque de vérification des antécédents judiciaires des ambulanciers.

D'autres groupes de travail se penchent sur l'Outre-mer, la cyberpédocriminalité, "en pleine explosion", les violences sexuelles entre mineurs.

De nouvelles recommandations sur ces sujets seront faites d'ici la fin du mandat de la Ciivise, en octobre 2025.

Le gouvernement a lancé cette commission en mars 2021 dans le sillage de la publication du récit de Camille Kouchner, "La Familia Grande". Elle y dénonçait l'inceste commis sur son frère par le politologue Olivier Duhamel.

- Témoignages supplémentaires -

En novembre 2023, elle a rendu ses 82 préconisations pour mieux protéger les mineurs et accompagner les adultes qui en ont été victimes enfant.

Lors d’une réunion interministérielle fin 2023, le gouvernement d'alors avait écarté d’emblée 17 de ces préconisations, en avait accepté 41 et demandé des travaux supplémentaires sur 24, a expliqué le Pr Baubet.

La Ciivise veut pour sa part reprendre aujourd'hui l'ensemble des 82 préconisations, voire aller "plus loin" sur certaines d'entre elles.

En ouvrant le colloque, la nouvelle ministre de la Famille Agnès Canayer a assuré "adhérer pleinement" aux "objectifs de concrétisation rapide des recommandations dans les dispositifs de droit commun pour permettre l’ancrage durable d’une solide culture de prévention et de lutte contre l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants".

Maryse Le Men Régnier, pour le collège directeur, a exprimé son souhait de voir le gouvernement s'engager à instaurer pour les enfants "les dispositifs mis en oeuvre pour les victimes de violences conjugales".

Le recueil de témoignages lancé en septembre 2021 par la Ciivise se poursuit, par internet ou ligne téléphonique dédiée. Ce dispositif a reçu 1.200 appels en 2024, "au même rythme" que les années précédentes, "alors qu'il n'y a pas eu de campagne de sensibilisation, ce qui montre que le besoin de témoigner ne s'est pas éteint", selon la Commission.

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