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Tout juste nommé à Matignon, Michel Barnier a vanté vendredi sur TF1 sa "capacité à négocier" pour convaincre l'Assemblée nationale, où aucun bloc ne dispose de la majorité absolue, et donné des gages à la droite, comme à la gauche, promettant d'ouvrir le débat sur la réforme des retraites.
Dans sa première interview télévisée en tant que chef du gouvernement, il a aussi assuré qu'il "respectait" les 11 millions d'électeurs du Rassemblement national, dont dépend sa survie au Parlement mais qu'il n'avait "rien en commun ou pas grand chose de commun avec les thèses ou les idéologies" du parti d'extrême droite.
Le président de la République Emmanuel Macron est accusé d'avoir placé M. Barnier sous la tutelle du Rassemblement national, qui a donné un feu vert implicite à sa nomination, après avoir refusé celle de Bernard Cazeneuve puis de Xavier Bertrand.
L'ancien ministre de droite et négociateur du Brexit a justifié sa nomination par sa "capacité de négocier, de mettre des gens ensemble, de les respecter, de les écouter".
Chargé de "constituer un gouvernement de rassemblement au service du pays", le Savoyard de 73 ans se sait déjà en sursis et va devoir trouver les bons équilibres pour ne pas tomber à la première motion de censure.
Sur sa relation de travail avec Emmanuel Macron, il a assuré que "le président (allait) présider et le gouvernement gouverner", en "indépendance" mais aussi "en bonne intelligence avec le président".
L'entourage du chef de l'Etat prône aussi une relation inédite, non pas de cohabitation mais de "coexistence exigeante".
- "Amélioration" sur les retraites -
Sur le fond de sa politique, Michel Barnier a souhaité "ouvrir le débat" pour une "amélioration" de la réforme controversée sur les retraites sans pour autant "tout remettre en cause". La gauche réclame son abrogation, de même que le Rassemblement national. Il a aussi promis une plus grande justice fiscale.
En direction de la droite, il a redit ses priorités de "maîtriser les flux migratoires avec des mesures concrètes", revaloriser le travail et ne pas augmenter la dette de la France, et souligné le "besoin immense" de services publics, reprenant en cela les grandes lignes du "pacte législatif" présenté en juillet par son parti Les Républicains, dont il a besoin du soutien à l'Assemblée.
Il a aussi dit qu'il ne s'"interdisait pas" d'étudier une instauration de la proportionnelle, réclamée par plusieurs forces politiques, mais qu'il aurait "besoin (d'en) discuter avec tous les groupes".
Michel Barnier s'exprimait à l'issue d'une première série de consultations, d'abord avec son prédécesseur Gabriel Attal, désormais à la tête du groupe macroniste à l'Assemblée nationale, puis avec les dirigeants des Républicains (LR) qui ont posé leurs conditions pour une participation à un gouvernement.
"On veut sortir la France du blocage et on a dit qu'on assumerait nos responsabilités. Mais on ne le fera que sur un programme qui donne la garantie de répondre aux préoccupations des Français", a déclaré en sortant de Matignon le chef de file de la droite à l'Assemblée Laurent Wauquiez, citant "la revalorisation du travail", "les comptes publics", l'immigration et l'insécurité.
Le groupe macroniste n'aura "ni volonté de blocage, ni soutien inconditionnel", a écrit de son côté Gabriel Attal à ses membres à l'issue de son entretien, en évoquant une "possible participation" au gouvernement de Michel Barnier et en se disant "ouvert à des compromis avec d'autres forces politiques". Mais "rien ne pourra se faire sans nous", a-t-il ajouté.
- "Barycentre" -
Les consultations se passent "très bien", elles sont "pleines d'énergie", a simplement commenté Michel Barnier en quittant Matignon à la mi-journée pour un rendez-vous de travail avec Emmanuel Macron.
Dans l'après-midi, il a aussi reçu son prédécesseur Jean Castex. Il verra Elisabeth Borne samedi et Edouard Philippe dimanche.
Il s'est dit ouvert à la présence au gouvernement de "gens de gauche" même si le nouveau Premier ministre ne pourra pas compter sur elle. "Aucune personnalité du PS ne sera dans son gouvernement, je n'ai aucun doute là-dessus", a assuré Olivier Faure.
Le socialiste a confirmé que la gauche déposerait une motion de censure car "le choix qui a été fait par le chef de l'Etat, c'est de se mettre au barycentre des droites et de l'extrême droite", ce qui est "une trahison démocratique" par rapport au résultat des législatives où la coalition de gauche était arrivée en tête.
Le RN ne participera pas non plus au gouvernement mais ne votera pas de censure sauf si "le Premier ministre s'éloignait terriblement de (ses) attentes" sur le pouvoir d'achat, l'immigration, l'insécurité ou l'instauration de la proportionnelle, selon son vice-président Sébastien Chenu.
Une positionnement qui fait dire à la gauche que le RN est désormais le "faiseur de rois".
Restent donc les membres de l'ex-majorité, qui seront "nombreux à aider" Michel Barnier, selon Edouard Philippe. Pas vraiment idéal toutefois pour incarner les "ruptures" annoncées.