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Quatre migrants sont morts et des dizaines ont été repêchés par les secours alors qu'ils étaient déjà à l'eau vendredi, leur embarcation s'étant dégonflée dans la Manche qu'ils tentaient de traverser, comme des milliers de candidats à l'exil chaque année au péril de leur vie.
Une soixantaine de migrants, qui avaient pris la mer depuis les côtes proches de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) vers 2h00 du matin dans l'espoir de rallier l'Angleterre, se sont retrouvés en difficulté à l'aube, a indiqué à la presse le préfet du Pas-de-Calais Jacques Billant.
Un boudin de leur bateau pneumatique s'est dégonflé, a constaté le navire de sauvetage Minck, qui s'est rapidement porté à leur secours vers 4h30, avec l'aide d'un bateau de pêche naviguant à proximité, précise la préfecture maritime de la Manche.
Ils ont pu sauver 56 passagers, détaille le préfet Billant, dont certains étaient "à l'eau à la dérive, et d'autres encore accrochés au boudin de leur embarcation disloquée", selon la préfecture maritime.
Quatre hommes sont décédés, dont la nationalité pourrait être "somalienne, érythréenne ou éthiopienne" a précisé M. Billant. Neuf rescapés, six hommes et trois femmes, ont été hospitalisés en urgence relative, a ajouté le procureur de la République de Boulogne-sur-Mer Guirec Le Bras.
Deux Libyens, de 34 et 17 ans se trouvaient en garde à vue vendredi soir, a encore indiqué à l'AFP le procureur, qui a confié l'enquête à l'office de lutte contre le trafic illicite de migrants (Oltim).
"Un seul migrant était porteur d'un gilet de sauvetage, et (...) quelques autres étaient munis de chambres à air", a déploré le préfet, décrivant "des embarcations de très mauvaise qualité, car sous-gonflées, sans plancher", "sous-motorisées".
"Quand on est arrivés c'était la panique: il faisait encore nuit, on entendait crier, le vent et le courant étaient très forts", raconte David Malfoy, patron du bâteau de pêche Le Caprice des Temps, qui a sauvé 14 migrants, pour la plupart des hommes jeunes, Somaliens selon leurs dires.
"On a lancé tout ce qu'on pouvait à l'eau, bouées, gilets de sauvetage. Il fallait aller très vite car ils n'avaient pas de gilet", raconte-il à l'AFP. "On les a remontés à mains nues, et c'était d'autant plus dur que certains s'accrochaient aux autres".
Les quatre migrants décédés, repérés par un hélicoptère de la marine nationale, ont été récupérés par un patrouilleur de la marine française, le Cormoran.
"Avec le drame de ce matin, ce sont 20 migrants au total, qui sont malheureusement décédés depuis le début de l'année, en tentant de rejoindre la Grande-Bretagne à bord d'un small boat", a déclaré le préfet, précisant qu'un deuxième bateau a été secouru vendredi, parti du Touquet avec 40 migrants à bord. ¨
- 2024, année meurtrière -
Un bilan déjà particulièrement meurtrier sur les 7 premiers mois de 2024, trois ans après le pire drame jamais enregistré dans la Manche quand en 2021, 27 migrants, majoritairement des Kurdes irakiens âgés de 7 à 46 ans, étaient morts noyés.
La nouvelle ministre britannique de l'Intérieur Yvette Cooper a déploré cette tragédie "atroce" sur X, s'engageant à "accélérer notre action avec nos partenaires internationaux pour poursuivre et faire tomber les dangereux réseaux de passeurs".
Cet été, plus de 1.000 policiers et gendarmes sont déployés sur le littoral pour lutter contre l'immigration illégale, a indiqué le préfet du Pas-de-Calais, rappelant que 344 tentatives de traversées maritimes ont été interceptées côté français depuis le début de l'année, et 314 interpellations opérées parmi des filières de passeurs.
Plus de 12.000 personnes ont atteint les côtes anglaises clandestinement en 2024, surtout depuis la France, selon des chiffres officiels britanniques mi-juin, alors que l'immigration s'est imposée comme un thème majeur des législatives britanniques, remportées par les travaillistes.
Cela représente une hausse de 18% par rapport à la même période l'an dernier, malgré le durcissement opéré par les gouvernements conservateurs ces dernières années.
Les migrants arrivés de manière irrégulière sont désormais interdits de demander l'asile au Royaume-Uni, et les travaillistes, qui ont enterré un dispositif prévoyant de les expulser vers le Rwanda, se sont engagés à renforcer le contrôle de la Manche.